Pascal Salin chez Odile Jacob, novembre 2019
Dans un florilège d’articles publiés au cours des dernières décennies, Pascal Salin nous offre sa rétrospective de l’histoire politique et économique française. Hélas il nous montre surtout que la droite française est souvent restée la plus bête du monde à se vouloir conservatrice des politiques étatistes léguées par les socialistes sans chercher à comprendre les vertus d’un « vrai » libéralisme.
Certes, il y eut quelques périodes favorables aux idées libérales lorsqu’Alain Madelin devint ministre ou lorsque Jacques Chirac, en 1984, répondit dans le Figaro Magazine aux questions énoncées par Pascal Salin. Ce dernier l’aidait à tenir la plume, mais c’est bien celui qui deviendra président de la République en 1995 qui exprima, dans la foulée peut-être du Reaganisme et du Thatchérisme triomphants, que « la production de richesses ne peut être que le fruit du travail et de l’ingéniosité des hommes et que l’Etat, en tant qu’organisation est inapte à produire », la solution étant « dans l’autonomie et l’initiative individuelle plutôt que dans les interventions collectives ou étatiques ». Jacques Chirac disait encore alors que « le profit n’est pas un prélèvement arbitraire sur la richesse ou le travail d’autrui, mais qu’il est la sanction de la création de richesses, du service rendu… ». Las, Jacques Chirac ne fut libéral que le temps d’une interview ! Les droites n’ont jamais eu le courage de réduire les dépenses publiques et ont laissé filer le déficit en laissant exercer le pouvoir à une technocratie nourrie « d’un keynésianisme vague consistant à croire à une mécanique globale dans laquelle l’élément moteur se trouverait être la demande et, plus précisément, la consommation ». Après Chirac, Sarkozy répéta l’histoire et Fillon ne fût qu’un court espoir.
Les Français sont désabusés de ces politiques qui renouvellent sans cesse les mêmes erreurs. La seule solution est dans la baisse des prélèvements et dans un allègement significatif des règlementations. L’important est de redonner toute sa liberté à l’homme et la maîtrise de sa vie : « L’individu est le seul souverain, et l’Etat, nécessairement limité, a pour rôle de garantir l’exercice des droits individuels, par exemple le droit à la vie, la liberté de pensée, le droit de propriété. L’avenir n’est alors pas prédéterminé à l’avance, il résulte des milliards de décisions individuelles, prises dans le respect du droit des autres ».
Même s’il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre conservatisme et libéralisme, la droite conservatrice est souvent constructiviste, comme les socialistes, elle croit possible de construire une société conforme à ses vœux, alors que « les libéraux, pour leur part, estiment qu’une société se construit elle-même de manière imprévisible grâce à des processus de coordination interindividuels et de création continuelle d’information ». Pascal Salin souligne que ce libéralisme est profondément social et moral, parce que « si une société est totalement fondée sur le respect des droits d’autrui, elle repose alors sur un principe universel et non contradictoire. A partir du moment où les droits de chacun sont définis, deux personnes ne peuvent pas prétendre en même temps à la possession d’un bien ou d’un service donné. Chacun peut alors décider de disposer de ses ressources pour lui-même ou d’exercer son sens de la solidarité de la manière qui lui paraît moralement fondée ». L’éthique du libéralisme est dans ce respect de la liberté humaine.
Au travers de ses chroniques, Pascal Salin refait moins l’histoire qu’il ne repense les fondements de la société. Il expose, avec sa clarté habituelle, les principes qui devraient servir de pierres angulaires au monde libre. A ce titre, il pourfend aussi l’égalitarisme vénéneux et arbitraire qui est au fond une revendication de résultat incompatible ave l’égalité en droit. Il observe que les revendications égalitaires sont des ferments de destruction sociale en suggérant que « les uns ont des droits sur les autres pour la seule raison qu’ils ont des revenus moins importants ». L’économie n’est pas un gâteau à partager mais elle génère plus de richesses, pour tous, à la mesure de l’augmentation du travail et de la créativité de tous. Il défend ainsi l’inégalité que génère l’échange libre par lequel « celui qui possède plus est celui qui a créé plus de valeur pour autrui ».
Au travers de ses commentaires sur chacune de ces époques récentes, Pascal Salin livre les cas concrets des échecs successifs des politiques de Barre, de Delors, de Chirac… à défaut d’avoir fait confiance à la liberté. Elles se sont toutes noyées dans les errements de l’étatisme attendant le salut illusoire de la France d’une augmentation des dépenses, des investissements et de la dette publics. Mais la croissance, explique-t-il, ne sera jamais relancée en misant seulement sur le secteur public. Malheureusement, la politique actuelle du gouvernement ne dépare guère celles de ses prédécesseurs et reste étatiste. « On a présenté Emmanuel Macron comme un politicien libéral avant même son élection et, curieusement, on continue souvent à lui donner cette étiquette, alors que sa politique fiscale –ainsi d’ailleurs que la plupart de ses autres politiques- atteste du contraire de manière évidente. Il conviendra alors de ne pas attribuer à son prétendu libéralisme l’échec de ses politiques. »
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