OPINION : c’est le libéralisme qui impose à la démocratie d’être juste et bonne, pas l’inverse.
Par Olivier Maurice.
Le terme démocratie libérale est devenu tellement usité, tellement galvaudé et mis à toutes les sauces qu’il est plus que facile de confondre les deux termes : démocratie et libéralisme. Comme si le libéralisme impliquait inévitablement un régime démocratique et vice-versa.
La confusion est suffisamment entretenue par les médias et la classe politique, au point qu’aux États-Unis, les deux mots sont devenus quasiment synonymes et que l’on nomme communément liberals les membres ou sympathisants du parti démocrate.
Ce serait accepter un sophisme qui en fin de compte arrange beaucoup de monde, à commencer par les politiciens qui ont vite fait de se draper dans une vive aura de défense des libertés.
LE MAÎTRE ET LE SUJET
Mais ne nous trompons pas, la démocratie n’est rien d’autre qu’un modèle de régime politique qui institutionalise des règles de décision au sein d’une communauté : règles de majorité, de représentativité, règles fixant l’étendue et la durée, modalités de décisions, etc.
Croire qu’un régime quel qu’il soit puisse avoir une finalité autre que celle d’exercer et de protéger sa propre souveraineté serait une énorme erreur.
Tout régime politique est fait pour régner en maître sur la société, et la démocratie n’y échappe pas.
La démocratie définit simplement quelles sont les modalités de personnalisation du pouvoir et accessoirement, elle définit les éléments de celui-ci, et avec eux la forme qu’il prendra : démocratie directe, représentative, centralisée, décentralisée, etc.
Même si en démocratie ce sont les citoyens qui choisissent qui seront les maîtres et les règles qui les gouvernent, ceux-ci n’en restent pas moins des maîtres et des règles, tout élus et choisis qu’ils soient.
Le pouvoir reste le pouvoir : avoir le dernier mot quand il faut prendre une décision et s’imposer par la force s’il le faut.
RESTREINDRE L’ÉTENDUE DU POUVOIR
Cette vision est diamétralement opposée aux fondements du libéralisme, qui loin de définir quel pouvoir serait le plus à même de diriger les citoyens, prétend contraindre le pouvoir à respecter le droit et la morale. C’est d’ailleurs pour cette raison même que le libéralisme est autant décrié par ses opposants.
La liberté n’est pas la définition du pouvoir, mais la restriction de celui-ci.
L’un des premiers, sinon le premier texte libéral, la Lettre sur la tolérance de John Locke, explique ainsi que les modalités religieuses doivent rester en dehors du champ d’autorité du souverain.
L’un des premiers, sinon le premier acte juridique libéral, la magna carta, établit quant à lui que la justice civile n’a pas les pleins pouvoirs.
Le propre du libéralisme est exactement là. Il s’agit de restreindre le champ du maître et des lois et veiller à ce que ceux-ci respectent un certain nombres de principes :
Un principe moral
L’exercice du pouvoir doit être en tout temps consenti et peut être remis en cause à tout instant.
Un principe utilitariste
Le pouvoir n’est désirable que lorsqu’il est capable de prouver sa plus-value, ce qui d’ailleurs se révèle très difficile à établir en dehors des activités canalisant la violence.
Un principe juridique
C’est avant tout au pouvoir de suivre des normes, des lois, des obligations et des interdictions. Et non seulement des lois qui doivent être écrites pour en assurer la pérennité, mais surtout qui doivent être conformes à la morale et à la justice, à ce que les libéraux appellent le droit naturel.
Ce n’est pas au pouvoir d’établir ou de définir les droits naturels. Ceci est totalement impossible et sans aucun sens, le droit naturel ne dépendant pas de lui mais de la nature même de l’être humain en tant qu’individu.
C’est au pouvoir de respecter le droit naturel, de respecter les droits fondamentaux des individus, leurs aspirations légitimes et leur dignité d’êtres humains.
Tout pouvoir qui contreviendrait au respect de ce droit serait par nature même illégitime.
DÉMOCRATIE PEUT-ÊTRE, LIBÉRALE OBLIGATOIREMENT
Le libéralisme va jusqu’au point de s’interroger sur la nécessité de l’existence même du pouvoir et sur la possibilité de le remplacer dès que possible par d’autres composants sociaux : le commerce, le partage d’informations, l’autonomie des citoyens, etc.
C’est le libéralisme qui impose à la démocratie d’être juste et bonne, pas l’inverse. De la même façon que c’est le libéralisme qui exige que tout pouvoir soit avant tout respectueux de la nature humaine.
Ne nous y trompons pas, dans une période qui se trouble de plus en plus, au fur et à mesure nous sont imposées davantage de règles et des contraintes et ce, non pas au nom du droit et de la morale, mais au nom d’une formule mathématique détournée pour des intérêts partisans, formule qui fixerait un fois pour toutes les règles de désignation du pouvoir selon un pseudo contrat social que personne n’a jamais signé.
Ne nous y trompons pas et surtout soyons vigilants : veillons à ce que l’État reste à sa place. Ou plutôt d’ailleurs qu’il y retourne le plus rapidement possible, parce que cela fait longtemps que nos démocraties libérales sont de plus en plus des organes de manipulation et d’exonération du pouvoir et de moins en moins libérales.
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