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15 octobre, 2020

Au secours, Thomas Piketty veut encore taxer les riches !

 Pour Piketty, il faut abattre le capitalisme et revenir à ce bon vieux socialisme qui a pourtant vu ses proverbiaux lendemains qui chantent s’évanouir dans la misère économique et la répression politique partout où il fut appliqué.

« Que faire de la dette Covid-19 ? » Ainsi s’interrogeait récemment notre star mondiale de l’économie Thomas Piketty dans sa dernière chronique mensuelle pour le journal Le Monde. Excellente question. Quant à sa réponse, nul besoin de lire l’article pour la deviner à coup sûr tant ce sujet a tourné chez lui (et quelques autres) à l’obsession égalitariste : il faut taxer, retaxer et surtaxer encore plus les riches !

La tribune de Piketty, quoique assez embrouillée dans sa description des causes et des effets des politiques des banques centrales vis-à-vis de l’accroissement des plus gros patrimoines et des plus gros revenus, a néanmoins le mérite de ne pas éluder dans je ne sais quel effacement indolore de la dette les conséquences absolument inéluctables de l’endettement des États : soit ces derniers utilisent l’arme monétaire, celle qui érode les avoirs des épargnants, pour tenter d’en venir à bout, soient ils décident de lever de nouveaux impôts.

Inutile de dire que Piketty préfère de beaucoup cette dernière solution. Avec la première, on n’est jamais sûr des effets redistributifs possibles, tandis qu’avec l’impôt, on sait à qui on prélève quelles sommes et on sait à qui et pour quelles fins on les redistribue. Il préconise donc de mettre en place une véritable « relance sociale et écologique » par le biais de « prélèvements exceptionnels sur les plus aisés ».

Mais en réalité, point n’est besoin de la crise économique consécutive aux confinements anti-Covid pour suggérer à Piketty ce type de fiscalité punitive et confiscatoire qui n’a chez lui absolument aucun caractère « exceptionnel ». La dette Covid-19 n’est jamais pour lui qu’une occasion de plus d’exposer ses thèses sur la lutte contre les inégalités dans le monde, préoccupation très « sociale et solidaire » qui se trouve être particulièrement en phase avec l’esprit français qui nourrit une véritable passion pour l’égalité, pour ne pas dire l’égalitarisme, quitte à y parvenir via les faux-semblants ravageurs du nivellement par le bas.

De l’instauration de l’État providence dans l’immédiat après-guerre au projet d’amener 80 % d’une génération au Bac (86,6 % en juin 2020 !), de nos prélèvements sociaux et fiscaux particulièrement en pointe à la décision d’instaurer un congé paternité obligatoire dans le but de réduire les inégalités salariales entre les hommes et les femmes et d’un Président qui se fait élire en disant qu’il n’aime pas les riches à un autre qui cherche à durer en vous expliquant que votre amie c’est l’Urssaf, tout montre que la redistribution étatique est chez nous une valeur sûre qui passe bien avant toute idée de création de richesse.

En 2013, cette passion française a trouvé sa consécration la plus éclatante dans le succès planétaire du magnum opus de Piketty Le capital au XXIe siècle. Comme ce livre comporte 1000 pages, Challenges.fr en a fait un résumé assez détaillé, annoncé par la déclinaison lapidaire du thème central :

S’appuyant sur une énorme batterie de statistiques, l’économiste français montre que le capitalisme est, par nature, une machine à fabriquer des inégalités de richesses exponentielles.

Voilà, voilà. Il faut abattre le capitalisme et revenir à ce bon vieux socialisme qui a pourtant vu ses proverbiaux lendemains qui chantent s’évanouir dans la misère économique et la répression politique partout où il fut appliqué.

Piketty publie d’ailleurs ces jours-ci ses chroniques du Monde de 2016 à 2020 dans un ouvrage intitulé Vivement le Socialisme !  Même s’il prétend parler d’une « nouvelle forme de socialisme », car bien sûr l’ancien n’était pas le bon, l’idée est claire – et sans doute un brin marketing aussi.

Bref, à la situation inégalitaire qu’il dénonce, Piketty propose donc de répondre par une fiscalité à forte progressivité sur les revenus et sur la fortune. D’où la tranche à 75 % pour les revenus supérieurs à 1 million d’euros annuels annoncée par François Hollande lors de sa campagne électorale de 2012.

Finalement, une fois « aux affaires », ce dernier se « limitera » à une nouvelle tranche à 45 % pour les revenus excédant 150 000 euros, la tranche à 75 % ayant été censurée par le Conseil constitutionnel. Ce qui n’empêchera pas les Français de clamer rapidement leur « ras-le-bol fiscal ».

Aujourd’hui, Emmanuel Macron a transformé l’ISF en IFI, ce qui représente environ trois milliards d’euros en moins pour les caisses de l’État, et pour compenser cette épouvantable injustice sociale, il a exonéré 80 % des ménages les moins aisés de la taxe d’habitation. Mais avec la hausse concomitante de la CSG, sans compter une myriade d’autres taxes vertes et écologiques glissées partout, la pression fiscale et sociale de la France n’a pas vraiment baissé. Rapporté au PIB, notre taux de prélèvements obligatoires reste le plus élevé des pays de l’OCDE :

La France est également le pays champion de la redistribution en Europe. On sait que bon an mal an, 10 % des foyers fiscaux paient 70 % de l’impôt sur le revenu (et 2 % paient plus de 40 % de cet impôt), mais plus généralement, une fois que l’on tient compte de tous les transferts sociaux, on constate que le revenu mensuel moyen des 20 % les moins riches passe de 553 euros pour une personne seule à 933 euros après les effets de la redistribution. À l’inverse, le même revenu pour les 20 % les plus riches passe de 4566 euros à 3705 euros (chiffres 2018). Le rapport qui était de 1 à 8 avant redistribution tombe de 1 à 4 après.

