Un chausson avec ça ?
Le Journal de Montréal, p. 26 / Nathalie Elgrably, 10 mai 2007
Les chaînes de restauration rapide sont décidément parmi les mal-aimées de notre société. Elles faisaient encore la manchette cette semaine parce qu'elles s'installent souvent à proximité des écoles.
Il n'en a pas fallu davantage pour que des diététistes et des représentants de divers organismes, telle la Coalition québécoise sur la problématique du poids, déclarent qu'il faut contrôler l'environnement des écoles en révisant les règlements de zonage pour interdire aux fast-foods de côtoyer les établissements scolaires. Quelle idée géniale !
Mais pourquoi se limiter à contrôler la présence de restaurants ? Ne faudrait-il pas également interdire les pâtisseries ? Après tout, un morceau de gâteau au fromage contient autant de calories qu'un Big Mac. On pourrait également interdire aux dépanneurs de vendre des barres de chocolat et des chips aux mineurs. Idéalement, on construirait les écoles au sommet des montagnes afin d'éviter aux étudiants de succomber aux tentations. Et pour vraiment gagner la guerre contre l'obésité, nous pourrions interdire aux familles avec enfants de posséder téléviseurs, Playstations,... Et pourquoi ne pas également forcer les enfants à marcher en leur interdisant l'accès aux autobus s'ils résident à moins de 3 km de leur école ?
Et la responsabilité individuelle ?
Ces propositions vous semblent ridicules ? Vous avez raison ! Ce ne sont pas les aliments qui posent problème, ce sont les habitudes alimentaires ! Tous les aliments, même l'eau, peuvent devenir toxiques s'ils sont consommés en grande quantité. Va-t-on se mettre à tout contrôler ? Souhaitons-nous vraiment qu'un petit groupe de bien-pensants nous impose ses choix alimentaires et que l'État se mêle du contenu de notre assiette ?
Ce qui est totalement évacué du débat actuel est la notion de responsabilité individuelle et parentale. On crée un monde de victimes, on déresponsabilise l'individu et on l'infantilise. À écouter la milice anti-malbouffe, on pourrait croire que les fast-foods nous gavent contre notre volonté. Or, nul n'est obligé d'entrer dans une chaîne de restauration rapide, de commander et de manger. Et puis, n'y a t-il pas également des salades au menu de McDonald's ?
Nous avons le contrôle sur ce que nous ingérons et nous disposons de tant d'information qu'il faudrait habiter dans une grotte pour ignorer les choix santé. Quant aux parents, ils sont également responsables du tour de taille de leur progéniture. Après tout, qui donne aux ados l'argent nécessaire pour qu'ils achètent leurs frites ?
S'il y a des jeunes qui fréquentent quotidiennement les fast-foods, c'est que leurs parents approuvent leurs choix. Cessons donc de diaboliser les commerces, car aucun restaurateur sensé n'irait s'installer à côté d'une école si les jeunes apportaient leurs lunchs ou si leurs parents ne leur laissaient d'autre choix que d'opter pour le plat santé offert à la cafétéria.
Pas un problème de société
La surcharge pondérale n'est pas un problème de société, c'est un problème individuel et il faut le traiter comme tel. Si nous admettons que nous pouvons choisir de changer nos habitudes alimentaires et de faire de l'exercice, il faut également accepter que certains puissent choisir délibérément de manger une grande portion de frites.
Il faut aussi accepter que la vaste majorité des gens consomment de la malbouffe avec modération. Or, si on modifie le zonage, c'est toute la population d'une région qui est touchée. Est-il donc raisonnable de restreindre les choix alimentaires d'individus responsables sous prétexte que certains se livrent à des abus? Finalement, enseigner aux jeunes à être responsables de ce qu'ils mangent, cela fait aussi partie de l'éducation !
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Nathalie Elgrably est économiste à l'Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.
