La mondialisation offre de plus en plus de choix aux professionnels, entrepreneurs et investisseurs qui désirent immigrer pour améliorer leur sort et celui de leur famille. Malheureusement, le Québec est peu attrayant pour ces immigrés de choix. Les causes de cet état de fait sont les mêmes que celles qui handicapent la croissance de l’économie québécoise : un taux de fiscalisation très élevé, un état providence inefficace, des centrales syndicales et des Ordres professionnelles dédiés à protéger le statu quo, une culture suspicieuse du succès, etc.
Cyberpresse, le mercredi 15 août 2007
Les mouches et le vinaigre
Yann Takvorian
Le Québec connaît un déficit migratoire par rapport aux autres provinces canadiennes simplement parce qu’il a du mal à attirer autant qu’à conserver ses immigrés. Il ne s’agit pas seulement de faire venir des étrangers sur de fausses représentations, il faut leur donner envie de rester. Or, ce qui fait rester un immigrant, c’est la plus-value sur sa vie en général.
Un immigrant d’un pays pauvre pourra trouver une plus-value en arrivant au Québec. Mais il l’augmentera à peu de frais en s’installant en Ontario ou en Alberta. D’ailleurs, ces deux provinces combinées raflent le plus gros de toute l’immigration canadienne. L’immigrant n’a aucun état d’âme et se fiche de l’identité culturelle du Québec, son combat identitaire et verra même dans le séparatisme un frein plutôt qu’un attrait.
Le Québec a-t-il une économie qui prospère ? On le voit mal et encore moins en région quand des pans entiers de son économie tombent et que des villes éloignées ferment. La province a-t-elle une fiscalité attrayante ? Avec un des plus haut taux de taxation du continent, jumelé à des salaires plutôt faibles et un coût de la vie sans cesse à la hausse, on ne le pense pas. La « Belle Province » a-t-elle des atouts particuliers ? Pas vraiment avec un système de santé très dégradé, des routes tiers-mondistes, des infrastructures en ruine, un système d’éducation nivelé par le bas, le plus haut taux de syndicalisme en Amérique, des ordres professionnels sectaires, un marché de l’emploi protectionniste, des querelles linguistiques, etc. Quant aux attraits, parce qu’ils existent, ils sont en compétition féroce avec ceux des autres provinces canadiennes.
Il ne s’agit pas seulement de donner des points à des compétences qui seront sous-utilisées ou bien ignorées en région. L’immigrant viendra puis rebondira ailleurs ou rentrera déçu. Et si un immigrant content le dira à une personne, un immigrant déçu racontera son histoire à 10 ! Le Québec a perdu des plumes avec sa politique d’immigration qui a floué beaucoup de monde, principalement en France et au Maghreb.
Depuis le 11 septembre
L’immigration de langue française ne pourra pas augmenter au Québec pour des raisons évidentes. Depuis les attentats, le racisme anti-arabe y est très présent. Or, l’Afrique du Nord est un bon bassin de travailleurs francophones. L’immigration des Français de France serait un choix presque naturel pour le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles. Or, l’a-priori du « maudit-Français » et le déficit de plus-value entre l’Europe et le Québec ne sont pas pour l’encourager. Il reste l’Amérique du Sud, l’Afrique et la Chine. Mais pourquoi voulez-vous que ces immigrants piétinent professionnellement plusieurs années pour apprendre une langue aussi difficile que le français alors que la maîtrise de l’anglais leur ouvrirait les portes de la plus grande partie du Canada et, éventuellement, des États-Unis ?
Que proposer ? Il n’y a pas de solution magique et Mario Dumont à certainement raison. La démographie ne se corrige qu’avec le temps. On ne peut pas non plus forcer les gens à choisir un pays. Un projet de vie, ça ne se vend pas. Je pense que le Québec aura à payer pour ses non-choix politiques et son laisser-aller financier des dernières décennies ; il n’y a pas de camouflage possible. Ce n’est pas aux immigrants d’assumer les excès de l’État providence moribond d’aujourd’hui. Une telle facture ne se partage ni ne se refile.
Immigrer, c’est vouloir mieux ; c’est vouloir du soleil pour soi et ses enfants. Personne ne choisira la pluie et la glace sciemment. On pourra tromper certains sur la destination, mais on ne peut pas tromper tout le monde, tout le temps. Et c’est un ancien immigrant au Québec revenu au soleil de la Provence qui vous le dit.
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