Faut-il se réjouir de la décision du gouvernement Couillard
de confier à la CDPQ (Caisse) le soin de financer et gérer deux projets d’infrastructures
de transport en commun?
A priori, l’idée semble intéressante. Je me suis dit que la
Caisse ne pouvait faire pire que l’AMT et le ministère des Transports. Il
suffit de se rappeler les fiascos du métro à Laval et du train de l’Est pour
s’en convaincre. C’est aussi une façon d’introduire un peu de concurrence dans
l’industrie du transport en commun. Qui sait ou cela pourrait nous mener?
La dette du Québec dépasse les limites du raisonnable. À
moins de la stabiliser et réduire le ratio dette/PIB, nous subirons tôt ou tard
une décote des agences de notation. Ce serait une catastrophe d’autant plus
dramatique que les frais d’intérêt gobent déjà 10 milliards de dollars du
budget annuel de la province. De plus, les taux d’intérêt sont appelés à
augmenter au cours de 2015. Il faut donc trouver une façon de financer des
infrastructures dont nous avons grandement besoin sans augmenter la dette
publique.
Bien sûr, nous pourrions nous en remettre aux partenariats
public-privé (PPP) pour financer et exploiter ces projets. Mais selon la
logique tordue des étatistes, la formule
des PPP est inacceptable, car cela permet à des entreprises privées de faire
des profits sur le dos des Québécois. Dans le cas de la Caisse, personne ne
s'opposera à ce que l'institution engrange des profits, puisque cet argent
servira à assurer nos retraites. Donc le modèle proposé permettrait de faire
taire les opposants habituels.
Dans l’immédiat, l’utilisation de la Caisse pour financer
des projets d’infrastructure servira bien les intérêts politiques. Les nouveaux
projets stimuleront l’économie à court terme et nous saurons seulement dans 5
ou 10 ans si les projets ont été un succès. Dans le cas contraire, ce sera le
problème des politiciens en place à ce moment-là. Ils pourront toujours se
déculpabiliser en blâmant les administrations antérieures comme ils le font à
chaque élection.
Malheureusement, les politiciens ne résisteront pas à
l’envie d’utiliser la Caisse pour promouvoir des projets électoralement
rentables même si ceux-ci sont très risqués. La Caisse n’est pas à l’abri des
pressions politiques, bien au contraire. Comme dit l’adage : les occasions
font le larron. Nous avons plus que notre part de larrons, la commission
Charbonneau nous la brutalement rappelé, et des occasions il y en aura.
Le cas d’Hydro-Québec démontre qu’aucune entreprise étatique
n’est à l’abri d’interventions politiques à des fins électoralistes. Hydro est l’instrument
privilégié des politiciens, tous partis confondus, pour subventionner les
industries grandes consommatrices d’électricité en leur fournissant de
l’électricité à rabais. Ces subventions coûtent des centaines de millions aux
consommateurs québécois. Hydro est aussi un véhicule privilégié des politiciens
pour amadouer le mouvement écologiste.
C’est ainsi qu’Hydro finance des parcs d’éoliennes qui produisent de l’électricité
au coût de 10¢ le kWh revendu aux Américains 4¢ le kWh. Le résultat se traduit
par des pertes de centaines de millions de dollars de revenu pour le Conseil du
Trésor. Et que dire des dizaines de millions en commandites imposées à Hydro-Québec
pour subventionner les projets fétiches des ministres.
Le modèle proposé par le gouvernement Couillard est un PPP à
l’image du modèle québécois dont la seule qualité est de le rendre plus
attrayant aux yeux des critiques étatistes. À mon avis, cet avantage a bien peu
de poids par rapport aux risques inhérents qui en découlent. Il est évident que
les politiciens ne pourront résister à l’envie d’utiliser la Caisse à des fins
électoralistes. Ils le font avec Hydro-Québec, la SAQ, Loto Québec et
Investissement Québec. Comment la Caisse serait-elle protégée de ce vice
inhérent au modèle? De plus, les
dirigeants de la Caisse seront pris au piège entre les intérêts contradictoires
des usagers et ceux des épargnants. Ne seront-ils pas tentés de négocier des
augmentations de cotisation aux régimes de retraite pour compenser le manque à
gagner d’un projet qui a mal tourné? Soyez-en assuré.
J’aimerais rappeler que la mission fondamentale de la Caisse
est de faire fructifier les milliards d’actif des régimes de retraite des
Québécois. Cela comporte suffisamment de risques et de défis sans en beurrer une
autre couche.
Il existe déjà un modèle d’affaires qui permet à la Caisse
de financer les projets d’infrastructure québécois. Ce modèle est le
partenariat public-privé (PPP). Les succès du pont de l’autoroute 25 et de
l’autoroute 30 sont des exemples concrets de la pertinence et de l’efficacité
des PPP. Si la Caisse juge que sa participation financière aux projets
d’infrastructures québécois contribuera à sa rentabilité, rien ne l’y empêche.
Elle n’a qu’à participer comme partenaire financier aux PPP intéressés à nos
projets Il n’est donc pas utile de créer
un nouveau véhicule pour y arriver. Comme disent les péquistes, nous éviterons
ainsi tous les risques inhérents de cette « patente à gosse ».
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