Par Olivier Maurice.
Il a fallu plusieurs semaines interminables de tractations et de discussions pour construire l’architecture du gouvernement Borne. C’est enfin chose faite.
Il a surtout fallu plusieurs semaines pour réussir à faire la part des choses entre la réalité que représente l’exercice du pouvoir et les gages données par Emmanuel Macron pendant la campagne électorale où après avoir travaillé pendant le premier tour à convaincre les électeurs de droite qu’il était le meilleur candidat de droite, il avait ensuite œuvré pendant le second tour à convaincre les électeurs de gauche qu’il était le meilleur candidat de gauche.
L’urgence de plus en plus urgente
Le Président nouvellement élu devait donc construire un gouvernement du « en même temps » : en même temps, fossiliser les grognards aux postes opérationnels : Bruno Le Maire à Bercy, Gérald Darmanin à Beauvau, Éric Dupond-Moretti place Vendôme… et en même temps, remplacer tous les petits jeunes de la startup nation déjà oubliée par des petits nouveaux en charge de « bâtir un avenir en commun », Emmanuel Macron ayant sans aucune hésitation repris à son compte le slogan de campagne de Jean-Luc Mélenchon, histoire de bien faire comprendre qu’il était de gauche, même si en même temps, il était de droite.
Pour donner des gages crédibles de son nouvel engagement écolo, le nouveau Premier ministre s’est donc vu immédiatement flanqué de trois Zorro du développement durable : Amélie de Montchalin, nommée ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, nommée elle aussi ministre de la Transition écologique et Antoine Pellion, nommé non pas troisième ministre de la Transition écologique, mais secrétaire général à la Planification écologique.
Incontournable écologie
Le message ne peut être plus clair. Les symboles sont en place, affichés et bien évidents, mais qu’en est-il derrière la communication et les manœuvres politiciennes ?
Ce que l’on appelle communément et improprement l’écologie est un sujet politique très porteur. 80 % des Français se disent inquiets vis-à-vis de l’environnement et du changement climatique. Mais comment ne pas l’être quand il ne se passe pas une seule journée sans qu’une information anxiogène ou une injonction culpabilisatrice et moralisatrice ne soit largement diffusée ?
On a bien vu avec la crise sanitaire, les sujets de santé mobilisent largement l’opinion en prenant des proportions qui peuvent sembler rétrospectivement bien mal calibrées. La confusion entre l’inquiétude et la panique totale semble bien être quelque chose que les médias et les politiques aiment à passer sous silence dans une confusion qu’ils n’ont aucun scrupule à instrumentaliser.
Les innombrables messages sur l’urgence climatique, les divers comptes à rebours, les événements dramatiques mis systématiquement sur le compte de la catastrophe à venir viennent quotidiennement dramatiser et coincer les opinions dans un espace très restreint. Il est devenu quasiment impossible de remettre en question de façon ouverte cette fameuse urgence climatique sous peine d’être aussitôt affublé de tous les vices moraux possibles et imaginables : égoïsme, complotisme, obscurantisme, etc.
Un décalage gigantesque
Il faut cependant remettre les choses à leur place : si 80 % des Français sont inquiets, c’est en grande partie parce qu’ils trouvent que les carottes du supermarché n’ont pas de goût. Disons-le franchement : l’urgence écologique de la grande majorité des Français se limite aux petits changements du quotidien liés à la distance grandissante avec l’environnement naturel. Ça ne va pas plus loin.
S’être détaché de la violence de la Nature (ce que nos ancêtre admettait parfaitement parce qu’ils ne pouvaient pas faire autrement) a conduit à idéaliser celle-ci et à créer toute une mythologie reposant sur des craintes irraisonnées et sur des mythes romantiques.
Cette ombre projetée par la Nature violente a pris forme sous le présage d’un inévitable retour de bâton, d’une punition infligée par les éléments déchainés : le fameux changement climatique.
Laissons de côté le débat sur l’exactitude ou l’inexactitude des prévisions et des constatations : 80 % des Français, c’est avant tout une énorme opportunité. Une énorme opportunité pour s’en mettre plein les poches ou pour assouvir ses fantasmes de pouvoir et de gloire.
