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19 janvier, 2018

L'art et la pensée de l'art

L’ART ET LA PENSÉE DE L’ART
dans
 Le rapport entre le texte littéraire et la représentation picturale

Par Louise V. Labrecque


Parfois l’homme n’est plus artiste, il devient œuvre d’art; ainsi, j’appelais instamment cette œuvre à se dévoiler : «  Liberté » ; son nom est déjà comme une forme de reconnaissance dont l’exaltation fraternelle eut gémellée la mienne, en souhaitant que cette vision pure, puisse devenir une présence véritable au plus grand nombre, car l’art réussit son exploit en marchant, extasié, vers un dépassement du surréalisme. De même, nous sommes inspirés par cet artiste de génie, et tel autre qui aide à avancer; pour l’artiste, les animaux parlent et la terre donne du lait et du miel. Il est un peu comme un messager divin que nous regardons avec nos yeux de profane.

Ainsi, nous pouvons prédire un bel avenir à certains artistes, tant que l’œuvre puisse se soulever d’elle-même. Avant cela, elle doit s’incarner dans le réel pour se laisser voir, resplendissante, dans des nuits diaphanes, portée par un nuage, une inspiration, une audace, une parcelle de génie. Avant cela, elle palpite sous les voiles, mais elle n’a pas encore trouvé sa voie; nous sommes encore dans l’idée de l’œuvre. Puis, viendront les croquis et les manuscrits, la recherche de la perfection, afin de la voir apparaître sur son balcon d’or. Nous avons parfois le sentiment de devoir la mériter, ainsi elle parait toujours infinie. Toutefois, le plus difficile pour l’artiste consiste à s'asseoir et à attendre, à raturer, à déchirer, à recommencer... comme ces dieux qu’il a vu marcher en rêve. Ainsi, nous déplorons l'inachevé, mais la création, curieusement, n'est pas dépourvue de raison dans ses renaissances, dans ses mille et un recommencements. L’adage dit « les voyages forment  la jeunesse », mais qu’importe les voyages si nous n’avons pas su faire naître, et mille fois renaître, notre patrie intime ? De la même manière, la Pensée sauvage ne s’oppose pas tant que cela à la Pensée de l’art, car les deux savent se soutenir avec éclat. Ainsi, l’art se mêle de beaucoup de choses intimes et la Pensée de l’art aide à mieux comprendre le Québec, globalement parlant. Cette Pensée ultime est un art nouveau, un art inventé. Celui-ci acquiert le goût du risque afin de tendre, avec une vraie originalité, vers universel, sans toutefois renier sa maison rustique, laquelle continue de toute manière de distiller ses parfums uniques. Mais, le goût pour l'ouvrage bien fait ? L'amour de l'artiste pour son art ? La patience de celui qui écrit n'a pas honte de suivre le conseil "vingt fois sur le métier..." 



                                         Photo : Jérôme Dumoux www.viapictura.com

Toutefois, on peut craindre par là de ne pas rayonner, de ne pas donner la pleine mesure de son talent, qui est très grand, ou du moins qu’il s’interdise l’œuvre, à force de se défiler dans le temps; pour l’instant, nous pouvons lui ouvrir un très large crédit; les mêmes défauts, quelques fois voulus par l’artiste, le style lui-même, fatalement, compte encore sur son avenir. Et, ce que nous déplorons de bâclé, dans un premier temps, n’a rien à craindre de la révision d’un travail minutieux et de ses dons naturels, à la condition de savoir créer des Hommes complets, parce que le mal dans l’Homme, nous savons qu’il existe, mais simultanément nous savons aussi percevoir, dans le cœur de l’Homme déchu, la nostalgie de la créature crée par idée d’une certaine perfection, faite pour la lumière :  «  il fut bon », « il nous a aimé », se retournant, hélas, volontairement et trop souvent vers ses ténèbres et sa petite nuit intérieure, mais tout de même conscient de son destin éternel et souffrant de sa misère. Ainsi, l’art sauve- t’il l’œuvre ? Sauve t’il l’artiste et l’artisan ? Et pourquoi cette œuvre plutôt qu’une autre ? Ce sont ses nuances qui nous parlent, des nuances de pensées et de sensations dans le champ de l’art.  Ainsi, oui, l’art est salvateur, car nous pouvons le rationnaliser; de ce fait, l’oeuvre paraît tout à coup légitime.

De plus, c’est pourquoi nous continuons d’imaginer car nous comptons encore sur son avenir; nous comptons également encore sur lui pour le plus grand nombre. La politique - hormis son vouloir rassembleur - étant aux antipodes de l'art, ce qu’il nous reste, ce ne sont pas tant les œuvres que l’Histoire. Les faits, cela va toujours plus loin dans l’implacable. Toutefois, la profondeur est plus grande dans le merveilleux monde des émotions, duquel l’artiste puise son inspiration permanente. Paradoxalement, il y a là quelque chose de réducteur. La Pensée de l’art est toute entière dédiée à une forme d’intelligence supérieure,  illimitée, tout d’un bloc, et dans la création de tout ce qui ne comporte pas de leçons. Elle ne cherche pas à situer la différence entre le grand art et la pure fantaisie. C'est pourquoi nous n'avons jamais pu être communistes, ni appartenir à aucun parti; nous sommes des orphelins de… Tout de même, nous allons voter ! Engagés ? Même si nous avons encore foi en la légende, la politique replonge sans cesse l'Humanité dans le même cloaque, pour un même foetus, comme un nouveau sommeil, blanc, toujours le même. Et face un réveil désenchanté et soporifique ; face à toutes ces taupes claustrophobes et myopes, l'Homme renfrogné, éternel vieux-jeune, est bien dans ses pantoufles; s’il possède une petite tendance vers les arts, soudain, il s’illumine; celui-là même refusant son époque et les temps modernes étend désormais son pouvoir sur l'universel, sur lui-même, même se sachant incurablement seul; saura-il faire contrepoids ? Saura-il faire naître cette audace salvatrice, capable de renouer avec une certaine idée de la transcendance, capable d'inventer un nouveau lexique, afin de mettre au monde un nouveau pays, naître et renaître; celui qui n'abuse de rien ni de personne, celui qui n’insulte rien ni personne, jamais déloyal, jamais calculateur, violent ou agressif, mais dont nous entendons parfois fuser de sa bouche pourrie "à la mort" ! Si nous savions prendre le temps, nous pourrions récupérer ces interdits assassinés d'avance par la horde des fanatiques imbéciles, - ceux d'hier et ceux d'aujourd'hui, les même que ceux de demain, mais en plus grand nombre -, nous pourrions très certainement en faire bon usage pour innover ; or, le sens de l’oeuvre, c'est aussi le sens de l'Homme. 


