Selon une étude de la fédération canadienne des entreprises indépendantes (FCEI), si on tient compte des salaires payés dans les entreprises de moins de 200 employés, l’avantage des employés de l’État dépasserait 30 %. De plus, si l'on ajoute au secteur privé les 542 000 travailleurs autonomes, il est certain que cela creuserait davantage le gouffre en faveur des salariés de l’État.
Alors, pourquoi les dirigeants syndicaux prétendent-ils qu’il n’est plus possible d’embaucher des fonctionnaires compétents?
Depuis quelques années déjà, les employés qui intègrent le marché du travail appartiennent à la génération Y. Selon Wikipédia, le terme « génération Y » désigne les personnes nées entre la fin des années 1970 et le milieu des années 1990. Il tire son nom de la génération précédente, nommée génération X.
Un document du regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ) définit cette génération comme suit :
De par ces caractéristiques, cette génération d’employés apporte dans l’entreprise le goût de l’innovation et de la créativité ainsi que l’aversion pour les pertes de temps. Ce qui se traduit par la présence sur le marché du travail d’une main-d’oeuvre particulièrement productive.
Cette main-d’oeuvre est habituée aux échanges d’idées et à l’accomplissement de tâches multiples. Elle s’intègre facilement dans des équipes de travail temporaire rassemblant des employés aux compétences diverses en vue de répondre à des besoins ponctuels. Pour l’entreprise, cela sous-entend une organisation du travail plus flexible, qui facilite le transfert de connaissances intergénérationnelles.
Puisque cette génération tient plus à l’élargissement de ses responsabilités et au développement de ses compétences qu’aux promotions, ces caractéristiques avantagent les PME ayant peu de paliers hiérarchiques.
Il est facile pour les personnes de cette génération d’assimiler et d’utiliser les nouvelles technologies. Leur affinité avec l’univers virtuel et la communication instantanée en fait des chercheurs actifs de nouvelles connaissances.
En résumé, la génération Y valorise la créativité, l’innovation, la flexibilité, les responsabilités, l'épanouissement personnel, etc.
Dans un monopole d’État, la bureaucratie, tel que nous pouvons le constater dans le livre de Jean Laliberté, Les fonctionnaires, favorise le conformisme, les traditions, la déresponsabilisation des individus, l’inaction, etc.
De plus, les conventions collectives favorisent le nivellement par le bas en imposant la primauté de l’ancienneté, la rigidité des structures, l’inefficacité, etc.
L’environnement de travail d’un monopole d’État est aux antipodes des valeurs de la génération Y. Il n’est donc pas surprenant que les meilleurs éléments de la génération Y fuient la fonction publique.
N’en déplaise aux syndicats, cela n’a rien à voir avec les conditions monétaires des employés de l’État.
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Front commun vs Bien commun
30 novembre 2009, (Pierre Duhamel)
Le principe fondateur du front commun intersyndical, c’est que toute hausse des salaires des employés de l’État se traduit par de meilleurs services pour la population. Le front commun incarnerait à lui seul le bien commun et mériterait notre appui inconditionnel contre le gouvernement, associé à une partie patronale comme les autres. C’est de la foutaise.
D’abord, une hausse appréciable de la masse salariale de l’État – 55 % de ses dépenses - pourrait impliquer que le gouvernement embauche moins, achète moins et investit moins. L’usager pourrait ne pas y voir son avantage. Surtout, ce mythe fait comme si les bénéficiaires des services n’étaient pas ceux qui les paient à la sueur de leur front. Les contribuables québécois sont à bout de souffle et l’idée de voir leurs comptes de taxes et leurs tarifs augmentés davantage pour payer les salaires des syndiqués de l’État ne leur sourient pas nécessairement.
On me répondra que les employés du gouvernement ne sont pas si bien payés. Le front commun s’est réjoui de voir qu’une étude de l’Institut de la statistique du Québec démontre que leurs salaires étaient moindres que ceux des autres travailleurs québécois. Cette étude montre exactement le contraire.
Une fois qu’on a tenu compte du régime de retraite et des congés, la rémunération des employés de l’État est supérieure (+3,6%) à la moyenne du secteur privé. Il ne faut pas s’en étonner : les employés du public travaillent 90 minutes par semaine (deux semaines par année) de moins que ceux du privé et ils sont couverts par un régime de retraite alors que c’est la minorité (25 %) au privé qui peut compter sur un tel régime. Sans compter que leur emploi est quasiment à l’abri de la conjoncture économique.
Les employés de l’État sont effectivement moins favorisés que ceux des villes, des sociétés d’État et du gouvernement fédéral. Je trouve que c’est un véritable scandale de constater que les villes et les sociétés d’État – créatures du gouvernement – paient leurs employés 25 % et 21 % plus chers respectivement. Je ne croyais vraiment pas que nos villes étaient si riches…
Que faut-il offrir aux employés de l’État ? Le gouvernement ne parle pas de gel salarial, avec une hausse moyenne de 1,4 % par année sur cinq ans. C’est beaucoup pour les contribuables du Québec. En 2010, le gouvernement prévoit une croissance de l’économie – et de ses revenus autonomes - de 1,7 % et les prévisions économiques sont très modestes pour les années à venir. De plus, le déficit sera de l’ordre de 5 milliards de dollars par an d’ici 2013-2014, malgré les mesures annoncées par le gouvernement pour renflouer ses coffres. Je ne vois pas d’espace pour une hausse plus considérable.
Il faudra un jour en finir avec le psychodrame des négociations dans le secteur public. C’est la guerre, un peu comme dans les temps anciens où les armées s’affrontaient face à face et à découvert au beau milieu d’une plaine. Un tel combat fait toujours des victimes et ne prête à aucun accommodement.
Par exemple, il me semble qu’on pourrait faire un effort pour améliorer les conditions de travail des infirmières. Comment avantager un groupe quand il faut négocier pour tout le monde ? Le gouvernement semble vouloir intégrer cette dimension dans les pourparlers à venir, mais le principe du front commun syndical, c’est aussi le mur à mur, indépendamment des conditions spécifiques.
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