Le Journal de Montréal, p. 26 / Nathalie Elgrably, 10 mai 2007
Les chaînes de restauration rapide sont décidément parmi les mal-aimées de notre société. Elles faisaient encore la manchette cette semaine parce qu'elles s'installent souvent à proximité des écoles.
Il n'en a pas fallu davantage pour que des diététistes et des représentants de divers organismes, telle la Coalition québécoise sur la problématique du poids, déclarent qu'il faut contrôler l'environnement des écoles en révisant les règlements de zonage pour interdire aux fast-foods de côtoyer les établissements scolaires. Quelle idée géniale !
Mais pourquoi se limiter à contrôler la présence de restaurants ? Ne faudrait-il pas également interdire les pâtisseries ? Après tout, un morceau de gâteau au fromage contient autant de calories qu'un Big Mac. On pourrait également interdire aux dépanneurs de vendre des barres de chocolat et des chips aux mineurs. Idéalement, on construirait les écoles au sommet des montagnes afin d'éviter aux étudiants de succomber aux tentations. Et pour vraiment gagner la guerre contre l'obésité, nous pourrions interdire aux familles avec enfants de posséder téléviseurs, Playstations,... Et pourquoi ne pas également forcer les enfants à marcher en leur interdisant l'accès aux autobus s'ils résident à moins de 3 km de leur école ?
Et la responsabilité individuelle ?
Ces propositions vous semblent ridicules ? Vous avez raison ! Ce ne sont pas les aliments qui posent problème, ce sont les habitudes alimentaires ! Tous les aliments, même l'eau, peuvent devenir toxiques s'ils sont consommés en grande quantité. Va-t-on se mettre à tout contrôler ? Souhaitons-nous vraiment qu'un petit groupe de bien-pensants nous impose ses choix alimentaires et que l'État se mêle du contenu de notre assiette ?
Ce qui est totalement évacué du débat actuel est la notion de responsabilité individuelle et parentale. On crée un monde de victimes, on déresponsabilise l'individu et on l'infantilise. À écouter la milice anti-malbouffe, on pourrait croire que les fast-foods nous gavent contre notre volonté. Or, nul n'est obligé d'entrer dans une chaîne de restauration rapide, de commander et de manger. Et puis, n'y a t-il pas également des salades au menu de McDonald's ?
Nous avons le contrôle sur ce que nous ingérons et nous disposons de tant d'information qu'il faudrait habiter dans une grotte pour ignorer les choix santé. Quant aux parents, ils sont également responsables du tour de taille de leur progéniture. Après tout, qui donne aux ados l'argent nécessaire pour qu'ils achètent leurs frites ?
S'il y a des jeunes qui fréquentent quotidiennement les fast-foods, c'est que leurs parents approuvent leurs choix. Cessons donc de diaboliser les commerces, car aucun restaurateur sensé n'irait s'installer à côté d'une école si les jeunes apportaient leurs lunchs ou si leurs parents ne leur laissaient d'autre choix que d'opter pour le plat santé offert à la cafétéria.
Pas un problème de société
La surcharge pondérale n'est pas un problème de société, c'est un problème individuel et il faut le traiter comme tel. Si nous admettons que nous pouvons choisir de changer nos habitudes alimentaires et de faire de l'exercice, il faut également accepter que certains puissent choisir délibérément de manger une grande portion de frites.
Il faut aussi accepter que la vaste majorité des gens consomment de la malbouffe avec modération. Or, si on modifie le zonage, c'est toute la population d'une région qui est touchée. Est-il donc raisonnable de restreindre les choix alimentaires d'individus responsables sous prétexte que certains se livrent à des abus? Finalement, enseigner aux jeunes à être responsables de ce qu'ils mangent, cela fait aussi partie de l'éducation !
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Nathalie Elgrably est économiste à l'Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.
1 commentaire:
Le gouvernement aurait dû imposer plus d'éducation physique au lieu de s'attaquer à la malbouffe...
Il faut surtout pour les gars dépenser cette énergie...
Publier un commentaire