Des chercheurs de l’université de Harvard ont récemment conduit une étude (Zero-Sum Thinking and the Roots of US Political Divides) à partir d’un échantillon de 15 000 résidents aux États-Unis afin de mieux comprendre le profil socioculturel des personnes qui adhèrent à la « pensée à somme nulle », selon laquelle le monde serait fondamentalement divisé entre « gagnants » et « perdants ».
Professeure d’économie à Harvard et fondatrice du Social Economics Lab, Stefanie Stantcheva, qui a participé à ladite étude, explique dans un article paru dans Challenges que les personnes qui voient l’économie de cette manière ont tendance à être jeunes, à voter démocrate, à soutenir les politiques de redistribution et d’aides aux plus défavorisés, et à défendre la discrimination positive pour les femmes et les minorités ethniques. En outre, plusieurs facteurs renforceraient chez un individu la pensée à somme nulle, comme une ascension sociale moins forte depuis la génération des grands-parents, ou encore le fait de compter dans sa famille des ancêtres esclaves. A contrario, les personnes ayant immigré ou qui sont issues de parents ou de grands-parents immigrés tendent à y être moins réceptifs.
On l’aura compris, cette approche de l’économie est l’antithèse exacte de l’approche libérale, selon laquelle l’échange est par définition profitable aux deux parties – faute de quoi l’échange n’aurait tout simplement pas lieu. L’échange impliquant donc nécessairement un rapport gagnant-gagnant entre les parties contractantes, l’économie est un jeu équitable dans lequel chacun trouve son profit, non à somme nulle mais à somme positive. C’est d’ailleurs ce qu’avait démontré, dans le domaine des échanges internationaux, un rapport de la Banque mondiale de 2000, portant sur 125 pays étudiés sur 40 ans. Ses auteurs, les économistes David Dollar et Aart Krav, étaient parvenus à la conclusion que lorsque le revenu moyen par habitant dans le monde augmentait de 1%, celui des pays les plus pauvres croissait lui aussi de 1%. Ce qu’ils ont appelé la loi du one to one montre bien que la mondialisation par le marché a enrichi le monde dans son ensemble, et non uniquement les pays développés.
Les politiques ont à vrai dire avantage à entretenir cette vision erronée de l’économie comme un jeu à somme nulle car c’est elle qui fonde l’interventionnisme étatique. C’est sans doute ce qui explique que trop de gens en France sont encore prisonniers de la définition de l’économie entendue comme un gâteau qu’il faudrait mieux « répartir » entre « riches » et « pauvres » grâce aux politiques de redistribution de la richesse. Non, l’économie est un processus dynamique de création de richesses, grâce auquel l’humanité se porte d’ailleurs bien mieux aujourd’hui qu’il y a cent ans. Tant qu’une majorité de nos concitoyens ne comprendra pas cela, le socialisme – de gauche comme de droite – continuera à sévir dans notre pays.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire