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24 juillet, 2020

Marché politique : comment ça marche

La politique a les mêmes fondements que l’économie, c’est-à-dire l’individu. Seulement, ses choix ne sont pas soumis aux mêmes contraintes, et ne produisent donc pas les mêmes résultats.
Pourquoi les hommes, qu’ils soient hommes politiques ou citoyens, se comporteraient différemment en politique et sur les marchés ? Dans les deux cas, l’individu choisit en fonction de ses préférences ou de ses intérêts à partir d’un étalon de croyances qu’il a forgé au fil des expériences et du temps. Ce qui change, et ça change beaucoup de choses, c’est le cadre institutionnel, c’est-à-dire le jeu de contraintes qui pèse sur les actions de l’individu.
Pour l’économiste George Stigler, la régulation étatique fonctionne sur le modèle de l’offre et la demande. Du côté de la demande, on trouve les groupes d’intérêt et le législateur, et du côté de l’offre, les partis politiques. Les groupes d’intérêt cherchent à acquérir des ressources en influençant la législation étatique qui est théoriquement gardienne du droit de propriété et de son transfert.
C’est le droit de propriété qui, logiquement, sans redistribution étatique, borne la répartition des ressources en société et son transfert. Les groupes d’intérêt demandent des traitements de faveur de la part du législateur (au sens large) pour que les règles du droit de propriété changent à leur profit.

LA LOGIQUE DES INTÉRÊTS ORGANISÉS

Pour Stigler, le marché politique favorise les demandes les plus efficaces. Un petit groupe d’intérêt suffisamment bien organisé, avec un haut degré d’implication de ses membres, a plus de chances de voir ses vœux exaucés qu’un grand groupe aux intérêts plus diffus.
Ici l’économiste reprend l’idée chère à Mancur Olson sur la logique de l’action collective. Dans certaines circonstances, l’action de groupe est plus efficace que celle individuelle pour obtenir un bien, et cela avantage les minorités organisées au détriment des majorités désorganisées en démocratie.
Il existe en effet un lien entre la taille du groupe et le coût pour obtenir une faveur politique.
Comme l’explique Bruce Benson, la première partie du coût porte sur l’information. Voter en conscience suppose de se renseigner sur le calendrier électoral, les offres politiques en présence, les programmes politiques, etc. Cela suppose de s’investir, et que cet investissement en vaille la chandelle, c’est-à-dire que le gain ou la perte de droits en faveur de groupes d’intérêt concurrents soit suffisamment important pour s’engager.
La seconde partie du coût de la faveur politique porte sur l’organisation elle-même. Les individus doivent se reconnaître un intérêt commun, c’est-à-dire être suffisamment informés pour ensuite pouvoir transmettre leur message aux hommes politiques et aux bureaucrates. Ce message se traduit autant en termes de vote et de financement qu’en termes de lobbying.

TROIS SORTES DE RÉGULATION ÉTATIQUE

James Q. Wilson a classé les demandes de régulation étatique en trois catégories : la première vient des groupes d’intérêt politiques dont les coûts et les bénéfices sont étroitement liés.
Dans ce cas, la compétition pour influencer et changer la législation est importante entre toutes les parties prenantes ; la seconde demande vient des clientèles politiques, qui se caractérise par la concentration des bénéfices espérés sur un petit groupe social et de la dispersion des coûts en dehors de lui ; la troisième catégorie de demande de régulation est portée par des entrepreneurs politiques, c’est-à-dire lorsqu’un entrepreneur particulièrement doué devient le représentant de groupes ne faisant pas directement partie du processus législatif.
Comment l’État répond-t-il aux demandes des groupes d’intérêt ? Si on part du principe que les hommes politiques répondent rationnellement à la demande proposée, alors il est possible de conclure avec Sam Peltzman que :
1 – La législation favorise les groupes d’intérêt les plus puissants politiquement.
2 – Plus d’une organisation peut être favorisée aux dépens des autres.
3 – Quand il existe des différences entre membres du même groupe d’intérêt, les coûts et les bénéfices des transferts demandés ne seront pas les mêmes pour tous.
4 – Même le groupe le plus favorisé n’obtient pas nécessairement complètement satisfaction.
On voit bien la logique des intérêts particuliers, mais où est l’intérêt général dans tout ça ? Les défenseurs de l’intervention étatique tous azimuts sont tout à fait prêts à reconnaître la logique économique qui anime la machine démocratique.
Seulement, ils insistent sur les externalités positives produites par la fabrication des décisions publiques telle qu’elle se fait. Ce sont peut-être des minorités intéressées qui influent sur la fabrication des décisions publiques, mais ces décisions sont en général bonnes et acceptées parce qu’elles bénéficient à l’ensemble de la société.
Malheureusement, comme l’a fait remarquer Gordon Tullock, le marché politique ignore totalement ces externalités qui par conséquent demeurent totalement aléatoires. Il est donc plus raisonnable de l’encadrer, voire de le restreindre, que de l’étendre aux frais des citoyens.
Pour aller plus loin :
Bruce L. Benson, The Enterprise of Law, Pacific Research Institute,1990.
Dennis C. Muller, Choix publics. Analyse économique des décisions publiques, de Boeck, 2010 (trad. F. Facchini, M. Foucault, A. François, R. Magni Berton, M. Melki).
Randy T. Simmons, Beyond Politics. The Roots of Government Failure, Independente Institute, 2011.

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