Québec compte accueillir 55 000 nouveaux arrivants (immigrants et réfugiés) par année à compter de 2010, soit 10 000 de plus qu’à l’heure actuelle et 2 fois plus qu'il y a 10 ans. Bien qu’il s’agisse d’un taux (arrivants/population) plus faible que la moyenne canadienne, il n’en constitue pas moins un des plus élevé au monde. Toute proportion égale, c’est quelque 2,3 fois plus de nouveaux arrivants qu'en France et quelque 2 fois plus qu'aux États-Unis en excluant les «illégaux».
On évoque le besoin de travailleurs, le déclin démographique et le poids relatif du Québec au sein du Canada pour justifier cet objectif. Dans le but de l’atteindre, on consacrera plus d’argent aux services d’accueil et à la promotion du Québec à l’étranger. N’est-il pas paradoxal de promouvoir un «pays» à la manière d’une marque de savon? Les États-Unis, par exemple, ont-ils besoin de dépenser autant, toute proportion égale, en publicité et en services d’accueil pour ses nouveaux arrivants? Ne pourrait-on pas laisser aux forces du marché le soin de les servir?
Une perspective erronée
On dit que le Québec a besoin de travailleurs, mais depuis des décennies on enregistre presque toujours le pire taux de chômage au Canada, à l’exception des provinces maritimes, et le nombre de prestataires d'aide sociale est toujours plus important au Québec qu'en Ontario, où la population est pourtant 65% plus élevée (12.7M vs 7.7M). On peut toujours dire qu’on a besoin de travailleurs, mais ce n’est pas par manque d’individus aptes à l’emploi. C’est qu’il coûte cher de payer des gens à ne rien faire et plus cher encore à payer ceux qui travaillent à alourdir la législation et la réglementation, accroître les «programmes sociaux», les impôts et les taxes. L’omniprésence de l’État, des syndicats et des corporations professionnelles constitue un coût énorme à l’emploi et à la création de richesse.
L'immigrant au Québec se retrouve davantage au chômage et à l'aide sociale qu’ailleurs au Canada non pas parce que le québécois est raciste ou xénophobe, mais parce que l’État l’étouffe. L’État a non seulement une mainmise sur plusieurs secteurs d’activités, mais il octroie aux syndicats, aux corporations professionnelles et aux organismes sans but lucratif un pouvoir qui ne se retrouve pas ailleurs en Amérique du Nord. Ce pouvoir provient de subventions et de réglementations qui excluent la concurrence. Il est difficile de réaliser que ces organisations et ces pratiques nuisent davantage aux travailleurs qu’elles ne leur aident, car à l’instar du gouvernement, elles ne cherchent pas à nuire délibérément. Leur nuisance est intrinsèque au pouvoir et aux privilèges qui leur sont octroyés sur la base erronée qu’elles sont ou bien nécessaires ou bien améliorent les mécanismes de marché.
En protégeant les syndicats et les corporations professionnelles de la concurrence, ces organisations nuisent aux consommateurs, aux travailleurs et, à terme, à elles-mêmes. Si les nouveaux arrivants possèdent une expertise, ils ne pourront pas la mettre en pratique rapidement, soit parce que les techniques et les normes d’ici sont différentes, soit parce qu’ils n’ont pas leur permis, leur licence, ou ne sont pas membres de l’Ordre de leur profession. Un retour aux études est alors envisagé et puisque plusieurs ne maîtrisent pas les deux langues d’usage, cela implique une francisation ou une anglicisation préalable. En effet, les immigrants au Québec s’établissent majoritairement à Montréal où la réalité de l’emploi, pour plusieurs secteurs d’activités, exige le bilinguisme, français et anglais.
Plusieurs immigrants sont bernés par les fonctionnaires canadiens et québécois qui leur laissent entendre que ce sera facile pour eux ici étant donné qu’ils parlent français et possèdent de «gros» diplômes. La réalité est tout autre. L’employeur nord-américain ne veut pas savoir si l’individu a de gros diplômes, mais s’il connaît son entreprise, ses machines, ses instruments, sa clientèle, etc. Si un individu présente son «gros» diplôme à un employeur d’un secteur d’activité peu rémunéré, dans l’idée que ce sera plus facile ainsi d’obtenir un emploi, il risque de déchanter rapidement car l’employeur présumera, avec raison, qu’un individu aussi bien diplômé ne pourra se satisfaire longtemps de ce qu’il a à offrir. L’immigrant, comme tout chercheur d’emploi, doit adapter son curriculum vitae au poste convoité.