Normal que tout ce qui s’apparente de près ou de loin au pouvoir veuille mettre le grapin dessus.
Le bio, le vert, le responsable, le conscient, le solidaire sont, qu’on le veuille ou pas, les marqueurs de notre époque, tout comme la moustache et le chapeau melon étaient ceux du début du siècle précédent. Écologique (sous une forme ou sous une autre) est devenu symbole de qualité, l’unité de mesure universelle.
La méthode
Deux ministres et un secrétaire général vont donc faire des ronds dans l’eau pendant toute la durée de leur mandat. À part dépenser l’argent du contribuable, donner des leçons, pondre des règlements abscons et prendre des décisions arbitraires et embêter les Français, ils ne vont absolument rien faire.
Ils ne vont rien faire pour la double raison qu’il n’y a absolument rien à faire et qu’il ne faut absolument rien faire !
L’écologie, c’est à la mode, c’est partout, tout le monde en parle, mais ça n’a absolument aucune réalité. Il est tout simplement impossible de recréer les conditions de vie et la connexion à la nature qui subsistaient sous des formes endémiques il y a encore une cinquantaine d’années et qui ont maintenant quasiment totalement disparu. Non seulement personne n’en voudrait, mais l’environnement a tellement changé que cela n’est simplement plus possible.
Le mystère naturel avec ses monstres réels et imaginaire, qui a hanté les forêts profondes et les récits au coin du feu depuis le début de l’humanité a définitivement disparu. On sait aujourd’hui que la Terre est ronde. On a cherché partout les monstres et on ne les a trouvés nulle part. On connaît notre planète jusque dans ses moindres recoins. Tout a été exploré, gravi, découvert, vaincu.
La planification écologique est par la force des choses irrémédiablement vouée à l’échec. Il est totalement impossible de remonter le temps. Même si les légumes anciens, la culture vivrière, les fromages au lait cru et les moulins à vent sont de riches patrimoines, il faut les considérer comme ce qu’ils sont : de fragiles souvenirs du passé qu’il faut protéger et conserver.
Le retour indispensable à l’économie
Pour revenir aux défis actuels : pollution, changements et événements météorologiques, alimentation, santé… ce qu’il faut, ce sont des solutions économiquement pérennes. Nulle urgence ici : nous sommes condamnés à vivre sur cette planète encore un sacré bon nombre d’années, de millénaires sans doute même.
Ce qu’il nous faut, le grand défi des prochains siècles, ce n’est nullement l’utilisation de la force armée et de la planification venant d’une autorité toute-puissante et bienveillante, mais la création d’une réelle économie qui produise les solutions techniques et commerciales capables d’exploiter toutes ces fantastiques opportunités pour en produire de la richesse, pas pour y engloutir des océans d’impôts, de taxes, de déficits budgétaires et de dette.
Le calcul électoraliste d’Emmanuel Macron nous fait encore une fois rater le coche. Là où il y a pour la France et pour les Français une gigantesque chance de création de richesse, il brise tout élan de liberté et cherche au contraire à réguler, à diriger, à gérer, à planifier.
Pour prendre un exemple tout simple : ce qu’il nous faut, c’est un génial inventeur qui transforme les déchets nucléaires en or (en quelque chose ayant de la valeur), pas des lois et des impôts pour faire diminuer notre consommation électrique, nous faire passer les hivers dans le froid et tomber malades, fermer des centrales, mettre des employés au chômage et dépeupler toute une région.
Parce qu’avec la planification écologique nous en sommes là : payer des impôts pour détruire des emplois, retomber dans la soumission aux aléas naturels et vivre dans la peur et la culpabilité. La double peine.
Pour terminer, et pour ceux qui font le pari qu’il y a effectivement urgence, qu’ils ne se bercent pas d’illusions : confier un objectif à l’État est bien le meilleur moyen d’être sûr et certain que cet objectif ne sera jamais atteint.
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