«  Liberté »

À vrai dire, nous sentons en ce moment et depuis un certain temps déjà, comme une finalité, mais quoi, exactement, mes braves ? Comme bien des philosophes et des artistes, - et certains parmi les meilleurs- il y a une certaine sagesse à penser que nous sommes rendus à la fin d'un cycle; comme un mal de ventre... cela n'est pas sans raison. Toutefois, pourquoi se priver d'une relecture rafraîchissante, comme une belle grosse femme ronde et en santé, mes enfants, mes braves... Il faut suer; moi-même, depuis mes débuts en arts et en littérature, et après un certificat universitaire en histoire littéraire, un autre en journalisme, puis un baccalauréat en études françaises, un autre en enseignement, puis une maîtrise en éducation, dans ce continuum...L'esprit divin, je suppose, vint me dire que pour désigner des choses nouvelles, il faut employer des mots nouveaux; très classique ce bel enseignement voulant dépasser la rhétorique du "docere  delectare", avec plein de clins d'œil aguichants aux lecteurs impossibles, ces perdants magnifiques. Ainsi, ce livre aurait pu s’écrire il y a vingt ans, et sans toutes ces études inutiles, mais je n'ai pas eu le courage de me lancer à vide; je n'ai jamais touché à la poésie de certains talents prodigieux; bref, j'étais un écrivain mineur de la même manière que je fus un étudiant mineur, c'est-à-dire que le plaisir pour moi était d'imaginer, puis d'exercer mon esprit à voir plus loin que ce qui s'offre à nos yeux, comme toutes ces choses en dessous des autres choses tangibles, par exemple la bien-aimée forêt de symboles, et puis, aussi, de raconter, dedans, des histoires. En ce sens, les livres, parfois, se font-ils tout seul ? ...Allez savoir ! J’ai quand-même l’impression d’avoir perdu mon temps à croire à des mensonges. La langue parlée empêche de bien comprendre le sens de ce qui est dit, car nous n’arrivons jamais, très exactement, à exprimer l’indicible. Quoi qu'il en soit, nous nous sentons plus près de La Fontaine que de Corneille. Cependant, l'Homme fascine l'homme, comme le libraire très tranquille, celui qui a déjà été froissé par tous ces aveugles volontaires, et par tant de méprises... Ce temps-là n'est plus à roter, moi-même j'avais été victime de ce jugement de la part d'une buse littéraire qui prétendait l'oeuvre dévalorisée d'avance par « ses graves défauts de style « ; exactement comme pour cet autre artiste aujourd’hui inconnu ....Et la méprise dure encore !

Méconnu, oui, mais pas totalement méprisé; malgré tout, malgré son génie - ses premières œuvres, il les a créées à 14 ans -, il a détruit tout cela. Avant de partir pour Lyon, étudier les Beaux - Arts, comme il se doit, puis vers l’Angleterre, en 1938, en visite chez ses parents, à Saint-Raphaël. Il a fait ses classes et c’est aussi ce que je fis moi-même, plusieurs années plus tard. Comme lui, j’ai brûlé tous mes manuscrits, tous mes dessins. Ma mère n’était pas très contente car ça salissait la cheminée du foyer. Plus tard, lorsque j’ai découvert un autre niveau de lecture, dans l’exquise douceur d’un soir, seule dans la chambre de mes pensées, j’ai pu alors m’adonner, à l’aide de « ma bible » - le Livre d’or de l’Anthologie de la poésie du 19ième siècle -, au début d’une longue réflexion, comme le fil des marées, sur l’art nouveau; mais, je n’ai jamais reçu de pension d’écrivain, encore moins d’invitation à me joindre à une résidence d’artistes. D’entrée de jeu, il est donc remarquable de constater un certain déterminisme. On est ainsi frappés par l’originalité incroyable de ces tournures, comme si le ruisseau retrouvait toujours la mer, comme si la cabane retrouvait toujours l’Homme. Elle me fait penser à l’histoire de cet Esquimau perdu, tout à fait perdu, dans un immense désert de glace, avec son compagnon; il lui disait : «  nous sommes perdus ! Nous ne retrouverons jamais l’igloo ! « L’Esquimau répondit : «  ce n’est pas nous qui sommes perdus; l’igloo est perdu ». Ainsi, lorsque la cabane retrouve l’Homme, nous reconnaissons d’emblée notre plein état primitif, ou, si vous préférez,  la notion de la primauté de l’objet sur l’Homme, commune à tous les hommes : une forme de  langage naturel, loin des visions rase-mottes. Bref, tout ça pour dire que l’art ne s’égare jamais.

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