Savoir «se vendre» est un aspect important de la recherche d’emploi. On ne vend pas ce qu’on a fait de mieux dans la vie, on vend ce qu’on a fait de mieux pour l’employeur convoité. C’est très différent. On doit aussi être conscient que, dans le secteur privé, la vaste majorité des emplois disponibles ne sont jamais affichés nulle part. Par conséquent, on doit être un peu détective pour les trouver. On s’informe et on tente sa chance. Dans ce secteur, les diplômes ont généralement moins d’importance que dans le secteur public, à moins d’être très réglementé par le gouvernement via les encouragements des corporations professionnelles. Malheureusement, il s’agit d’une réalité de plus en plus présente.
Dans le secteur public, on ne peut pas «aller à la pêche», car l’emploi disponible doit être affiché. Dans ce secteur, et particulièrement au sein des systèmes judiciaire, d’éducation et de santé, pratiquement les seuls diplômes qui aient une valeur d’échange sont ceux complétés au Canada. Pour compenser cette rigidité, le secteur public favorise l’embauche d’immigrants et de «minorités visibles». Évidemment, lorsque le gouvernement pratique de la discrimination, il la qualifie de positive. Il attribue les préjugés, ou la «sale» discrimination, au secteur privé. C’est non seulement erroné, mais blâmable, car cela conduit à la division sociale.
Face à tous ces obstacles, plusieurs immigrants se réorientent dans un domaine qu’ils n’avaient pas envisagé, ou ils végètent à l’aide sociale. Ce n’est pas parce que le gouvernement ne leur vient pas en aide, car ils en reçoivent beaucoup, pour ne pas dire trop : aide sociale, allocation familiale, francisation, formations d’appoint, générale et professionnelle, allocation d’étude, frais de garderie, service d’orientation, club de recherche d’emploi, subvention salariale, supplément de retour au travail, etc. De plus, toute cette aide leur est offerte gratuitement, mais elle ne diffère guère de celle offerte aux autres québécois, si ce n’est pour la francisation, et encore!
Sous le prétexte de mieux intégrer les immigrants et les diverses communautés «culturelles», le gouvernement subventionne également une multitude d’organismes soi-disant représentatifs des Noirs, Haïtiens, Chinois, Vietnamiens, Latino-américains, etc. Étant donné que le gouvernement adore la discrimination, il subventionne également une panoplie de centres de recherche d’emploi pour immigrants, minorités visibles, femmes, femmes de 45 ans et plus, mères monoparentales, etc. Il ne s’agit donc pas tant d’«accommodements raisonnables» pour immigrants et groupes minoritaires que d’accommodements déraisonnables pour organismes sans but lucratif qui prétendent mieux servir les consommateurs avec l’argent d’autrui. De manière générale, toute subvention gouvernementale est déraisonnable puisque le contribuable n’a pas le choix de la payer, n’en a aucun contrôle et n’en est pas nécessairement bénéficiaire. On ne doit donc pas se surprendre qu’un État qui subventionne tout ce qui bouge, qui demande licence et permis pour n’importe quoi et qui a le nez partout fasse appel à du renfort.
L’idée sous-jacente au «besoin» d’immigrants est le déclin démographique. Or, pourquoi avoir peur d’un tel déclin? D’abord, on ne peut présumer que ce déclin soit permanent, ensuite, et plus important, la richesse d’une population ne dépend pas uniquement de sa quantité. Beaucoup de pays sont pauvres et populeux et, à l’inverse, d’autres sont riches et peu nombreux. Invoquer l’immigration pour maintenir un «niveau de vie» ne tient pas la route. La quantité d’individus peut jouer un rôle dans le degré de richesse d’une population, mais elle n’est pas déterminante. C’est le respect ou non du principe de propriété qui est déterminant. Plus celui-ci sera respecté, plus le nombre d’individus à l’intérieur d’un pays ou d’un territoire tendra à augmenter la richesse des individus qui s’y trouvent. Dans le cas contraire, un nombre plus grand d’individus non seulement n’augmente pas la richesse, mais a de fortes chances de la réduire.
