Par Michel Gay.
La future Loi de Programmation Énergie Climat (LPEC) prévue
pour 2024, et actuellement
en concertation publique jusqu’au 15 février 2022, corrigera-t-elle
les erreurs du passé ? La précédente
Loi de programmation sur l’énergie (PPE) avait malheureusement misé
sur les ruineuses énergies renouvelables aux productions fatales, voire
intermittentes (EnRI), comme l’éolien et le solaire.
Intérêt des énergies renouvelables ?
La production massive et bon marché d’électricité décarbonée
est un enjeu structurant et vital pour l’économie.
Quel est l’intérêt d’insérer à tout prix (coûtant aux
contribuables des dizaines
de milliards d’euros) des EnRI dans un système électrique qui n’en
a nullement besoin et qui, pire encore, le détériore ?
Selon
l’association « Défense du Patrimoine Nucléaire et du
Climat » (PNC-France), le gouvernement doit dès maintenant proposer le
cadre d’une politique réaliste pour orienter la future LPEC en cours
d’élaboration. La nouvelle loi en 2024 arrivera trop tard pour corriger les
erreurs du passé.
Une stratégie inefficace et ruineuse
La loi de transition énergétique pour la croissance verte
(LTECV), la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), et la Programmation
pluriannuelle de l’énergie (PPE) se sont acharnées à vouloir substituer des
énergies renouvelables au nucléaire pour diminuer les émissions de gaz à effet
de serre (GES) et la consommation d’énergie.
Environ 400 milliards d’euros environ sur 10 ans et 50
milliards par an actuellement sont dépensés pour atteindre ces objectifs.
Mais la consommation d’énergie finale de la France est
restée quasi stable depuis 2015 (la baisse sur 5 ans n’a été que de 0,2 % par
an), et la baisse des émissions de CO2 a été insignifiante (0,7 % par an,
malgré des météos favorables).
Ce fiasco économique résulte du choix délibéré de réduire la
contribution de la source d’énergie figurant parmi les plus décarbonées, le
nucléaire.
L’effort financier a été reporté sur les énergies
renouvelables éoliennes et solaires, sans intérêt notable pour le climat. Ce
choix délirant a conduit à un prix élevé de l’énergie et à une réduction des
consommations imposée par le prix.
De plus, l’acceptabilité de la révolution des comportements
qu’implique cette ruineuse transition énergétique reste à démontrer.
La prochaine politique énergétique doit être profondément
modifiée en développant des moyens de productions robustes d’électricité
décarbonée qui se substituera le plus possible aux énergies fossiles dans tous
les secteurs.
Électricité : une stratégie nationale à préciser en urgence
En France, la production d’électricité est déjà quasiment
décarbonée. Elle représente moins de 4% de nos émissions de CO2 (17 MtCO2e en
2020, source RTE).
L’objectif prioritaire du gouvernement (LTECV, SNBC et PPE)
n’est pas le climat mais une diminution de la part du nucléaire voire, pour
certains membres du gouvernement, sa disparition, quel qu’en soit le coût et
les conséquences sur la pérennité de notre approvisionnement.
La robustesse de notre approvisionnement en électricité est
de plus en plus en danger, surtout si la réduction programmée de 20 % des
moyens pilotables d’ici 2035, et notamment du nucléaire, est effectivement mise
en œuvre.
L’analyse de la
situation en Allemagne contrainte à des investissements massifs pour
doubler sa puissance installée dans l’éolien et le solaire pour une
consommation et des émissions de CO2 stables montre l’échec de ce développement
et ce qu’il ne faut pas faire.
La France se retrouvera dans la même situation si elle
persiste à détruire son parc nucléaire.
Toutefois, contrairement à la France, l’Allemagne a conservé
une puissance pilotable quasi inchangée, assise principalement sur les combustibles
fossiles gaz et charbon, soit 78 GW pour un appel de puissance maximal de 85
GW. Et son programme de fin du nucléaire et du charbon sera compensé par de
nouvelles centrales électriques à gaz, ce que la France s’interdit.
Des décisions urgentes en 2022 avant la LPEC
Sans attendre la future LPEC en 2024, le gouvernement doit
exprimer clairement ses orientations. Il doit entériner avec le parlement, en
urgence, l’abandon des objectifs d’arrêt de 4 réacteurs entre 2026 et 2030, de
8 réacteurs entre 2031 et 2035, et ne plus limiter à 50 % la contribution du
nucléaire en 2035.
Ce serait un contresens climatique, économique et
environnemental de poursuivre cette politique suicidaire.
