Depuis le début, le magazine nagg dénonce la déresponsabilisation des Québécois en tout. Donc, je ne peux qu’applaudir l’excellent texte de Marc Dallaire qui fait un lien entre décrochage scolaire et la déresponsabilisation des élèves et des parents.
D’où origine la déresponsabilisation systématique des Québécois?
Ce phénomène est apparu à la fin de la révolution tranquille. Il coïncide avec l’apparition de l’État nounou et de la gratuité. Un jour, il faudra bien l’admettre et s’attaquer résolument à ce problème. Malheureusement, je crains qu’il faudra tomber beaucoup plus creux avant de se réveiller.
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Publié le 03 avril 2009
Chers élèves, accrochez-vous!
J'enseigne depuis 23 ans à des élèves qui se destinent au secteur agricole. Avec le temps, j'ai vu passer plusieurs cohortes... et j'ai constaté un changement dans leur attitude. Il est malheureusement le reflet des changements dans notre société, non seulement entre ma génération et celle de mes élèves actuels, mais aussi depuis mes débuts en enseignement jusqu'à maintenant.
Les différents intervenants soutiennent qu'il faut renforcer le soutien aux élèves afin que nos chers enfants ne soient pas en proie au décrochage (comme si c'était une maladie contagieuse, inévitable). Il faut des professeurs qui ont le talent de motiver nos élèves tentés par le décrochage, parce qu'on est «tenté» par le décrochage! Il faut aussi cibler les parents. L'idée maîtresse, ici, est pour tout ce monde de tresser un filet de sécurité autour de l'élève afin d'éviter qu'il ne décroche. C'est malheureusement là que je débarque de l'équation.
Dans un cours de pédagogie de base, on apprend tout de suite qu'on ne motive pas un élève. Cette motivation doit être intrinsèque. On peut l'aider à l'identifier, mais on ne la crée pas.
L'élève doit se motiver lui-même. On appelle cela être responsable.
Selon moi, le décrochage doit être centré sur l'élève lui-même. Il faut se souvenir de deux concepts qui n'ont plus vraiment cours aujourd'hui: le sens de l'effort et le sens du sacrifice. Le sens de l'effort, qui sous-entend que pour bâtir son avenir, il faut travailler, bûcher, et encore travailler. Et dans l'effort vient aussi la contrariété, celle de ne pas comprendre tout de suite, et par conséquent de ne pas pouvoir faire ce que l'on veut, quand on le veut. Faire ce que l'on veut, ça c'est la vraie vie... Et la contrariété, ce n'est pas ce qu'a vécu l'enfant-roi depuis qu'il est au monde...
L'école n'est pas un lieu d'amusement, mais un lieu de travail où pour avancer, il faut faire des efforts sur une base constante. Pas facile!
Quand j'ai commencé à enseigner, je donnais des travaux aux élèves et ils les faisaient, point à la ligne. Aujourd'hui, c'est toujours trop, trop long, trop difficile, trop fastidieux. Le sens de l'effort est à la mesure de la facilité dans laquelle l'enfant-roi a été élevé. Le sens du sacrifice: horreur et synonyme d'une autre époque. Cela signifie que l'élève doit sacrifier certaines choses maintenant afin de préparer son avenir. Sacrifier du temps, des activités et des objets de consommation.
Mais pour étudier, bien étudier surtout, il faut une voiture, ou encore un téléphone cellulaire (pas le modèle de base non plus), avec un lecteur MP3, et j'en passe... Pas pour demain, pour aujourd'hui, maintenant.
Alors, l'élève s'investit dans tout, sauf dans ses études. Un jour, il n'est plus capable de suivre. Les élèves qui décrochent sont parfois à l'école un peu en mode touriste, comme dans un forfait tout inclus. Mais il y a aussi des élèves qui préparent leur avenir.
La différence entre les décrocheurs et les autres (car il y a aussi les autres!)? Les autres s'accrochent! Quand l'école pèse lourd et que la matière est compliquée, ils travaillent. Ils s'accrochent. Ils prennent la responsabilité de leur formation, de leur avenir et ultimement de leur vie. Un petit contrat pour ma génération qui méritait ses privilèges en gagnant des responsabilités. Un gros contrat pour la génération présente qui a eu tous les privilèges, sans jamais recevoir la partie «plate», les responsabilités.
La recette contre votre petit décrochage à vous, cher élève, est fort simple. Quand c'est difficile et qu'il faut travailler... Travaillez! Quand votre job de fin de semaine bouffe trop de temps, il faut réduire. Je vous dis ce que personne ne vous dira, car cela va vous contrarier. Travaillez, suez, peinez, ragez même... mais accrochez-vous. Montrez-moi que vous avez du coeur au ventre.
Au risque de simplifier la situation: On ne décroche pas, tant et aussi longtemps qu'on s'accroche!
Marc Dallaire
L'auteur est professeur en amélioration animale, anatomie et physiologie animales et production avicole à l'Institut de technologie agro-alimentaire de Saint-Hyacinthe.
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