Olivier Rancourt et Krystle Wittevrongel
Le thème de la relance économique post-COVID-19 est sur toutes les lèvres et il alimente sans cesse les débats. Selon certains, le gouvernement devrait taxer davantage les riches, comme s’il s’agissait d’un plan pour la croissance. Pour d’autres, c’est l’occasion de précipiter une transition écologique, ce qui poserait un risque imminent pour l’économie canadienne. Il existe toutefois une solution plus simple et moins risquée pour en arriver à nos fins: faciliter une fois pour toutes le commerce entre les provinces.
Accord de libre-échange canadien
Depuis des décennies, le Canada multiplie les ententes commerciales, notamment avec les États-Unis, les pays asiatiques ou encore l’Union européenne. Suivant cette tendance, il était logique que l’Accord de libre-échange canadien (ALEC) voie le jour en 2017 afin d’encourager le commerce entre les provinces. Après tout, le Canada lui-même est né en bonne partie de la nécessité de créer un marché interne nous protégeant du protectionnisme américain.
L’ALEC s’avérait nécessaire étant donné les nombreuses entraves au commerce érigées entre les différentes provinces. Statistique Canada estimait qu’en 2017, ces entraves représentaient l’équivalent d’un tarif douanier de 6,9%. Malheureusement, bien peu de provinces ont profité de cette occasion pour améliorer leurs pratiques. Certaines provinces, comme l’Alberta et le Manitoba, ont fait des efforts importants afin d’encourager le commerce interprovincial, mais la majorité des autres n’ont pas suivi le pas. Pire encore, la Colombie-Britannique a même rajouté des embûches au commerce interprovincial.
Qu’est-ce qu’une entrave au commerce? Il peut s’agir tout simplement de normes qui diffèrent d’une province à l’autre concernant, par exemple, les pneus pouvant être utilisés sur des camions de transport. En effet, certains pneus très performants qui réduisent la consommation d’essence ne sont pas permis dans l’ensemble des provinces, ce qui force les camionneurs à changer de pneus en cours de route. Cela peut sembler anodin, mais il n’en demeure pas moins que le prix des marchandises augmente.
Augmenter le PIB
Selon des études économiques poussées, il serait possible d’augmenter le PIB par habitant du Canada de 3,8% simplement en éliminant les barrières au commerce interprovincial. Cela est encore plus vrai pour les provinces maritimes. En effet, selon nos calculs, l’élimination des barrières commerciales contribuerait grandement à combler l’écart économique qui les sépare du reste du pays.
À titre d’exemple, le Nouveau-Brunswick verrait son PIB par habitant augmenter de 6%, Terre-Neuve et Labrador de 13%, et l’Île-du-Prince-Édouard de 16%.
En fait, si les entraves commerciales avaient été abolies en 2000, une province comme le Manitoba aurait rattrapé l’Ontario en 2013 en matière de PIB par habitant. Cela démontre à quel point il s’agit d’un outil puissant pour améliorer le sort de la population.
Parmi les provinces plus peuplées, c’est le Québec qui aurait le plus à gagner d’un partenariat économique mieux harmonisé. En effet, le PIB par habitant de la province serait susceptible d’effectuer un bond de 4,6% simplement en retirant des entraves au commerce. Cela peut sembler pour le moins ironique quand l’on considère que c’est le Québec qui pose le plus d’embûches au commerce interprovincial.
Les politiciens canadiens ont la possibilité de s’asseoir et de négocier une fois pour toutes un véritable accord de libre-échange qui respecte l’esprit de la Confédération canadienne et qui nous permettra de prospérer. Il s’agit d’une façon simple et peu coûteuse de stimuler notre économie, d’améliorer notre productivité et, en fin de compte, d’augmenter notre niveau de vie.
Olivier Rancourt est chercheur associé senior à l’IEDM, Krystle Wittevrongel, analyste en politiques publiques à l’IEDM. Ils sont les auteurs de Indice du leadership provincial en matière de commerce intérieur – Édition 2021 et signent ce texte à titre personnel.
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