Église Saint-Léon-le-Grand, à Maskinongé
POUR DES
SIÈCLES ET DES SIÈCLES
Nos Églises * Notre Histoire
Par Louise V. Labrecque
Un
retable en forme de baldaquin, un authentique chemin de croix en plâtre
(Carli), des œuvres d’art partout ; des vitraux, des tableaux, des chandeliers, dont celui de
Pâques, sculpté en 1833 ; un centre d’interprétation (véritable petit
musée, situé dans la sacristie de la chapelle) et la Chaire, l’ange aux
trompettes, les bancs de bois, les corniches et balustrades, avec mille
et un détails architecturaux d’une grande beauté; nous voilà au cœur de la plus
ancienne église du diocèse trifluvien, à Saint-Léon-le-Grand, municipalité
régionale du comté de Maskinongé, située à vingt minutes en voiture de Trois-Rivières.
Une Splendeur !
Pourrions-nous imaginer le Québec sans toutes
ces constellations d’églises ? Parmi celles-ci, plusieurs sont
emblématiques, certaines sont protégées et rénovées, mais tant d’autres tombées
dans l’oubli, destinées à disparaître.
Que faire pour les sauver ? Telles les fleurs vivant de leurs
racines, nous devons les nourrir, les protéger ; nous devons devenir
toutes et tous des actrices et des acteurs pour la sauvegarde de notre
patrimoine. Inspirons-nous des plus belles d’entre elles, comme celle de
Saint-Léon-le-Grand, dont je vous livre aujourd’hui un aperçu, dans le cadre de
cet article, et gardons à l’esprit la notion de restauration, d’étude, de
révision des erreurs passées… Sinon, il
y aura une rupture désolante dans notre évolution historique. Notre patrimoine,
c’est le témoin du temps passé, et bien que la ferveur religieuse ne soit plus
aussi ardente (et c’est peu dire, quoi qu’on en dise), nous devons demeurer
dans la grandeur, dans la noblesse de l’esprit, afin de nous consacrer à la gratification
de ces lieux historiques et artistiques.
L’art sacré, en effet, est rempli de temps forts, et nous ne serons pas
les derniers à refermer la porte, non, car tel un nouveau pèlerinage s’achemine
déjà, une lumière nouvelle et nous continuerons cette belle aventure.
Notre patrimoine religieux n’est pas seulement
dans un état lamentable, donc, mais globalement la situation est rendue à ce
point problématique car nous n’avons pas acquis cette culture de la
préservation. Avant d’arriver au constat de la catastrophe, faute de moyens financiers, nous devrions être
capables, individuellement et collectivement, de savoir gérer efficacement les
priorités : le temps faisant son travail, immense, il use lentement mais
sûrement nos plus beaux châteaux. Or, comment pouvons-nous laisser faire
cela ? Quoi faire et comment faire, sans tout détruire ? Où
pouvons-nous puiser des idées originales, novatrices, intelligentes, sans
dénaturer complètement les lieux ? L’art et la Pensée de l’art invitent
plus que jamais à reconnaître les marques d’identité de notre culture, sans
vente ou modifications destructrices. Regardez ce qui se passe autour de
vous… ! Voyez les arts, le tourisme, certes, mais regardons aussi un peu
plus loin. Nous voulons conserver ces havres de paix et les restaurer grâce à
des mécènes. Si tant de sociétés philanthropiques existent, elles pourraient
capter les lumières de toutes nos belles églises pour les faire renaître, et
avoir l’exquise délicatesse de nous soutenir. Comment exprimer alors l’émerveillement,
cette réappropriation dans la population
actuelle et, surtout, pour les générations futures, lesquelles pourront mesurer
incontestablement l’ampleur de ses véritables musées d’art sacré. Vive nos
églises se tenant debout ! Vive nos
églises ouvertes, comme avant ! En effet, la pratique religieuse ayant
changé, nous nous retrouvons plus souvent qu’autrement désolés devant des
portes d’églises fermées à double tour. Or, nous souhaitons retrouver un lieu
de réflexion, comme avant, un refuge urbain,
un lieu de visite, cela n’existe plus de nos jours, au Québec ; et
pourquoi cela ? Il y va de la responsabilité de chacune et de chacun, sans
nécessairement venir pour y prier, il n’en demeure pas moins que ces lieux
invitent à retrouver la source en soi, à méditer, réfléchir.
