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13 juillet, 2022

Inflation, dette publique : en finir avec l’inconscience

 Par Jacques Garello.

Comme tous les économistes classiques je n’ai cessé de condamner le quantitative easing mis en place par la FED (Banque Fédérale de Réserve) après la crise de 2008, elle-même provoquée par la pratique des subprimes, encouragements donnés par la législation fédérale à la multiplication des prêts immobiliers.

« L’inflation est partout et toujours d’origine monétaire » : cette formule de Friedman a l’aval tant des néo-quantitativistes de Chicago que des comportementalistes autrichiens, qui à la suite de Menger Mises et Hayek estiment que l’émission de monnaie sans contrepartie réelle et la pratique du mal-investissement finissent par des faillites généralisées.

 

Inflation par les coûts ? 

Aujourd’hui la pensée unique cherche à nous faire croire que l’inflation n’aurait pour seule origine que la guerre en Ukraine. On invoque, et c’est exact, les pénuries et les retards de toutes sortes nés du conflit et de ses incidences sur les échanges économiques avec la Russie. Du même coup, on en oublie la dimension monétaire de l’inflation, on ressort la vieille théorie de « l’inflation par les coûts ». Mais comment payer des coûts supplémentaires si on n’a pas d’argent pour les régler ?

En d’autres termes, les difficultés actuelles devraient modifier les comportements, et faire payer aux consommateurs le prix d’un marché déséquilibré par la chute de l’offre disponible. C’est d’ailleurs ce que l’on commence à faire : prévoir des économies d’énergie, attendre la livraison des automobiles. Mais pourquoi pas réduire les gaspillages de l’État providence, qui représentent au minimum un point de croissance du PIB français (c’est l’estimation d’Edmund Phelps par exemple) ?

Il y a donc un choix à faire, aujourd’hui comme toujours, entre la rigueur et l’inconscience. Or, l’émission sans limite de fausse monnaie (masse monétaire sans contrepartie réelle de production de biens et services marchands) conduit à l’inconscience.

 

Des décennies d’inconscience

Nous voici installés depuis des années dans l’inconscience. Elle a été admise, il faut le rappeler, par ladite FED, soucieuse de secourir le Trésor Américain, de plus en plus endetté. La FED a pu le faire parce que le dollar, même fausse monnaie, est accepté dans le monde entier, et aucune autre monnaie ne peut actuellement concurrencer le billet vert pour des raisons tant économiques (les détenteurs de réserves en dollars ne veulent pas déprécier leur patrimoine) que politiques (ne pas compromettre la puissance américaine, rempart contre la Chine et la Russie). Évidemment, la Banque centrale européenne n’a cessé de s’aligner sur la politique américaine, puisqu’elle a voulu elle aussi voler au secours des États de la zone euro endettés au-delà du remboursable.

Mais, progressivement, on a commencé à enregistrer un tassement de la croissance réelle, et bien avant la guerre en Ukraine l’alarme a été donnée : le financement des crédits à travers le système bancaire menait à des imprudences coupables. Restait évidemment le financement par le système boursier, mais il y a un lien inévitable entre banques et bourses : c’est le taux d’intérêt.

L’assouplissement monétaire permettait d’avoir des taux d’intérêt très faibles, voire même négatifs. Certains États, emprunteurs impénitents, ont cru pouvoir gonfler leur dette sans limite. Mais le freinage de la croissance réelle à la suite des erreurs de financement (et en général du financement public) a suscité une crainte légitime et, finalement, ce sont les Américains eux-mêmes qui ont décidé de revenir à une certaine rigueur. Ainsi les partisans du « quoi qu’il en coûte » ne peuvent plus dire qu’il n’en coûte rien parce que les taux assurent un crédit gratuit sur la longue période. Désormais les taux coûtent cher.

Aujourd’hui, quelle politique pourrait-elle éviter une inflation galopante dans les mois à venir ? Le choix est ramené en général à la hausse des impôts, l’accroissement de la dette et la diminution des dépenses publiques. Mais il en est un quatrième.

 

La hausse des impôts

Elle semble difficile dans un pays où les prélèvements obligatoires représentent 47 % du PIB, record des pays de l’OCDE. Mais cette politique a les faveurs de plusieurs politiciens et économistes de gauche car ils estiment possible de cibler des bases fiscales encore exploitables : faire payer les entreprises qui ont bénéficié de la conjoncture, et en particulier de la hausse des prix de l’énergie. Les dividendes seraient donc fortement taxés. De même seraient taxés les profits des GAFA qui échappent à la fiscalité française : il faut prévoir des taux d’imposition (européens ou mondiaux) pour ces sociétés qui pratiquent une optimisation fiscale jugée immorale.

Cette politique satisfait l’idéologie socialiste : faire payer les riches, prendre l’argent là où il est. Mais l’expérience et la logique économique démontrent que ce sont les pauvres qui sont les premiers et les plus frappés par cette politique, car le rejet de la rentabilité et de la capitalisation conduit au chômage massif, diminue l’investissement donc la production et diminue ainsi l’offre globale, entraînant ainsi une inflation à taux de plus en plus élevé.

