Les révolutionnaires ne désarment jamais parce qu’ils vivent de leurs combats et de leurs fantasmes. Quand ils ne peuvent pas se porter sur le terrain politique, ils investissent d’autres champs d’action. Depuis le marxiste italien Gramsci, ils ont compris que la conquête du pouvoir exigeait d’y préparer les esprits, notamment au travers d’une nouvelle emprise culturelle. Et c’est sans doute ce qui anime la fureur dévastatrice de toutes cultures qui sévit à travers le monde.
Les mouvements de type BLM veulent renverser notre culture, nos valeurs
Le déboulonnage des statues n’en est qu’un épisode qui démontre leur ignorance. Devant l’Assemblée nationale française, ils ont recouvert la statue de Colbert de l’inscription « Négrophobie d’Etat » parce qu’il avait édicté le Code noir. Ils n’ont sans doute jamais lu celui-ci qui, certes, entérine l’existence de l’esclavage, ce qui nous paraît évidemment insupportable, mais qui en même temps établit les droits des esclaves à l’égard de leurs maîtres : d’être convenablement nourris et habillés, de ne pas travailler le dimanche, de ne pas être mariés de force et d’être protégés du viol des maîtres… En réalité Colbert, dont la politique était par ailleurs critiquable, était dans l’esprit de son temps, encore esclavagiste, mais plutôt protecteur des esclaves.
Mais, incultes, les mouvements de type « black lives matter » - (bien sûr que les vies des noirs importent, …autant que celles des jaunes, des blancs…) - ne veulent pas renverser seulement des statues, mais notre culture, nos références, nos valeurs. C’est à cet effet qu’ils s’en prennent à tout ce qui donne des racines à notre histoire, à notre éducation, à nos convictions. Parce que, comme les plantes, des idées sans racines meurent sans tarder. Ils veulent effacer des traditions ; en essayant d’imposer l’écriture inclusive, ils feront de notre langue une écriture archaïque et bientôt illisible sinon par des épigraphes ! Ils veulent supprimer les distinctions de genre, de sexe, de famille, de rémunération, de capacité… Ils veulent remettre le monde à zéro, tous au même niveau d’inculture pour favoriser une égalité dans la pauvreté mentale et intellectuelle, plus facile à modeler sans doute par ces nouveaux idéologues qui voudraient que le monde entier devienne un vaste camp de rééducation. L’objectif n’est pas toujours avoué, il n’est pas explicite pour tous ceux qui, sous l’impulsion des meneurs, marchent au pas, au nom des bons sentiments et de l’émotion. Mais il est réel.
A ce titre, se sont constitués les mouvements étudiants qui prennent le pouvoir de fait dans les universités américaines et parfois françaises désormais. Ils décident du bannissement de certains enseignants ou de la teneur de leurs cours. Les milieux cinématographiques se sont pliés à la mode en adoptant volontiers la clause d’ « inclusion rider » qui doit permettre aux acteurs d’un film de s’assurer que le casting d’une production est représentatif de l’ensemble de la population, avec suffisamment de femmes et de minorités ethniques ou de genre. L’Académie des Oscars encourage désormais les productions à la respecter et à partir de 2024, les producteurs américains devront impérativement s’y soumettre s’ils veulent concourir dans la catégorie principale, à savoir celle du meilleur film !
En France, le directeur de l’Opéra de Paris, Alexandre Neef, a indiqué que « certaines œuvres vont sans doute disparaitre du répertoire » pour éviter toute référence à des attitudes racistes. Après que l’on a supprimé le mot nègre des Dix Petits Nègres d’Agatha Christie, "la danse des négrillons" dans la Bayadère de Noureev est renommée "la danse des enfants" par Benjamin Millepied, ex-directeur du Ballet…
La « cancel culture » est une anti-culture
Des institutions utilisent l’argent public pour promouvoir l’écriture inclusive, comme ce guide pratique du Haut Conseil à l’égalité « pour une communication sans stéréotype de sexe », vendu par la très publique Documentation française au prix de 3,50€. Divers organismes publics ont décidé d’entamer la démarche recommandée : le CESE, le Centre national de la Fonction publique territoriale, l’ENA, le ministère de la Justice…. Curieusement, ne figure pas encore sur la liste Sciences Po dont les dirigeants ou ex-dirigeants, comme Frédéric Mion et Olivier Duhamel, adorent donner des leçons.
Cette cancel culture est en fait moins qu’une contre-culture, elle est une anti-culture. Car la culture consiste à sauvegarder la beauté dans sa diversité et dans son contexte et à la rechercher. Elle permet de faire évoluer les perceptions non pas en gommant celles qui furent adoptées par le passé mais en les dépassant. L’esclavage est inhumain, inadmissible, mais c’est précisément notre culture et le christianisme qui ont permis que progressivement il soit éradiqué alors qu’il était communément pratiqué par la Terre entière. Il existe d’ailleurs encore en Afrique et au Moyen Orient, mais on entend peu la contestation à cet égard !
Certes, on peut comprendre que certaines statues déplaisent, voire ravivent des plaies. Celles de Staline, Lénine et consorts ont été souvent démolies dans les pays du goulag où elles pullulaient. Mais il ne faut pas confondre les auteurs d’actes de génocides organisés comme tels et les dirigeants qui ont participé aux erreurs et confusions de leur temps, aussi graves soient-elles. Sinon, il faudrait retirer toutes les statues des hommes de pouvoir tant le pouvoir est fait de choix qui sont à l’unisson de leur temps et parfois coupables. Il faut du discernement pour vivre en société. Cela ne veut pas dire qu’il faut taire les critiques, mais le débat et la mise en scène de l’histoire excluent d’en brûler les archives. On ne fait pas avancer le monde en niant ce qu’il a été, mais en le faisant progresser. Une civilisation grandit en montant sur les épaules des géants qui nous ont précédés, pas en leur faisant rendre gorge ou en en dépeçant les dépouilles.
Il ne faut pas accepter leurs diktats !
Et par ailleurs, ne nous y trompons pas : ceux qui veulent imposer des quotas de toutes les couleurs et de tous les genres dans toutes les manifestions de la vie sociale ne militent pas pour leur liberté, qui est respectable, mais pour faire de notre société un moule unique adapté à leurs propres choix. Identitaires, ils ne se battent que pour que leur identité, soit un nouveau modèle unidimensionnel. Ils n’avancent même plus masqués parce que nous nous plions sans cesse à leurs désirs destructeurs et sauvages. Honteux, nous acceptons leurs accusations et leurs diktats, alors que nous n’avons pas à avoir honte de ce que nos ancêtres ont fait. Il faut nous battre au contraire pour refuser cet amalgame permanent d’opprobre et de haine à l’encontre de ce que nous sommes. N’allons plus à l’Opéra qui sacrifie notre passé, refusons de voir les films qui sanctifient l’ « inclusion rider », n’achetons pas les produits « dégenrés », que les enseignants continuent de dire l’histoire plutôt que de la tronquer pour plaire à cette minorité insatiable… Si nous ne faisons rien, nous serons, nous aussi, responsables de l’extension de ce mouvement insidieux de déstructuration sociale.
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