Shinzo Abe, nouveau Premier ministre japonais, veut mettre en place un nième plan de relance de l'économie. Celui-ci se distingue des plans précédents dans la mesure où en sus d'une hausse des dépenses publiques, il comporte une hausse du taux d'inflation et une dérégulation des secteurs de l'énergie, l'environnement et la santé.
Shinzo Abe veut en finir avec la déflation qu'il tient
responsable de la quasi-stagnation
économique des 20 dernières années. Pour
atteindre son objectif, il compte établir une cible d'inflation de 2 %. Or, quand bien même la Banque centrale du
Japon suivrait ses recommandations, cet aspect du plan est voué à l'échec.
Une précision s'impose.
Les autorités parlent de déflation, alors que selon l'indice populaire
des prix à la consommation, ceux-ci
oscillent autour de zéro d'une période à l'autre, c'est-à-dire qu'il n'y a
ni déflation, ni inflation. Cela
s'explique par une faible
augmentation de la masse monétaire depuis 20 ans (voir le premier tableau). Il s'ensuit que la déflation dont elles
parlent ne renvoie qu'à des prix qu'elles considèrent trop faibles.
À combattre la déflation par l'inflation, celle-ci vaincra,
mais au détriment de la productivité qu'on cherche à augmenter. Shinzo Abe fait appel à l'inflation pour
relancer l'économie, d'abord parce qu'il croit en son pouvoir, ensuite parce
que ce lui est plus facile à établir que de réduire le rôle de l'État, seule
façon efficace d'accroître la productivité et conséquemment la richesse.
Shinzo Abe, comme la majorité des dirigeants gouvernementaux
et de trop nombreux économistes, croit qu'une augmentation de l'inflation, pour
autant qu'elle soit contrôlée et modérée, permet de relancer l'économie. Il est vrai qu'à partir du moment où les
autorités monétaires injectent du nouvel argent dans l'économie, il peut en résulter
un gain de productivité dans certains secteurs d'activités. Toutefois, cette augmentation ne relance pas
l'économie dans son ensemble, elle se produit plutôt au détriment d'autres
secteurs d'activités.
Les premiers à mettre la main sur ce nouvel argent se
procurent davantage de biens et de services, et cela, sans avoir à travailler
ou à produire davantage. Dans le but de
répondre à cette demande accrue les producteurs n'ont d'autres choix que d'augmenter
peu à peu leurs prix. Il s'ensuit que les
individus qui n'ont pas la chance de mettre rapidement la main sur ce nouvel
argent, mais qui doivent payer les nouveaux prix, plus élevés, perdent de leur
pouvoir d'achat. L'inflation, aussi
modérée soit-elle, constitue une vaste redistribution anonyme des richesses, et
pas nécessairement des riches aux pauvres.
De plus, il ne s'agit pas d'une redistribution à somme
nulle. Les producteurs qui calculent que
la nouvelle demande est là pour rester sont appelés à améliorer leurs moyens de
production dans le but d'offrir leurs produits et services à meilleurs coûts
pour les consommateurs. Ces investissements
sont risqués dans la mesure où ils visent un futur incertain, mais ils le sont d'autant
plus qu'ils ne se fondent pas sur un accroissement de richesse globale, mais
uniquement une augmentation monétaire.
Lorsque celle-ci cessera, voire lorsqu'elle sera simplement réduite, plusieurs
consommateurs réduiront leurs dépenses et reviendront à leurs vieilles
habitudes, ce qui, à son tour, conduira plusieurs producteurs à abandonner
leurs projets. Dans la mesure où ces
derniers perdent davantage de leurs ressources après une inflation qu'avant
elle, on peut parler de perte nette de richesse.
Le plan de relance du gouvernement Abe risque de produire
une perte de richesse d'autant plus grande qu'il vient accompagné d'une nième hausse
des dépenses publiques. Cela fait plus
de 20 ans que le Japon tente, en vain, de relancer son économie de cette façon,
alors pourquoi diable l'essayer de nouveau?
Ça sent le désespoir. Ces projets
de stimulation n'ont donné qu'un seul résultat concret à ce jour, soit l'une
des plus importantes dettes publiques mondiale, toutes mesures confondues. Et dire que l'Europe et l'Amérique l'imitent!
L'inflation, plus élevée, envisagée par le gouvernement Abe ne
réduira pas la dette publique japonaise, et cela, quand bien même il mettrait
de côté la hausse prévue des dépenses publiques. Il en est ainsi, car cette hausse de
l'inflation conduira tôt ou tard à une hausse du taux d'intérêt exigé pour
payer cette dette.
En somme, si le plan de relance donne des résultats positifs
ce ne sera ni grâce à une hausse de l'inflation, ni grâce à la ixième hausse
des dépenses publiques. Ce qui pourrait
le sauver est la dérégulation envisagée des secteurs de la santé et de
l'énergie. En effet, si le nouveau
gouvernement fait une place plus grande au secteur privé, à but lucratif ou
non, alors on peut envisager des gains de productivité accompagnés d'une baisse
de la charge fiscale. Toutefois, ce plan
s'avérerait plus efficace s'il s'en tenait uniquement à cet aspect,
c'est-à-dire en laissant tomber les hausses et de l'inflation et des dépenses
publiques.
Conclusion
Le nouveau gouvernement japonais a trouvé un bouc émissaire
en la déflation. Il la croit responsable
de son manque de productivité. Pour la
combattre, il compte établir une cible plus élevée d'inflation. Dans la mesure où celle-ci est mise de
l'avant elle éliminera la déflation, mais en introduisant son lot de problèmes,
et cela, sans régler le plus important, soit le manque de productivité. Pour accroître celle-ci, il faut des prix
libres, c'est-à-dire des prix établis par le marché. Un État qui tend à les remplacer par des
dépenses publiques, soit par la taxation et l'imposition, se dirige tôt ou tard
vers un mur.
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