Revue de livre par Joseph Facal
Des fois, c’est aussi au citoyen de faire son effort. Alors
aujourd’hui, je vous donne une sorte de devoir à faire.
Si vous voulez comprendre les causes des problèmes qui
affligent notre système de santé, si vous vous demandez ce que l’on devrait
faire, de façon réaliste et concrète, lisez le petit livre de Claude
Castonguay, intitulé Santé : l’heure des choix, publié chez Boréal.
Diagnostic
En 195 petites pages, tout est là, exposé de façon sereine
et réfléchie, sans cris ni idéologie, mais avec un solide attachement à des
valeurs d’équité, de solidarité… et d’efficacité. C’est à mon sens irréfutable.
Non, l’auteur ne plaide pas pour un démantèlement du réseau
public au profit du privé, mais pour que l’on accepte de regarder la réalité en
face, de changer en profondeur, de se soucier des patients avant les slogans
idéologiques, de s’inspirer de ce qu’on fait dans des sociétés qui réussissent
infiniment mieux que nous, de ne plus tolérer les indignités que l’on impose à
des humains au nom du «système».
Il faut, dit l’auteur, changer complètement la façon de
financer, freiner la croissance des dépenses, revoir les services que le régime
devrait couvrir et ceux qu’il ne devrait pas couvrir, débureaucratiser,
décentraliser, ne plus tout concentrer dans les hôpitaux, revoir la
rémunération des médecins et le partage des tâches entre professionnels, et
desserrer l’emprise des groupes de pression.
Oui, je sais, vous avez déjà entendu tout cela. Mais ici,
c’est expliqué, illustré, démontré. Au passage, des idées reçues sont
déboulonnées : non, le Québec ne vit pas une pénurie de médecins. Et non, plus
d’argent n’est pas la solution. Et non, ne croyez pas ceux qui vous disent
qu’on fait des progrès sérieux.
Quelles sont les chances que tout cela devienne réalité?
J’aimerais tant me tromper, mais je pense qu’elles sont très faibles.
Peu probable
La preuve a été faite mille fois : le courage n’est pas
payant en politique. Les éditorialistes vous félicitent, mais les groupes
d’intérêts vous crucifient et les électeurs vous achèvent.
Nous entrons aussi dans une période où les gouvernements
minoritaires élus avec l’appui de guère plus du tiers de l’électorat seront
plus fréquents. Leur faiblesse les confinera à l’impuissance. Les tractations
entre les partis seront faites dans un esprit partisan et non avec l’intérêt
général en tête.
Enfin, l’information-spectacle en temps réel et ces égouts à
ciel ouvert que sont les médias sociaux empêcheront une discussion calme et
approfondie de questions complexes. Ils seront cependant parfaits pour faire
peur.
Pensez-y : une société qui, depuis des décennies, n’arrive
pas à régler une question comme celle des droits de scolarité sans sombrer dans
le psychodrame est-elle prête à prendre à bras-le-corps le chantier mille fois
plus compliqué de la santé ?
Vous avez deviné ma réponse.
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