L’Histoire, l’architecture, la peinture, la
poterie, la céramique, le vitrail : tout cela dépasse les questions
commerciales et invite à un véritable éveil ; véritable joyau. Aussi, la ruralité, qui parfois agonise,
appelle peu de visiteurs et/ou de touristes. Donc, organiser des concerts ou
expositions ne suffira pas. Dans les grandes villes, c’est aussi triste et
symptomatique d’un désenchantement du monde, d’une sorte de résignation. Pour
devenir des espaces culturels, il faut sortir de notre bien-pensance et
retrouver un lien qui fait du sens, pour retisser la frange d’un tissu
résistant. En effet, notre identité culturelle est profonde et c’est ce que
nous portons de plus beau. L’espoir, ici, doit renverser la tristesse, infusé
par le religieux, certes, mais en rapport également avec la petite musique de
nuit qui joue en chaque cœur ; voyez l’église Saint-Léon-le-Grand, à
Maskinongé, et voyez comme elle est belle et vivante ! La richesse de son
acoustique, avec son orgue magnifique, un Casavant opus 72 datant de 1896. Comme une fleur
immense sortie de terre, la splendeur de cette église inspire les plus grands
élans ; l’on se sent en famille avec elle. Elle s’ancre donc ainsi dans le
nouveau Québec, le Québec que j’aime, tel un symbole de notre pérennité, pour
un voyage au long cours. Quel grand
maître également le visage de cette
nouvelle fraternité, expression multiforme de tous les artistes en communion qui
y trouvent une réponse pour l’avenir, le bel avenir, telle une dédicace de
toutes nos églises ; ainsi, cessons donc de nous relancer la balle et tous
les jours, ici, maintenant, vivons-le ce grand enjeux, très concrètement, pour
nous retrouver dans ces lieux ; tant d’entre eux ne sont pas utilisés
actuellement ; c’est une chance, un levier, pour, qui sait, une nouvelle
mission, un nouveau dialogue ? L’immobilisme en ce moment est la pire
option ; nous devons avancer, reprendre position ; il s’agit de notre
Histoire, de notre identité, de nos pères, de nos mères, et des pères de nos
pères, des mères de nos mères. Notre force, elle est là ; nos fragilités
aussi, mais nous devons faire avec ! La solution est d’évoluer,
changer notre regard. Voilà, et c’est notre chance millénaire. Merci d’essayer
vous aussi, bien humblement, d’ajouter votre pierre à l’édifice, d’essayer de
porter secours, aussi peu que cela puisse être, à la sauvegarde de notre
patrimoine et de nos racines communes.
Mon âme a
la candeur d'une chose étiolée,
D'une neige de février
Ah ! retournons au seuil de l'Enfance en allée,
Viens-t-en prier
Ma chère, joins tes doigts et pleure et rêve et prie,
Comme tu faisais autrefois
Lorsqu'en ma chambre, aux soirs, vers la Vierge fleurie
Montait ta voix.
Ah ! la fatalité d'être une âme candide
En ce monde menteur, flétri, blasé, pervers,
D'une neige de février
Ah ! retournons au seuil de l'Enfance en allée,
Viens-t-en prier
Ma chère, joins tes doigts et pleure et rêve et prie,
Comme tu faisais autrefois
Lorsqu'en ma chambre, aux soirs, vers la Vierge fleurie
Montait ta voix.
Ah ! la fatalité d'être une âme candide
En ce monde menteur, flétri, blasé, pervers,
D'avoir une
âme ainsi qu'une neige aux hivers
Que jamais ne souilla la volupté sordide !
D'avoir l'âme pareille à de la mousseline
Que manie une soeur novice de couvent,
Ou comme un luth empli des musiques du vent
Qui chante et qui frémit le soir sur la colline !
D'avoir une âme douce et mystiquement tendre,
Et cependant, toujours, de tous les maux souffrir,
Dans le regret de vivre et l'effroi de mourir,
Et d'espérer, de croire et de toujours attendre !
Que jamais ne souilla la volupté sordide !
D'avoir l'âme pareille à de la mousseline
Que manie une soeur novice de couvent,
Ou comme un luth empli des musiques du vent
Qui chante et qui frémit le soir sur la colline !
D'avoir une âme douce et mystiquement tendre,
Et cependant, toujours, de tous les maux souffrir,
Dans le regret de vivre et l'effroi de mourir,
Et d'espérer, de croire et de toujours attendre !
* NELLIGAN, Emile, Mon Âme (ou l’Âme du poète),
1903.
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