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Avant de couper des centaines de millions dans les services, est-ce qu’on peut avoir les services ? - Michel Beaudry

04 janvier, 2006

L’environnement et les promesses électorales.


Résumé

Les Canadiens, les Québécois en particulier, adhèrent largement aux objectifs du protocole de Kyoto. Les politiciens en profitent pour mousser leur popularité auprès de l’électorat en promettant de mandater l’utilisation de l’éthanol dans l’essence. Sont-ils motivés par un réel souci d’améliorer l’environnement ou par des considérations électoralistes ?

Les experts de Santé Canada émettent de sérieux doutes tant qu’aux effets positifs de l’éthanol sur l’environnement et sur la santé des gens. De plus, l’expérience en cours en Ontario démontre que l’éthanol n’est pas un substitut économique à l’essence. Mais en campagne électorale, ces considérations sont bien secondaires. L’important est d’influencer le vote des gens avec une promesse populaire. Il est probable que cette promesse, si elle est tenue, génèrera des centaines de millions de gaspillage.



L’environnement et les promesses électorales.

L’environnement est devenu le sujet à la mode suite au succès de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques tenue à Montréal en novembre dernier. Les politiciens ont rapidement récupéré l’événement en promettant de mandater l’utilisation de l’éthanol dans l’essence. Sont-ils motivés par un réel souci d’améliorer de l’environnement ou par des considérations électoralistes ?

Dans le but de répondre à cette question en évitant, autant que possible, un procès d’intention, voyons ou en sont les recherches les plus récentes.

Le groupe d’experts sur l’éthanol de Santé Canada jette un sérieux doute sur la pertinence d’utiliser ce carburant comme moyen de combattre la pollution générée par les véhicules automobiles.

Les chercheurs Tom Durbin et Deniz Karman concluent :

« À la lumière d'une évaluation d'études sur les effets positifs des composés oxygénés sur les émissions, et sur les résultats et la réactivité des émissions pour les contaminants atmosphériques toxiques (acétaldéhyde, formaldéhyde, benzène, p. ex.), on peut conclure que l'utilisation de l'éthanol dans l'essence peut entraîner une réduction de CO et d'hydrocarbures dans les émissions des véhicules, et une certaine réduction des émissions de benzène. Par ailleurs, l'éthanol peut également entraîner une augmentation des émissions d'oxydes d'azote (NOX) et a tendance à augmenter les émissions d'acétaldéhyde. Un certain nombre d'études ont donné des résultats partagés, mais ces tendances sont plus uniformes dans les programmes de recherche plus vastes. »

Le chercheur Mike Lepage ajoute :

« En se fondant sur les connaissances actuelles dans ce domaine, il est raisonnable de conclure que l'utilisation du E10 (un mélange de 90 % d'essence et de 10 % d'éthanol) entraînerait une réduction de CO de l'ordre de 5 à 15 %, un effet presque nul sur les émissions de NO2, un effet moyennement nul sur l'ozone lors des phénomènes de smog, de légères augmentations d'aldéhydes lors des phénomènes de smog, des augmentations importantes possibles des niveaux moyens d'aldéhyde à plus long terme (l'acétaldéhyde, p. ex.), de légères augmentations, à plus long terme, des niveaux moyens de nitrate de peroxyacétyle, et un léger effet sur le niveau des émissions de benzène, selon la formulation du carburant. »

Les chercheurs Jeanette Southwood et Lynn McCarty constatent :

« En ce qui concerne la surveillance de la santé et de l'exposition, il est prématuré de faire des commentaires sur ces questions car de nombreux facteurs dépendent des objectifs stratégiques. Il est important de souligner que les données disponibles indiquent des différences très modestes entre différents types d'essence (et elles ne sont pas toutes positives). »

Finalement, les chercheurs Michel Charbonneau et Robert Tardif écrivent :

