La liberté est inscrite dans la nature de l’Homme, elle a pour vertu d’épanouir sa dignité. Les règles de la liberté garantissent à tout être humain la vie, la liberté, la propriété.
C’est le hasard qui m’a permis de retrouver cette sentence de Hayek, dans le troisième chapitre du tome premier de Droit Législation et Liberté. En introduction de ce chapitre, Hayek cite un article de la Constitution de la Caroline du Nord :
« La référence fréquente aux principes fondamentaux est absolument nécessaire pour conserver les bienfaits de la liberté. »
Pourquoi s’embarrasser avec les principes ?
Pourquoi s’arrêter à ces idées ? Doit-on s’arrêter à de telles considérations quand il y a le feu à la maison ? La réflexion n’est-elle pas un luxe quand l’action doit être immédiate et efficace ? Certains d’entre vous se poseront ces questions et sont peut-être lassés de lire sans cesse mes homélies sur les principes du libéralisme.
Je connais d’ailleurs beaucoup de libéraux sincères qui n’aiment pas la référence au « libéralisme », un mot qui aurait des relents de passéisme et qui rebuterait l’opinion publique.
Nous voilà loin de l’actualité ? Pas du tout, si je m’en reporte aux débats et aux écrits de tous les jours. Les débats sont ardents au sein de la société politique autour de la déchéance de la nationalité, ils défraient la chronique, et cela pourrait sembler risible dans la conjoncture économique de notre pays et dans la tension sociale qui annonce peut-être l’explosion.
Mais c’est qu’en fait la gauche se déchire, et sans doute aussi l’opposition, puis enfin la société civile, sur les liens entre liberté et sécurité. L’expédient, c’est l’état d’urgence, le principe c’est l’état de droit.
Du côté des écrits, même constat. Les prolégomènes d’une alternance politique s’inscrivent dans les multiples livres à succès que nous proposent les candidats, déclarés ou potentiels. L’ouvrage de Nicolas Sarkozy, dont un bref commentaire vous sera proposé ici, illustre parfaitement la préférence pour les expédients et l’ignorance des principes.
Dans ma lettre ouverte aux libéraux (qui n’est certes pas la loi des douze tables, mais bien plutôt un mode d’emploi du libéralisme), j’insiste sur le double risque et de l’empirisme et de l’empilement. Empirisme entendu au sens de refus de la doctrine, rejet de toute vision d’ensemble. Empilement de mesures destinées à séduire des clientèles diverses (le célèbre patchwork électoral).
Bien évidemment, à cette heure du moins, nos réformateurs nous régalent de l’évocation et de la promesse de mesures qui sont autant d’expédients, et en oublient les principes.
Hayek illustre cette détestable dérive avec l’évolution du droit. À l’origine traduction en règles concrètes de principes de liberté, le droit s’est avili en législation, accumulation de textes et de jurisprudences incohérentes, illisibles et souvent liberticides. La bonne loi est claire, générale, intemporelle. La législation est compliquée, appliquée, circonstancielle.
Ce que je souhaite ardemment, dans la tradition et l’enseignement de Hayek, c’est qu’au cours des mois à venir on en revienne, aussi souvent que possible, aux principes de la liberté. Ils sont pourtant bien connus, l’humanité les a découverts au prix de guerres, de révolutions, de totalitarismes, de désespoirs.
La liberté est inscrite dans la nature de l’Homme, elle a pour vertu d’épanouir sa dignité, et pour vice de le dégrader. La liberté est garantie par des règles nées de l’expérience, fruits d’un processus historique d’essais et d’erreurs. Les règles de la liberté garantissent à tout être humain la vie, la liberté (au sens d’absence de coercition), la propriété.
Ainsi jaillit un « ordre spontané », ainsi défini par contraste avec les « ordres créés » par la volonté d’un monarque ou d’une oligarchie, despotes éclairés toujours désireux d’organiser la société rationnellement, scientifiquement (la présomption fatale comme le rappelle Hayek).
Vous me direz que Sarkozy, Juppé ou Macron n’auraient aucune chance d’être élus s’ils s’en tenaient à ces considérations, à ces principes.
C’est exact, mais les libéraux savent très bien qu’il est possible, même si c’est difficile, de transcrire ces principes dans la réalité des activités et des relations humaines : liberté économique (libre entreprise et libre échange), liberté politique (État de droit, subsidiarité), liberté sociétale (prééminence des choix personnels sur les mœurs publiques).
Il reste donc un long parcours à faire pour abandonner le monde et la mode des expédients pour revenir aux principes. Aidons-les à faire le parcours.
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