L’objectif européen de réduction de 55 % des émissions en
2030 par rapport à 1990 est déjà hors de portée. L’adoption par la France de
cet objectif serait incohérente compte tenu de ses performances climatiques
actuelles par rapport à ses voisins « charbonniers et gaziers »,
grâce à son électricité nucléaire.
Le niveau d’autofinancement d’EDF doit être restauré :
les 100 TWh (ARENH) que l’entreprise est contrainte de céder à ses concurrents,
pour la plupart de simples négociants qui n’apportent pas de réelle valeur
ajoutée, doivent lui être réattribués en 2022.
Le traité européen attribue aux États la responsabilité de
leurs politiques énergétiques. C’est le principe de subsidiarité, aujourd’hui
bafoué en Europe par le biais d’une obligation de concurrence dévoyée
(objectifs techniques imposés) et inéquitable (un secteur concurrentiel
confronté à un autre largement subventionné).
Chaque État européen est donc libre de définir ses choix et
sa technologie mais il doit aussi normalement en supporter les conséquences
néfastes, comme l’Allemagne.
En revanche, que les prix de l’électricité s’envolent en
France avec ceux du gaz en Europe, et notamment en Allemagne, est anormal. Le
choix du nucléaire fait par la France lui assure un coût de production stable,
et les Français n’ont pas à supporter les conséquences des erreurs stratégiques
et politiques de leurs voisins !
Pour un mix électrique robuste
En 2019, la production d’électricité nucléaire ne
contribuait qu’à 17,4 % de la consommation d’énergie finale en France (qui
était de 1792 TWh) dominée à près de 70 % (1215 TWh) par les énergies fossiles.
Or il faudra remplacer la quasi-totalité de ces dernières
par une électricité décarbonée.
Un plan réaliste de rétablissement de notre capacité
pilotable doit être proposé avec un critère de sécurité d’alimentation couvrant
des situations de défaillances prolongées de la production d’électricité
intermittente sur plusieurs semaines.
Il doit :
être cohérent avec les croissances attendues de notre
consommation et des pics d’appels de puissance,
prendre en compte l’effondrement des capacités pilotables en Europe avec les arrêts programmés de centrales nucléaires et de centrales à charbon, et maintenir une régularité d’approvisionnement correspondant en permanence au besoin.
La période 2022/2035 sera particulièrement critique.
Ce rétablissement ne sera possible qu’en prolongeant la
totalité du parc nucléaire actuel mais aussi, malgré l’interdiction affichée,
en engageant de nouvelles centrales à gaz « de pointe » dans l’attente
du nouveau nucléaire.
Le coût de la tonne de CO2 évitée doit être évalué pour
chacun des scénarios afin de comparer l’efficacité des investissements pour le
climat (rapport
Quinet sur la valeur tutélaire du carbone).
Pour ne pas induire en erreur sur la réalité du prix global,
une comparaison équilibrée des coûts de production des diverses filières doit
inclure toutes les coûteuses externalités des EnRI : besoin de stockages,
renforcement du réseau électrique, centrale à gaz d’appoint, …
Dès 2022, une stratégie de prolongation du parc actuel à 60
ans (et même au-delà pour une partie) doit être menée (au lieu de 50 ans
actuellement) compatible avec un étalement des mises à l’arrêt et de l’arrivée
des nouveaux réacteurs EPR.
Le gain en CO2 d’une telle prolongation sera considérable (4
années des émissions totales françaises).
Planifier l’augmentation progressive de la capacité de
construction des nouveaux réacteurs (EPR2) jusqu’à 3 unités par an pour
accompagner la décarbonation de l’économie. Pour mémoire cette capacité a
atteint jusqu’à 6 unités par an au cours des années 1980 dans le
programme Messmer.
Les travaux sur les réacteurs surgénérateurs de quatrième
génération doivent être réactivés et le gisement d’uranium appauvri et de
retraitement (qui leur est destiné) stocké en France doit être qualifié de
« réserve
stratégique nationale ».
Décarbonation des transports et bâtiments
La décarbonation au meilleur coût doit guider la future
LPEC.
Or, le parc électrique et l’industrie ne pourront pas
contribuer à des réductions notables d’émissions de gaz à effet de serre si le
pays doit se réindustrialiser.
En revanche, cette décarbonation doit viser prioritairement
les bâtiments (principalement grâce à l’électricité décarbonée pour le
chauffage) et les transports (électricité, biocarburants, biogaz), ainsi qu’une
réduction des consommations avec des objectifs raisonnables d’efficacité
énergétique fondés sur un coût optimal de la tonne de CO2 « évitée ».
Et ce ne sont pas les ruineuses énergies renouvelables
bientôt vouées
aux gémonies (qu’elles aillent au diable) qui permettront d’atteindre
ces objectifs, mais
principalement l’énergie nucléaire.
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