« L'analyse des données recueillies sur l'exposition par voie respiratoire a permis de dériver des valeurs de la concentration admissible d'exposition continue pour les trois produits chimiques évalués, à savoir : de 270 à 540 g/m3 pour l'acétaldéhyde, 7 g/m3 pour le formaldéhyde, et de 4,95 à 9,9 g/m3 pour le nitrate de peroxyacétyle. Il existe peu de données sur la toxicité de l'éthanol inhalé, et elles ne permettent pas de déterminer un niveau d'exposition sûr chez les humains. Il existe certaines preuves que des concentrations élevées de vapeurs d'éthanol peuvent entraîner une hyper-réactivité bronchique chez les humains. »

Donc, selon les experts de Santé Canada l’utilisation de l’éthanol dans l’essence ne réduit pas ou peu la pollution et les vapeurs d’éthanol sont possiblement dangereuses pour la santé. Par conséquent, il est pour le moins prématuré de conclure que l’éthanol est la solution miracle pour réduire le niveau de pollution des véhicules automobiles.

L’éthanol serait-il un substitut économique à l’essence nous permettant de réduire notre dépendance envers les combustibles fossiles ?

David Pimentel, professeur à l’Université Cornell, conclut dans un article publié dans « Encyclopedia of Physical Science and Technology » que ça prend plus d’énergie pour produire l’éthanol de maïs que l’énergie qui serait générée par ce même éthanol. De plus, pour produire suffisamment d’éthanol pour remplacer l’essence utilisée par les véhicules aux États-Unis il faudrait que 97% des terres productives soient dédiées à la production de maïs.

Plus près de nous, le gouvernement de l’Ontario requiert que l’essence vendue dans cette province contienne 5% d’éthanol en 2007 et 10% en 2010. Pour rencontrer cet objectif, le gouvernement fédéral a déjà alloué 118 millions $ et le gouvernement ontarien a créé un fond de 512 millions $ pour développer et construire des usines de production d’éthanol. De plus, les deux niveaux de gouvernement ont exempté l’éthanol de taxes. Ces exemptions représenteront des subventions annuelles de 387 millions $ en 2010.

Ainsi, basé sur l’expérience ontarienne il semble bien que l’éthanol n’est pas un substitut économique à l’essence conventionnelle. D’ailleurs si c’était le cas, il ne serait pas nécessaire d’en mandater la consommation ni d’en subventionner la fabrication.

Alors, si l’utilisation de l’éthanol dans l’essence n’est pas justifiable économiquement et est possiblement dangereuse pour la santé, pourquoi les politiciens s’engagent-ils à en mandater la consommation ?

Il est malheureusement fort probable que ce soit uniquement dans un but électoraliste. Depuis le sommet de Montréal, les promesses visant à réduire les émissions de CO2 dans l’atmosphère sont populaires auprès des environnementalistes et de la population en général. De plus, les fermiers et autres groupes de pression qui bénéficieront de cette politique favoriseront le parti dont les promesses seront les plus généreuses. Malheureusement, les contribuables paieront la note et elle risque d'être très élevée.

La réduction des gaz à effet de serre est probablement un objectif louable, quoique certains scientifiques, tel que Ian Clark, professeur des sciences de la terre à l’Université d’Ottawa, en doute. Mais, puisque la majorité des scientifiques supportent le protocole de Kyoto je prends pour acquis qu’il est nécessaire de trouver des moyens de réduire les émissions de gaz CO2. Donc, cette question est un enjeu électoral valable et les partis doivent faire connaître leur position aux électeurs. Ceci dit, comment le gouvernement devrait-il s’y prendre pour atteindre les objectifs de Kyoto tout en minimisant les risques de gaspillage ?

Le rôle des politiciens consiste à énoncer la politique du gouvernement en environnement et de fixer les objectifs et les pénalités qui permettront aux Canadiens d’atteindre les objectifs de Kyoto. Les divers intervenants impliqués, dans ce cas-ci, les industries automobile et pétrolière sauront trouver les solutions les plus appropriées et les plus efficaces. Lorsque les gouvernements mandatent « la solution » ils se retrouvent invariablement face à la logique des subventions, le cas de l’Ontario en est un bel exemple, lesquelles sont la source des pires gaspillages de fonds publics.

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