Mais pour Thomas Piketty, tout ceci ne suffit pas. Un rapport de 1 à 4, c’est encore trop, il y a encore des plus riches et des moins riches. De plus, prendre les revenus des 20 % les plus riches, c’est noyer les 500 plus grosses fortunes de France dans la masse et faire comme si elles n’étaient pas là, à notre portée, à nous narguer du haut de leur patrimoine à dix ou onze zéros.

Et peu lui importe que les odieux 730 milliards d’euros qu’elles représentent en 2020 selon les estimations du dernier palmarès du magazine Challenges, soient en fait la valorisation des parts détenues par des familles d’entrepreneurs dans leur entreprise. Pourtant, taxez ces patrimoines et ce sont d’une part des capitaux qui décident de quitter la France ou de n’y jamais venir, et ce sont d’autre part des emplois, de l’investissement et de l’innovation qui disparaissent au profit de la gabegie de la dépense étatique.

Le projet fiscal actuel de Thomas Piketty, dont Jean-Luc Mélenchon s’est étroitement inspiré pour son programme présidentiel de 2017, consiste donc à augmenter l’impôt sur le revenu tant en montant qu’en progressivité en ajoutant des tranches marginales jusqu’à 90 %, à augmenter lourdement les taxes sur les successions pour les plus riches et à réintroduire une fiscalisation annuelle progressive du patrimoine tout compris qui pourrait monter elle aussi jusqu’à 90 % pour les milliardaires ! Pas sûr que le Conseil constitutionnel validerait car on atteindrait des niveaux parfaitement confiscatoires.

Mais ne croyez surtout pas que l’économiste fait ces propositions au hasard par esprit vengeur et jaloux à l’égard des classes aisées. Pas du tout.

À force de triturer et reconstituer ses données dans tous les sens (un peu trop d’ailleurs, à tel point qu’on lui a reproché une tendance excessive à la fabrication pure et simple de certains chiffres), il s’est rendu compte par exemple que le Royaume-Uni n’avait jamais été aussi égalitaire qu’avant 1980, période où il avait aussi un système fiscal ultra-progressif et confiscatoire, tandis qu’ensuite, Margaret Thatcher (et Reagan aux États-Unis) ont imposé un « récit hyper-inégalitaire » qui perdure encore aujourd’hui un peu partout, même en France.

Si l’on s’en tient au point de vue pikettiste, on peut difficilement tomber sur un exemple plus mal choisi. En revanche, s’il s’agit de montrer à quel point les pressions fiscales démentes censées couvrir des dépenses publiques « émancipatrices » jouent contre la prospérité des citoyens, on ne peut rêver mieux.

Car si la fiscalité britannique faisait effectivement du Piketty avant Piketty, c’est-à-dire tout bêtement du socialisme en bonne et due forme, inspirant aux Beatles leur chanson Taxman (la tranche marginale d’imposition sur le capital était de 98 % et celle sur les salaires de 83 % !), il faut aussi se rappeler qu’à l’époque, le Royaume-Uni était considéré comme « l’homme malade de l’Europe ». L’inflation était galopante, l’interventionnisme s’insinuait partout et la désindustrialisation était rapide, les économistes parlant même de rétro-développement.

Vivant depuis 1945 avec l’idée keynésienne que c’est la dépense publique qui permettra de fournir des emplois à tout le monde, allant de nationalisation en nationalisation et de grève en grève décrétées par des syndicats tout-puissants, le pays s’est retrouvé en véritable situation de faillite que seul un prêt du FMI de 4 milliards de dollars en 1976 (plus grand emprunt jamais consenti par le FMI à l’époque) lui a permis d’éviter.

Malgré cette alerte, le gouvernement travailliste de James Callaghan (1976-1979) cède encore aux syndicats qui paralysent totalement le pays lors de « l’hiver du mécontentement » de 1978-1979, à tel point que le gouvernement en arrive à élaborer des plans pour faire intervenir l’armée, instaurer l’État d’urgence et assurer ainsi les services essentiels à la population.

Population qui, manifestement arrivée à un point de ras-le-bol irrécupérable, portera Margaret Thatcher au pouvoir en mai 1979 avec 44 % des voix et 339 élus contre 37 % et 269 élus aux travaillistes. À noter qu’elle sera réélue deux fois et que ses successeurs conservateurs ou travaillistes jusqu’à David Cameron ne remettront jamais en cause ses réformes.

Cet exemple montre assez clairement que le combat contre les inégalités est le mauvais combat à partir du moment où tout le monde voit son niveau de revenu progresser. Du reste, du Royaume-Uni des années 1970 à l’URSS en passant par Cuba, le Venezuela ou la Grèce, l’expérience montre que les politiques (socialistes) basées sur la réduction de l’écart débouchent inévitablement sur la stagnation, voire la baisse des niveaux de revenus, sauf pour la nomenklatura et la fille d’Hugo Chávez).

Mais pour M. Piketty, qui tient chronique dans notre grand « journal de référence », la politique à suivre est bien évidemment celle des travaillistes britanniques des années 1970. Et après on s’étonne que les Français de gauche ou de droite soient pétris de socialisme mal digéré…

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