 

L’accroissement de la dette

Elle semble tout aussi difficile dans un pays où elle a atteint 2800 milliards d’euros, soit 115 % du PIB. Certes, des pays comme l’Italie font plus mal, mais le service de la dette représente déjà une part importante du budget de l’État français (un poste à peu près équivalent à celui de l’Éducation nationale, et indexé sur l’inflation !).

Là encore les positions extrêmes simplifient la question : pourquoi régler la dette ? Encore faut-il savoir qui sont les porteurs des obligations émises par le Trésor français : ce sont des étrangers pour la moitié, mais peuvent-ils accepter cette spoliation, fût-ce dans quelques années ? Et qui sont les Français porteurs, en dehors des compagnies d’assurances et des banques ? Ces simples épargnants investisseurs seront-ils indemnisés ?

 

La diminution des dépenses

On en vient alors à la conclusion de l’affaire : faire des économies. Plusieurs études, comme celle d’Agnès Verdier Molinié, font le calcul de ce qui pourrait être rogné sur les différents budgets ministériels. Je ne dis pas que la diminution des dépenses n’est pas possible, je dis qu’elle ne peut être durable dans l’état actuel de nos institutions. Car l’expérience a été fait à plusieurs reprises, mais les échéances électorales ramènent toujours à la logique politique : les promesses doivent être faites.

Certes, la plupart ne sont pas tenues, mais il en demeure quelques-unes qui auront un commencement d’exécution, et à coup sûr quelques mois plus tard les dépenses publiques repartent à la hausse. Ce sont des réformes structurelles qui sont nécessaires ! Il faut réduire le périmètre de l’État, qu’il se dégage de ces pièges à milliards que sont l’Éducation nationale, la santé publique, les transports publics, la retraite par répartition, le logement dit social, etc.

 

La croissance des recettes publiques 

C’est une politique à laquelle on ne pense pas assez en France, pour deux raisons : l’indispensable retrait de l’État libère nombre d’énergies nouvelles, et les inégalités sociales sont payantes.

Que la privatisation ou la mise en concurrence d’un certain nombre de monopoles publics soit source de recettes est d’une évidence historiquement confirmée. Quand les activités sont menées par des personnes ou des entités responsables la gestion est meilleure, et le produit intérieur ne cesse de croître : la « matière fiscale » s’épaissit et la croissance économique apporte l’aisance budgétaire. Parallèlement le retrait de l’État s’accompagne nécessairement d’une disparition ou d’un assouplissement de la réglementation : un marché du travail assoupli, des normes moins nombreuses et mieux adaptées sont de nature à relancer l’esprit d’entreprise, la rémunération du travail, la rentabilité de l’investissement. La place est prête pour l’innovation et la compétitivité. Les vraies réformes libérales ne consistent pas à inventer des mesures nouvelles, mais à supprimer des mesures obsolètes et nuisibles.

Mais je vais sans doute choquer beaucoup de politiciens, et même beaucoup de mes lecteurs en soutenant que le progrès ne naît pas de l’égalité, mais de l’inégalité : beaucoup de gens cherchent à faire mieux et à avoir plus, et dans une économie de liberté cela n’est possible qu’en recherchant les moyens de mieux servir la communauté, c’est-à-dire d’offrir des biens et des services de qualité et de prix différents. Libérer cette recherche du succès et la prospérité sera là, étouffez-la et la stagnation s’installera.

Il y a une recette infaillible pour accroître les recettes fiscales : réduire ou même supprimer la progressivité de l’impôt sur les personnes physiques. Dans le monde entier, toutes les baisses de progressivitéont débouché sur une extraordinaire croissance des recettes fiscales. En effet les créateurs, les innovateurs, les bons serviteurs de la communauté ne calculent pas ce qu’ils doivent payer au percepteur, mais plus précisément et plus intelligemment ce qui leur reste dans les poches une fois qu’ils ont payé le percepteur. Travailler le vendredi pour payer le perpecteur n’intéresse personne : on prendra le week-end dès le jeudi soir.

Quel revenu net supplémentaire me rapporte le travail que je vais faire ? Tout le monde le constate, dans tous les domaines : la France est un pays où le travail intéresse de moins en moins de gens. Pourquoi chercher à changer de travail, d’avoir une qualification meilleure moyennant une formation, d’exercer une responsabilité nouvelle, quand le SMIC est garanti pour une durée de travail légalement fixée ? En son temps Gary Becker avait expliqué la relative stagnation européenne par l’existence de salaires minimum réellement élevés par rapport au salaire moyen.

Mais évidemment cette politique se heurte à l’égalitarisme ambiant, qui conduit à une surenchère née de la distribution de faux droits comme disait jacques Rueff. « À Bercy on ne croit pas à Laffer » m’a dit l’un de mes disciples devenu ministre des Finances. Évidemment, les hauts fonctionnaires français ne peuvent tenter chez nous ce qui a réussi partout et toujours ailleurs.

Pour l’instant, la pensée unique continue à recommander servilement les idées keynésiennes et socialistes qui démontreraient que seule la dépense enrichit. La pensée libérale souhaite que vienne le temps où seront reconnues les valeurs de l’effort, du mérite, de la compréhension et du service.

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