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25 juin, 2020

Une philosophie pour vivre sur la Terre Ayn Rand, les belles lettres, 2020



Les Belles Lettres nous offrent avec bonheur une traduction de plusieurs textes philosophiques d’Ayn Rand. Très connue, surtout outre Atlantique, pour ses deux grands romans The Fountainhead (La source vive en français) et Atlas shrugged (La grève), le message qu’a voulu délivrer
Ayn Rand est en effet d’abord que la philosophie détermine les buts de l’homme et le choix de sa vie.
Ayn Rand fustige à juste titre ceux qui considèrent l’homme comme un moyen sacrificiel pour les fins d’autrui, et la société comme une fin en soi. Elle est contre tous ceux qui mettent la société au-dessus de l’homme, qui font du social la source, la norme et le critère éthique de la pensée et de l’action, qui partent du postulat que la société doit décider à la place des individus. Elle s’inquiète, s’indigne de la nouvelle doxa selon laquelle la raison, l’esprit et la réalité sont étrangers à la morale qui ne serait que subjective. Elle considère pour sa part que l’homme a besoin d’éthique pour déterminer les meilleurs moyens d’assurer sa vie : « tout ce dont il a besoin et ce qu’il désire doit être appris, découvert et produit par lui, par son propre choix, son propre effort et son propre esprit » (p.138). Il peut donc aussi faire le choix de ne pas prendre en charge sa vie, à ses risques et périls : « sa nature le place devant l’alternative suivante : [être] un être rationnel ou un animal suicidaire » (p. 139). Et « comme la raison est le moyen fondamental de survie de l’homme, est bon ce qui convient à la vie d’un être rationnel, et est mauvais ce qui va à son encontre » (p. 140).
Le droit à la vie est donc la base de tous les droits et « le droit de propriété est le seul moyen qui en permette la réalisation. Sans droits de propriété, aucun autre droit n’est possible. Puisque l’homme doit maintenir sa vie par son propre effort, l’homme qui n’a aucun droit ou produit de son effort n’a aucun moyen de maintenir sa vie. L’homme qui produit alors que d’autres disposent du fruit de son effort est un esclave » (p. 232). Il ne s’agit évidemment pas de demander que tous les hommes acquièrent de la propriété, mais que tous puissent la posséder s’ils l’acquièrent. C’est un droit à l’action qui appartient à chacun car le fondement des droits est dans la nature humaine. « La source des droits de l’homme, écrit-elle, n’est pas la loi divine ou la loi politique, mais la loi de l’identité... Les droits sont des conditions d’existence requises par la nature de l’homme pour sa propre survie. Si l’homme doit vivre ici-bas, il est en droit d’utiliser son esprit, il est en droit d’agir selon son propre jugement libre, il est en droit de travailler pour ses valeurs et de conserver le produit de son travail. Si la vie sur terre est son but, il a le droit de vivre comme un être rationnel : la nature lui interdit l’irrationnel » (p. 233).
Au lieu de cela, la société s’empare de la raison de l’homme et s’y substitue en lui accordant toujours plus de faux droits. Elle compare l’inflation monétaire, qui est toujours une sorte de vol des préteurs et des possédants au profit de l’Etat et des emprunteurs, au processus inflationniste des droits créance auquel on assiste : comme la mauvaise monnaie chasse la bonne, ces nouveaux droits champignons, comme elle les nomme, nient les droits authentiques, les droits liberté. Les Pères Fondateurs américains, observe-t-elle, ne parlaient pas du droit au bonheur, mais du droit à la poursuite du bonheur qui impliquait la décision et l’engagement de chacun. Et le bonheur est précisément « cet état de conscience qui découle de l’accomplissement des valeurs d’un individu« (p. 148).
L’homme devient homme par son propre choix, par ses bons choix pour lui-même. Sa philosophie, qu’elle nomme l’objectivisme, est celle des possibles de la liberté intérieure, c’est à dire du libre arbitre bien plus que d’être et avant que d’être celle de libertés sociales, économiques ou politique. Celles- ci ne peuvent exister que parce que celle-là leur préexiste. Bien entendu, cette liberté ne peut s’exercer que dans un environnement, qu’elle appelle le donné métaphysique, que l’homme n’a pas choisi et doit prendre en compte. Il ne peut déclencher et maîtriser ses processus mentaux qu’en fonction de son identité et de sa conscience ; il ne peut utiliser ses facultés cognitives que dans le respect de leur nature. Mais il ne doit jamais accepter les constructions humaines sans exercer son esprit critique et il ne peut se soustraire aux conséquences nécessaires de ses mauvais choix. Il doit donc discerner, avec prudence car « l’homme n’est ni omniscient ni infaillible » ( p. 275).
La philosophie d’Ayn Rand est simple sans être simpliste. Elle est plus que jamais d’actualité car la société n’a pas cessé d’empiéter sur la sphère individuelle. Il me semble qu’elle pèche par excès en accordant à la seule raison la suprématie pour permettre à l’homme de percevoir la réalité et agir. Car l’homme n’est pas seulement un animal raisonnable. Toute pensée unidimensionnelle risque d’être partielle. Ayn Rand est profondément existentialiste, son objet d’étude est « la nature fondamentale de l’existence de l’homme, et du rapport que l’homme entretient avec l’existence » (p. 299). Mais pourquoi existons-nous ? La philosophie d’Ayn Rand ne répond pas à cette question et ses références à Aristote ne suffisent pas à combler cette faille. C’est peut-être son impasse. Mais sous ces réserves, non sans importance, la philosophie d’And Rand mérite d’être plus et mieux partagée pour résister à la gangrène du tout social qui tue la personne à petit feu.

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