André Dorais
Le «Régime québécois d’assurance parentale» permet le versement de prestations aux travailleurs qui prennent un congé à l’occasion de la naissance ou de l’adoption d’un enfant. Il prétend promouvoir les responsabilités familiales et professionnelles des travailleurs, mais la réalité est qu’il favorise les nouvelles familles de travailleurs au détriment des autres. En effet, celles qui ont déjà des enfants et n’en veulent pas davantage doivent le payer malgré tout. Il en va de même pour les couples et les célibataires qui ne veulent pas d’enfant.
Le gouvernement joue sur les mots, ledit Régime n’est pas une assurance, mais une politique favorisant l’augmentation des naissances. Lorsqu’un gouvernement abaisse les coûts réels d’un produit ou d’un service, dans ce cas-ci, d’un congé, il y a augmentation de la demande. Puisque le Régime est financé à même les revenus des travailleurs, ceux-ci devront payer davantage. Qu’à cela ne tienne, le gouvernement sait ce qui est bon pour la collectivité. Selon lui, dépenser davantage, particulièrement en temps de crise économique, est une bonne chose…
À chaque fois qu’on corrige les prétentions collectivistes de l’État, celui-ci invoque la solidarité. Or, la solidarité a deux caractéristiques : aider les gens de manière volontaire. Si ce n’est pas volontaire, ce n’est pas de la solidarité. Il s’ensuit qu’un gouvernement qui prétend effectuer de la solidarité est un non-sens
Des idées préconçues
Au-delà de la solidarité dont le gouvernement se réclame pour justifier le Régime, il croit que l’augmentation de la population contribue à la richesse du «pays». Or, si la richesse augmentait à mesure qu’une population s’accroît, alors la Chine, l’Inde, l’Indonésie et plusieurs pays d’Afrique seraient immensément riches, ce qui n’est pas le cas. Le nombre d’une population n’a rien à voir avec sa richesse économique.
Ces prétextes en cachent un autre, soit de favoriser l’usage de la langue française au Québec. Que l’on partage ou non cet objectif, la façon de s’y prendre est risquée, coûteuse et illégitime. Risquée, car l’augmentation des naissances n’implique pas nécessairement l’augmentation de l’usage du français, particulièrement à Montréal. En effet, plusieurs des nouvelles familles issues de l'immigration qui habitent la métropole ne parlent pas le français, du moins elles ne parlent pas d’abord le français, et bien qu'elles n'aient pas le choix d'envoyer leurs enfants à une école de langue française, cela ne garantie pas le succès de l’entreprise.
Plusieurs nouveaux arrivants s’établissant à Montréal prennent des années à réaliser que le Québec est officiellement unilingue français, car leur quotidien se déroule soit en anglais, soit dans leur langue d’origine. À l’inverse, plusieurs de ceux qui ne parlent pas l’anglais considèrent cela comme un obstacle à l’emploi. Autrement dit, l’anglais demeure un pôle d’attraction malgré la Charte de la langue française (loi 101).
On n’apprend pas une langue uniquement parce qu’on y est obligé, mais aussi et surtout parce qu’on y a un intérêt. Considérant que le Québec est de plus en plus pauvre au sein du Canada, on doit conclure que l’intérêt économique d’apprendre le français s’effrite. Les nationalistes, qui se retrouvent dans tous les partis politiques, blâment constamment le fédéral pour cet état de chose, alors que leur interventionnisme en est la cause principale. Plutôt que d’attirer les gens à la langue française par la liberté économique, ils l’imposent par la politique.
Comme le nationalisme est d’abord un interventionnisme, le gouvernement québécois paie pratiquement quiconque demande à suivre des cours de français. Et si la francisation ne suffit pas aux gens, notamment aux nouveaux arrivants, pour s’intégrer, alors le gouvernement leur offre gratuitement des services d’orientation, des formations professionnelles, des cours préalables à celles-ci et des subventions salariales. Non seulement ces études sont payées par les contribuables, mais les étudiants sont payés pour étudier. À cela s’ajoute les frais de fonctionnement de ces services, notamment les salaires des fonctionnaires et des employés des organismes à but non lucratif qui vivent des fonds gouvernementaux et conséquemment des contribuables. Bref, les coûts liés à la francisation et à l’intégration des gens au Québec sont élevés.
L’argent affecté à la promotion des naissances, à la francisation et aux autres mesures d’intégration constitue de l’argent en moins pour la production de richesse. À trop vouloir augmenter l’usage de la langue française par des moyens politiques, le Québec risque de ne plus attirer personne à moyen terme. L’immigrant, comme tout autre individu, cherche à améliorer son sort au moindre coût, mais puisque l’apprentissage d’une langue constitue un coût élevé, si ce n’est qu’en terme de temps à y consacrer, il a de moins en moins intérêt à apprendre le français et à s’établir au Québec, car celui-ci s’appauvrit. Le Québec s’appauvrit, relativement à ses voisins immédiats, à cause de son interventionnisme relativement plus grand.
Payer les gens pour apprendre une langue et les payer pour faire des enfants démontre à la fois un sentiment d’insécurité quant à l’avenir du Québec et une arrogance quant aux solutions à apporter. Certains politiciens pensent conduire une société comme ils conduisent une voiture. Une meilleure solution à la promotion du français au Québec serait d’utiliser les moyens économiques plutôt que politiques. Dans cette optique, il n’y aurait pas de subvention aux naissances, voire pas de subvention pour personne.
Personne ne devrait être obligé de payer pour les choix d’autrui, non seulement parce que cela est économique, mais aussi et surtout éthique. Celle-ci débute en respectant la propriété et conséquemment les choix de chacun. Malheureusement, l’éthique gouvernementale n’est pas universelle, elle favorise plutôt des groupes au détriment des autres. La solidarité dont fait appel le gouvernement pour justifier son Régime d’assurance parentale n’est que poudre aux yeux. Il s’agit d’un choix imposé d’en haut qui, s’il atteint son objectif d’accroître l’usage du français, s’établira au prix d’une plus grande pauvreté économique. Si le gouvernement est sérieux à propos de l’éthique, il respectera les choix de chacun plutôt que d’imposer les siens. Le français s’étendra dans la mesure où le Québec s’enrichira et il s'enrichira dans la mesure où le gouvernement réduit ses interventions.
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