La signalisation routière est le reflet de la culture
dominante dans la fonction publique montréalaise. C’est le côté visible des
qualités et des défauts des fonctionnaires au service de la population.
Une bonne signalisation routière indique que les
fonctionnaires sont fiers de leur travail et qu’ils ont à cœur le respect des
citoyens. Au contraire, une signalisation déficiente révèle un laisser-aller et
un je-m’en-foutisme.
Dans ma carrière j’ai eu l’occasion de travailler dans plus
d’une douzaine de pays dit en voie de développement. À quelques exceptions
près, la signalisation routière dans les capitales de ces pays était supérieure
à ce qu’on retrouve à Montréal.
Le but de la signalisation routière est de permettre aux
gens de se déplacer d’un point à un autre sans être familier avec le secteur.
Selon le ministère des Transports du Québec, les principes d’une bonne
signalisation routière sont :
La signalisation fait partie intégrante du paysage routier. Elle est un
outil de communication essentiel pour l'usager de la route. Elle doit, par
conséquent, être conçue et installée de manière à aider l'usager de la route
tout au long de son parcours en lui permettant d'adapter sa conduite aux
diverses situations qui se présentent à lui, et ce, en lui évitant hésitations
et fausses manœuvres.
Elle doit donc lui permettre d'anticiper toute manœuvre ou tout
changement de direction et lui permettre de s'y préparer. En plus de lui servir
de guide en lui indiquant la route à suivre ainsi que les dangers qui la
parsèment (courbe ou pente prononcées, chaussée glissante, etc.), elle lui
rappelle les diverses prescriptions du Code de la sécurité routière et des
règlements municipaux.
Le langage de la signalisation routière doit donc être clair et
compréhensible par tous.
Il est clair que les fonctionnaires de la Ville de Montréal
ne connaissent pas les principes d’une bonne signalisation routière. C’est à
croire que leur objectif est de la rendre aussi invisible et incompréhensible que
possible.
La plupart des panneaux de noms de rue semble dater du temps
où les Montréalais se déplaçaient en charrette. Ils avaient alors tout le temps
voulu pour les repérer et les lires. Le lettrage est si petit qu’il faut des
jumelles pour les lire à plus de 50 pieds. De plus, il semble que les
fonctionnaires se soient amusés à les installer de façon à ce qu’ils soient
difficiles à repérer : ils sont présents d’un seul côté des intersections
quand ils ne sont pas simplement absents; ils sont de préférence installés derrière
un poteau ou un arbre. Alors que vous vous concentrez pour trouver le nom de la
rue que vous cherchez, vous devenez un danger pour les piétons, les cyclistes
et les autres véhicules autour de vous.
Les feux de circulation ne sont pas en reste. Les génies de
la signalisation se sont surpassés pour entraver le plus possible la fluidité
de la circulation. C’est à croire qu’ils sont synchronisés pour obliger les
conducteurs à s’arrêter à tous les feux rouges. Montréal est la seule ville
québécoise ou le virage à droite sur feu rouge est interdit. Il est aussi
défendu de tourner à droite pendant les premières 15 à 20 secondes d’une
lumière verte. Il est évident que les fonctionnaires prennent les conducteurs
montréalais pour des imbéciles pour qui les piétons et les cyclistes sont des
cibles.
Que dire des panneaux de stationnement? À certains endroits
on a l’impression qu’ils ont tous été installés sur le même poteau : pas
de stationnement, pas d’arrêt, période hivernale ou estivale, vignette, etc. À
moins d’être un expert, et encore, il est impossible de s’y retrouver.
Depuis plusieurs années et pour de nombreuses années à
venir, l’ensemble des rues et boulevards de Montréal sont en chantier
permanent. Il faut rattraper l’incurie des quarante dernières années :
refaire les aqueducs et les égouts, refaire les rues et les trottoirs,
construire des pistes cyclables, aménager des voies réservées, etc. Chacun de
ces chantiers requiert autant de détour mal indiqués. La technique de
signalisation des détours la plus commune consiste à placer une pancarte
« détour » un peu avant le chantier et de laisser les conducteurs se
démerder pour le reste.
Comme si cela n’était pas suffisant les petits roîtelets des arrondissements, en
particulier sur le Plateau, s’acharnent à multiplier les embûches à la
circulation.
La mauvaise signalisation nuit à l’économie montréalaise. En
plus des pertes considérables de temps, je suis convaincu qu’il y a plus
d’accidents causés par la mauvaise signalisation que toute autre cause prise
individuellement. Les banlieusards ne s’y aventurent qu’en cas d’obligations
extrêmes. Le touriste, qui après avoir tourné en rond une heure pour trouver sa
destination et qui reçoit un coûteux billet de stationnement, gardera longtemps
un mauvais souvenir de Montréal. Il jure qu’il ne s’y fera pas reprendre et il
en informe ses parents et amis.
À ceux qui seraient tentés de me répondre qu’il suffit
d’utiliser un GPS, je réplique que c’est une bien mauvaise excuse pour
justifier une signalisation routière déficiente. Ce n’est pas tout le monde qui
a accès à un GPS. De plus, les cartes routières utilisées par les GPS ne
contiennent pas les nombreux détours improvisés au jour le jour. Autant dire
qu’ils sont inutiles à Montréal. La voiture
sans conducteur de Google s’y perdrait en quelques minutes.
Si on veut remettre Montréal sur la carte pourquoi ne pas
commencer par concevoir et installer une signalisation routière digne du vingt
et unième siècle? En commençant par les grands axes routiers et le centre commercial
et touristique de Montréal, cela ne coûterait que quelques millions qui
pourraient être facilement récupéré en surveillant d’un peu plus près le
gaspillage.
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