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06 avril, 2022

Inflation : on paye nos erreurs passées et présentes

 Par Franky Bee.

S’il n’y avait pas ce contexte géopolitique tragique, « redonner du pouvoir d’achat aux Français » serait incontestablement le tube de la présidentielle 2022.

Sans surprise, chacun y va de son bouc émissaire préféré, de Poutine au covid, en passant par les patrons ou encore Greta Thunberg. Et surtout, chaque candidat de cette farce quinquennale semble disposé à surenchérir au concours Lépine de la mesure la plus stupide pour lutter contre l’inflation. Au sommet de cette pyramide clownesque : l’éternel fantasme du contrôle des prix.

Projetons-nous deux secondes vers des jours heureux où les prix à la pompe seraient bloqués par un gouvernement insoumis aux lois du marché, et désireux de redonner le goût du bonheur économique à ses concitoyens. Qu’adviendrait-il après un tel coup de baguette magique ?

Du côté de l’offre, les sociétés de distribution de carburant, en vilains capitalistes, limiteraient très vite l’approvisionnement vers cette douce France communiste afin de contenir leurs pertes sur notre territoire. Tandis que du côté de la demande, nos amis belges, allemands, suisses, italiens et espagnols viendraient avec joie faire la queue à nos stations pour profiter du miracle de l’essence néo-bolchévique pas chère. En résumé : pénuries, rationnement, apparition d’un marché noir pour contrebalancer, et donc plus d’inflation. Révolutionnaire !

Mais ne croyez pas que baisser les taxes soit une meilleure solution à la spirale inflationniste. Tout comme envoyer des chèques énergie ou augmenter artificiellement les salaires, cela revient à soutenir encore davantage une demande déjà excédentaire vis-à-vis de l’offre, ce qui conduit inévitablement le pays vers cette merveille économique qu’on appelle l’hyperinflation.

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Il existe un gros mot en France : la monnaie. Une inflation incontrôlée est et a toujours été un phénomène d’origine essentiellement monétaire. Que ce soit parce que la devise s’effondre à l’international, ou bien parce qu’un État s’est lancé dans une politique de planche à billets sans retour ; ce qui revient à peu près au même in fine.

Inutile de rappeler que comme bon nombre de pays occidentaux, la France s’en est donnée à cœur joie au cours des deux dernières décennies, à la fois à travers une dette qui a explosé pour soutenir un budget de plus en plus déficitaire, mais aussi en raison d’une banque centrale européenne qui ne cesse de forcer les taux d’intérêt vers les limites abyssales tout en faisant grossir son bilan de manière exponentielle.

L’économie étant un système régi par la non-linéarité et les phénomènes critiques, vous pouvez avoir l’impression pendant plusieurs années que ce type de choses est sans conséquence, pour un beau jour vous retrouver avec une inflation hors de contrôle.

Car tout finit immanquablement par se voir. Quand vous injectez milliards sur milliards, soit via des transferts au son du désormais célèbre « quoi qu’il en coûte », soit via des achats d’actifs qui viennent soutenir artificiellement les prix de la bourse et de la pierre, il paraît illusoire de penser que la demande ne va pas finir par être totalement déconnectée de toute réalité.

Surtout quand ces mêmes choix économiques vous ont conduit à délaisser de manière structurelle les problématiques liées à la production, et y compris en ce qui concerne les ressources de base de notre économie.

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Il existe pourtant un remède un peu plus sérieux pour faire face à l’inflation. Et ce traitement de choc s’appelle le resserrement monétaire, via la hausse des taux d’intérêt.

Étonnement, pas grand-monde n’appelle madame Lagarde à prendre ses responsabilités en redonnant un vrai coût à l’argent. Pire, on la décore de la légion d’honneur en catimini à quelques semaines des élections (pour service rendu à qui ?).

La vérité est que personne ne veut voir la poule aux œufs d’or disparaître. Tout a été tenté depuis 2020 pour nier la gravité de la situation. D’abord l’inflation était transitoire à cause de la pandémie, et puis elle est devenue la responsabilité intégrale de Moscou. En attendant, nos dirigeants continuent de nous assurer que les prix se stabiliseront par magie dans quelques mois.

Pourquoi tant de réticence ? Parce qu’il s’agit là du plus grand secret de polichinelle de notre temps : au sein du système financier, tout le monde sait parfaitement que les pays occidentaux mènent depuis la fin des années 1990 une politique non-avouée de soutien massif aux marchés financiers et immobiliers.

Car nos sociétés reposent sur un gros mensonge : à savoir l’idée que l’épargne et/ou les cotisations sociales contribueraient à créer des matelas de richesse relativement sûrs à long terme. Sauf qu’il ne peut y avoir de création de richesse sans croissance économique forte. Par conséquent, les politiques néo-keynésiennes menées depuis deux décennies visent essentiellement à maintenir quoi qu’il en coûte une illusion de patrimoine qui volerait en éclat si d’aventure les taux devaient remonter (ce qui finira de toute manière par arriver). Dans le langage financier, on parle aussi de pyramide de Ponzi pour décrire ce type de situation sans issue.

Pire, puisque les maintenir artificiellement bas contribue à rendre l’économie encore plus inefficiente, les gouvernements et autorités monétaires sont contraints d’appuyer chaque fois encore un peu plus sur la pédale, créant au passage une vague spéculative sans précédent. En d’autres termes, c’est une spirale infernale qui s’est enclenchée en Europe et en Amérique, et nos élites sont totalement terrorisées à l’idée de mettre un coup de volant dans l’autre direction.

Bien entendu, nos amis « économistes atterrés », dépositaires de l’ordre moral en matière économique dans notre pays, viendront expliquer que tout cela est un mensonge ultra-libéral et que l’État ne doit jamais cesser de dépenser sans compter. Peut-être avons-nous loupé le passage où Keynes recommandait de remplacer l’appareil productif par une dépense publique permanente ? Mais bizarrement, on ne trouve aucun exemple historique de période de planche à billets qui ne se soit terminée autrement que par le chaos.

La chose la plus dérangeante dans tout cela est que l’arme des taux d’intérêt est certes une condition nécessaire pour lutter contre l’inflation, mais pas pour autant une condition suffisante. Autrement dit, il se peut que l’on soit contraint de flanquer par terre à la fois la croissance, l’emploi et les marchés d’actifs, sans pour autant régler son compte à cette satanée hausse des prix.

Mais restons positifs. Notre ministre de l’Économie actuel nous a quand même assurés en 2016 que son intelligence était un obstacle. Alors pourquoi craindre le pire ?

« Allez, viennent les jours heureux, et le goût du bonheur ».

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