À ma grande surprise, rien n’a changé. Je montrais alors que sur plusieurs points, la situation de l’environnement s’améliorait. Mais de 70 % à 80 % des gens sont persuadés du contraire, parce que les bonnes nouvelles ne se retrouvent pas à la une des journaux. À Londres, où je vis, l’air n’a jamais été aussi pur. Il faut remonter au Moyen Âge pour voir moins de pollution. Même des pays moins riches comme la Chine, le Mexique ou le Chili commencent à avoir assez de ressources pour lutter contre la pollution urbaine. L’énergie solaire et les voitures électriques sont sur le point de devenir concurrentielles avec la combustion des hydrocarbures. Et chaque jour depuis 25 ans, 137 000 personnes en moyenne franchissent le seuil de la pauvreté extrême, qui est maintenant de 1,90 $US par jour. Il ne faut pas oublier que parler de l’environnement, c’est parler de qualité de vie, donc aussi de pauvreté.
Le seul point négatif, c’est la pollution intérieure causée par la cuisson au charbon et à la biomasse. Plus de 4,3 millions de personnes en meurent chaque année, une diminution très faible par rapport à 1990, où on était à 6 millions par an. Le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) calculait qu’en limitant le réchauffement de la planète à 1,5 °C plutôt que 2 °C [par rapport aux niveaux préindustriels], on sauverait 150 millions de vies d’ici 2100. C’est deux fois moins que le nombre de victimes de la cuisson au charbon et à la biomasse. Et pourtant, on parle beaucoup plus du 1,5 °C que de la cuisson au charbon.
Le CO2 émis par la combustion des carburants fossiles est un sous-produit de l’enrichissement des sociétés. Au départ, on améliore ses repas, on éduque ses enfants, on traite les maladies infectieuses, puis on s’intéresse à la toux causée par la pollution urbaine. Et un jour, on est assez riche pour acheter une voiture électrique et s’inquiéter des changements climatiques. On va régler le problème du réchauffement de la planète, mais ce ne sera pas facile ni gratuit. Il faut évaluer nos priorités. Le Consensus de Copenhague, un groupe d’économistes que j’ai fondé pour évaluer le coût des grands problèmes du monde et de leurs solutions, place les changements climatiques assez bas sur la liste.
[Rires] C’est un excellent exemple de vœux pieux et du peu d’utilité des luttes politiques sur les débats scientifiques. Si vous lisez ce rapport, il est facile de comprendre que ce ne sera pas possible et que même limiter la hausse à 2 °C sera très, très difficile. Ça ne peut fonctionner que si on imagine que des technologies actuellement inconnues vont dominer le monde d’ici quelques décennies, démanteler le modèle de développement économique en vigueur depuis 200 à 300 ans. Et même avec cette baguette magique, il faudra probablement retirer de l’atmosphère une énorme quantité de gaz à effet de serre à un coût pharaonique. Ce sont les mêmes tirades politiques qu’avec le sommet de Rio en 1992 et le protocole de Kyoto en 1997.
RETOMBÉES LIÉES AUX INVESTISSEMENTS
60 $ par dollar investi : bénéfice de l’amélioration de la vaccination dans les pays pauvres
45 $ par dollar investi : bénéfice de la diminution de la malnutrition infantile
33 $ par dollar investi : amélioration de l’accès aux prématernelles en Afrique subsaharienne
17 $ par dollar investi : amélioration de la couverture d’internet mobile dans les pays pauvres
15 $ par dollar investi : diminution des subventions aux carburants fossiles
15 $ par dollar investi : remplacement de la cuisson au charbon et à la biomasse par un carburant plus propre
Source : Consensus de Copenhague
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