Par Drieu Godefridi
Comment expliquer que Bruxelles, « capitale de l’Europe », soit l’une des régions les plus arriérées du monde, en termes de couverture 5G ? Pour un motif simple, factuel, vérifiable : l’irréductible hostilité idéologique que portent les écologistes, politiquement puissants à Bruxelles, à cette nouvelle itération de la technologie qui tisse le monde moderne.
L’illogisme de certains écologistes
Les motifs revendiqués de cette hostilité sont inexistants sur le plan factuel et tiennent principalement au principe de précaution, brandi en l’absence de toute étude scientifique probante. Un motif philosophique est évoqué : celui de « limite », c’est-à-dire l’idée que l’humanité est lancée dans une course éperdue au progrès à laquelle nous devrions sagement fixer des limites.
Comment expliquer que lorsque nombre de partis apparentés à la gauche en Europe se prononcent en faveur de l’énergie nucléaire — France, Pays-Bas, Finlande — tandis que la Commission européenne envisage de reconnaître au nucléaire la qualité d’énergie durable, les écologistes restent farouchement opposés au nucléaire, notamment en Allemagne et en Belgique ?
Cette opposition est d’autant plus frappante que le nucléaire est la seule source d’énergie tout à la fois permanente (non intermittente) et ne produit quasiment pas de CO2. La réduction des émissions de CO2 n’est-elle pas la grande affaire des écologistes ? Les écologistes n’ont-ils pas été jusqu’à exiger la subordination des libertés constitutionnelles à la réduction des émissions de CO2 ?
Dès qu’il s’agit du nucléaire, ces considérations passent à l’arrière-plan, pour laisser place à ce qui apparaît comme l’impératif catégorique de l’écologisme : la suppression de l’énergie nucléaire. Fût-ce au prix, comme en Belgique, d’une explosion des émissions de CO2 par le recours à l’énergie fossile. Cette même énergie fossile dont les écologistes taxent pourtant les partisans de fascisme carboniste et autres amabilités.
Quel est le motif rationnel et scientifique de cette volte-face ? Il n’y en a pas.
On évoque les déchets nucléaires. Mais les déchets nucléaires sont l’archétype du faux problème, minuscule résidu bientôt recyclable au sein même de la nouvelle génération de réacteurs nucléaires. Le vrai motif, comme sur la 5G, est d’ordre philosophique. Dans la pensée écologiste, le nucléaire s’apparente à une sorte de viol de Gaïa, cette figuration de l’environnement comme « Tout-vivant ». Surtout, le nucléaire apparaît comme la garantie, pour l’humanité, de poursuivre son développement par l’accès à une énergie virtuellement sans limite. On retrouve ce concept de limite, honni par les écologistes comme par une certaine tradition à la droite radicale du spectre politique ; citons le philosophe français contemporain Alain de Benoist.
La population dans le viseur de l’écologisme
Troisième illustration du caractère réactionnaire de l’écologisme comme idéologie politique : la démographie.
Dans la droite ligne des travaux de l’économiste britannique Thomas Malthus, issu de la droite radicale de son époque, les écologistes soutiennent que l’humanité est trop nombreuse, que cela n’est pas soutenable, qu’il faut donc la réduire drastiquement. Les plus extrêmes rêvent d’une humanité de quelques millions d’individus. Que faire des humains en excédent ? Cette question est rarement prise en charge par les penseurs écologistes. Citons l’auteur écologiste Paul Ehrlich, qui préconise dans son best-seller The Population Bomb la stérilisation massive et forcée des populations « qui se reproduisent comme des lapins » (sic), et le contrôle des naissances (avortement, un enfant par famille, sur autorisation administrative). Ces velléités de réduction drastique de l’humanité sont également très présentes dans les écrits de l’un des fondateurs de l’écologisme contemporain, le philosophe allemand Hans Jonas.
La détestation de l’Homme par l’écologisme
Quel est, en fin de compte, le dénominateur commun de ces postures politiques écologistes ? De n’être précisément pas des postures purement politiques et opportunistes, mais tout au contraire le reflet d’une philosophie politique cohérente, de nature réactionnaire. Cette philosophie écologiste réactionnaire partage les trois postulats de toute pensée authentiquement réactionnaire :
D’abord, l’idée que l’homme est le problème et la nature, la solution. Cette vision fondamentalement pessimiste de l’homme et de l’humanité, souvent décrite comme une sorte de virus proliférant « si on ne fait rien » et qui menace l’environnement, définit l’écologie politique.
Ensuite, l’idée que si l’homme est foncièrement mauvais, à domestiquer, la nature est foncièrement bonne, digne d’être célébrée. Nombre de penseurs écologistes idéalisent si bien la nature, littéralement « dés-humanisée », qu’ils en viennent à adhérer à une vision panthéiste et « divinisée » de ce que les écologistes allemands nomment l’Umwelt (environnement).
Enfin, la volonté de revenir à un stade antérieur du développement humain. Cette velléité de retour à la nature « pure », à la communauté débarrassée des scories du « modernisme », est consubstantielle à toute pensée réactionnaire. Elle est bien sûr impossible, vouée à l’échec en pratique, mais n’en constitue pas moins la trame, le substrat et comme l’humus de la philosophie écologiste.
Il n’y a rien de déshonorant à être réactionnaire. Toutefois, le débat public gagnerait en clarté et sincérité si les écologistes assumaient la nature véritable de leur philosophie politique.
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