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Avant de couper des centaines de millions dans les services, est-ce qu’on peut avoir les services ? - Michel Beaudry

19 février, 2020

Faire plus avec moins : la condition du progrès économique

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« Faire plus avec moins ne marche nulle part ». Cette affirmation catégorique est assénée dans une tribune du Monde par plus de 140 collaborateurs de Radio France. Ces derniers s’inquiètent légitimement des suppressions de postes prévues dans le service public audiovisuel. L’argument est toutefois étrange. Il consiste à nier l’existence de la notion même de productivité, un concept auquel les contribuables qui financent Radio France sont quotidiennement astreints dans leur vie professionnelle.
Hasard du calendrier, cette tribune paraît un peu plus d’une semaine après l’étude de Mounir Mahjoubi sur la productivité d’Amazon. L’ancien secrétaire d’État au numérique déplorait, dans une publication aux accents luddismes, qu’Amazon fût une entreprise trop productive. « A chiffre d’affaires équivalent, ses entrepôts embauchent 2,2 fois moins de salaries que les commerçants traditionnels », peut-on lire dans le rapport du député de Paris.
Il est intéressant de se plonger dans le détail de l’étude de monsieur Mahjoubi. Si ses chiffres sont corrects, un emploi équivalent temps plein est associé à 600 000 euros de chiffre d’affaires chez Amazon contre 270 000 euros chez un commerçant traditionnel. L’étude va plus loin et estime qu’Amazon a détruit 7 900 emplois à l’échelle de « l’économie française » … Bien sûr, cette formulation relève de la mauvaise foi. Il serait plus judicieux de borner ces éventuelles pertes au commerce de détail. Car les gains de pouvoir d’achat qu’Amazon génère sont nécessairement réalloués dans d’autres secteurs par la consommation ou l’épargne.
Toujours est-il que l’exemple d’Amazon le montre parfaitement, il est tout à fait possible de faire plus avec moins.
Faire plus avec moins, impossible dans les services publics ?
Pour illustrer l’échec de la méthode qui consiste à faire plus avec moins, les auteurs de la tribune du Monde citent plusieurs exemples : l’hôpital, l’école, les transports, l’université ou les « lieux d’art ». Les comparaisons internationales suggèrent cependant que l’efficacité d’un service public n’est en rien corrélée à ses moyens budgétaires. Si l’on prend l’exemple de l’éducation, de nombreux pays semblent obtenir de meilleurs résultats en consommant moins de ressources.
Mais le secteur privé permet plus facilement de voir à quel point l’affirmation des auteurs de la tribune est fausse. Curieusement, les auteurs ne parlent pas des nombreux secteurs ayant connu d’importants gains de productivité ces dernières décennies. Prenons l’exemple d’une industrie comme l’agriculture. La population active agricole est pourtant passée de 6,2 millions de personnes en 1955 à 1,3 million de personnes en 2000. Entre temps, le volume de la production a doublé[1]. On aurait tout aussi bien pu prendre l’exemple des nombreux secteurs industriels qui ont su augmenter la production de richesses en réduisant leurs effectifs.
Il y a cependant un point commun entre les secteurs cités par les auteurs. La plupart d’entre eux sont monopolisés par l’administration et sont donc gérés par une classe de politiciens et de hauts fonctionnaires. Les auteurs touchent du doigt un véritable problème. Il est plus difficile pour les politiciens et les fonctionnaires d’allouer les facteurs de production de manière productive en raison de l’absence de signaux de prix, de concurrence, de profits et de pertes dans les secteurs gouvernementaux. Pour inciter ces secteurs à faire plus avec moins, il est donc nécessaire qu’ils soient complètement ouverts à la concurrence et privatisés.
Éloge de la productivité


Mais la productivité est-elle une fin en soi ? Elle permet en tout cas à l’humanité de satisfaire ses besoins au moindre coût et au moindre effort. En 1870, plus de 3000 heures de travail par an étaient nécessaires au travailleur moyen pour atteindre le niveau de vie du XIXe siècle. Aujourd’hui, 1500 heures de travail par an suffisent à atteindre le niveau de vie du XXIe siècle. Si nous voulons que ces progrès continuent, nous devons chérir la productivité et toutes les mesures qui permettent de la favoriser.

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