Dès lors qu’on aide un individu en soutirant l’argent d’autrui, légalement ou non, on réduit nécessairement l’aide que ces derniers avaient peut-être envisagée. Tous les gouvernants du monde agissent ainsi sous le prétexte qu’ils sont plus aptes que les autres à déterminer le bien de tous au prix d’un «petit mal» pour quelques-uns. On utilise le même processus en démocratie, à cette exception près qu’on invite les individus à s’affronter entre eux pour leur faire croire que la légitimité réside dans la participation. «Je veux tel service de la part du gouvernement», ce qui sous-entend : «je veux qu’on taxe et impose tel et tel groupes afin d’être servi». La démocratie est la loi de la majorité, c’est-à-dire du nombre et par conséquent de la force. Les freins aux excès démocratiques, soit les droits individuels, sont mis de côté, car le droit le plus important, celui qui leur a donné naissance et leur permet d’exister, le droit et principe de propriété, est de plus en plus bafoué.
Le gouvernement québécois n’aurait nullement besoin de recruter, voire racoler, les étrangers et de subvenir aux services d’accueil s’il respectait davantage la propriété de chacun, car tout le monde en bénéficierait, y compris les nouveaux arrivants. Les gens immigrent pour améliorer leur sort et s’adaptent à la majorité par leurs propres moyens, car c’est dans leur intérêt. À force d’offrir aux uns et aux autres des services «gratuits», une population se dégrade si ce n’est en nombre, au moins en qualité, car tout le monde finit par vouloir vivre aux dépens de tout le monde. L’immigrant, comme tout individu, doit apprendre à se méfier des gouvernements, tous les gouvernements, particulièrement lorsque leur aide se veut abondante.
Le problème du Québec au sein du Canada n’en est pas un de poids démographique ou de langue d’usage, mais d’interventionnisme gouvernemental. Que Québec cesse de contrôler tous les secteurs d’activités, de donner du pouvoir aux syndicats et aux corporations professionnelles, de créer des programmes sociaux, de légiférer, réglementer, imposer et taxer, alors les immigrants s’établiront ici sans qu’on ait besoin de les racoler. Ils viendront pour s’enrichir et par la force des choses apprendront le français, l’anglais et tout ce qui leur est utile à cette fin, et cela, à leur frais. Au contraire, plus l’État intervient dans les secteurs d’activités, plus il sera appelé à recruter des immigrants à fort prix étant donné les faibles perspectives économiques que son interventionnisme engendre.
Dans une économie qui stagne, voire s’appauvrit, la venue de nouveaux arrivants risque de créer plus de maux qu’elle n’en résolve. La Commission Bouchard-Taylor, sur les accommodements raisonnables, en donne un avant-goût. Par exemple, un intervenant demandait à certains immigrants de cesser leur «aplaventrisme» face à leur religion. Plutôt que de le rabrouer il eut peut-être été plus utile de le relancer en l’invitant, lui et le monde en général, à cesser leur aplaventrisme face à l’État.
Québec, comme plusieurs «pays d’accueil», voit en
l’immigrant une vache à lait pour maintenir ses programmes sociaux. Or,
celui-ci risque de n’être d’aucune aide à cet égard, car ce sont justement ces
services contrôlés par l’État, ou plus généralement son interventionnisme, qui
constituent la source de stagnation économique. En d’autres mots, il n’y
a pas de problème de main-d’œuvre au Québec, mais de gestion
bureaucratique. Tous les services pourraient et devraient être assumés
par une gestion privée axée sur le profit, car elle seule respecte la propriété
d’autrui et est conséquemment créatrice de richesse. Nul besoin de
racoler l’immigrant et de dépenser une fortune pour l’accueillir, il va là où
est la richesse et la sécurité et apprend la langue d’usage sans-façon.
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