André Dorais
Les dépenses gouvernementales, en démocratie, représentent 20% à 30% du PIB, mais les impôts et les taxes payés par les contribuables sont deux fois ce pourcentage. Et il n’est pas exagéré de dire que la «chose publique» occupe 80% des nouvelles. Est-ce parce qu’on aime à ce point la politique ou parce qu’on se fait subtilement endoctriner? Pas une semaine ne se passe sans l’annonce d’une nouvelle politique, d’un financement d’urgence, d’une taxe ou d’un règlement additionnel. Quatre exemples, récents et succincts, indiquent qu’il s’agit d’endoctrinement via l’attribution d’une légitimité et d’une efficacité à une pratique politique qui ne constitue ni l’une, ni l’autre.
Politique d’achat local
La semaine dernière le gouvernement québécois annonçait sa nouvelle politique d’«achat local» en matière d’aliments. Le gouvernement considère que les consommateurs n’ont pas de jugement, qu’ils mangent mal, qu’ils ne mangent pas assez «local» et pas assez «cher». Pour changer ces vilaines habitudes, le gouvernement juge bon de consacrer quelques millions de dollars, soutirés aux contribuables, pour bien identifier les produits d’ici. Il fait le pari que, ayant maintenant moins d’argent dans leurs poches, les consommateurs vont dépenser davantage en tourtières de grand-maman et en bleuets du Lac Saint-Jean…
Pour le gouvernement québécois, comme pour tous les gouvernements, dépenser plus en produits «locaux» équivaut à créer, ici, de l’emploi et de la richesse. Si ce n’était de son pouvoir coercitif d’imposition et de taxation, il y a longtemps qu’agissant ainsi le gouvernement serait en faillite. Le gouvernement n’éduque pas le peuple en l’incitant à acheter «national», au contraire, il étale au grand jour son ignorance économique. Son désir d’être vu et entendu l’emporte sur la cohérence de ses actions et puisque ni les médias, ni les partis d’opposition ne voient les conséquences de ce «nationalisme alimentaire», soit un appauvrissement des consommateurs, on ne présente que les bénéficiaires de sa discrimination. Or les québécois sont capables d’effectuer leurs propres choix et d’encourager les «leurs» sans cette aide à double tranchant. Ils s’aideront d’autant plus qu’ils seront moins détroussés par «leur» gouvernement.
Hausse du salaire minimum
Le gouvernement a pris l’habitude de faire coïncider la hausse du salaire minimum avec la «fête des travailleurs», le premier mai, tout en l’annonçant quelques jours avant Noël. Cela marque bien l’idée qu’il s’agit d’un cadeau du gouvernement et que, sans lui, les travailleurs n’en recevraient pas. Or, comme tous contrôles des prix (le salaire est d’abord un prix), il s’ensuit des effets indésirables pour tout le monde, y compris les bénéficiaires immédiats de cette politique.
Hausser un salaire par l’entremise de la loi ne constitue ni de la générosité, ni ne contribue à la création de richesse. Seuls certains individus en bénéficieront, et cela uniquement pour une période limitée. D’autres travailleurs visés par cette hausse risquent de perdre leur emploi, se retrouver au chômage ou à l’aide sociale et ainsi constituer un fardeau de plus à la charge des contribuables. Les entreprises qui maintiendront leur effectif tenteront, dans la mesure du possible, de refiler la facture aux consommateurs. Par conséquent, ceux-ci en auront moins pour leur argent et réduiront leurs achats, ce qui conduira certaines entreprises à réduire leur effectif et ainsi de suite dans un cercle vicieux qui finit par appauvrir un peu tout le monde. Ce cadeau s’avère donc empoisonné au sens où il n’atteint pas l’objectif fixé et aggrave la situation des consommateurs, y compris des travailleurs qu’il était censé aider.
Personne ne force les travailleurs à offrir leurs services et aucune entreprise ne les retient contre leur gré. L’entente est mutuelle et profitable aux deux partis et par conséquent à tout le monde. C’est le jugement moral de l’État, ou plus précisément celui des hommes et des femmes qui y travaillent, qui bouscule l’ordre établi et finit par amener le chaos. Dicter un prix aux gens qui s’étaient entendus préalablement sur un autre prix ne constitue pas un bien, mais sa dictature. Plus l’État brise les contrats établis au nom de son idée de la morale, plus sûrement il appauvrira le monde sous sa tutelle. Accuser les entreprises d’exploiter les travailleurs constitue ou bien de l’hypocrisie pour détourner l’attention, ou bien de l’ignorance. Peu importe l’excuse choisie, l’établissement de prix et de salaire minimum ne contribuent pas à la richesse, ni ne constituent de la morale.
Un autre règlement visant les automobilistes
La ministre du «Développement durable», madame Line Beauchamp, envisage un règlement qui obligerait les constructeurs automobiles à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Elle considère que les automobilistes en sont les premiers responsables, de sorte qu’elle cherche à les faire payer davantage. Doit-on lui rappeler que les québécois sont les plus taxés en Amérique et que, parmi eux, les automobilistes sont probablement les plus taxés de toutes les catégories de contribuables et qu’ils paient aussi une multitude de frais en tous genres : immatriculation, permis de conduire, recyclage, etc.?
La ministre devrait prendre du recul avant de passer à l’acte, car il est toujours permis de douter -Dieu merci!- que le réchauffement planétaire soit dû à l’action humaine. En effet, plusieurs études laissent entendre qu’il s’agit avant tout d’un phénomène naturel et passager, à l’échelle géologique (voir «Are Carbon Emissions the Cause of Global Warming?» de David Evans). Elle devrait prendre d’autant plus de recul qu’un nombre croissant de scientifiques remet en question la façon de procéder du «Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat». Ce désaveu constitue rien de moins qu’une façon polie de remettre en question les conclusions et la crédibilité des Nations unies (voir l’article «Don't fight, adapt», ses signataires et le fil de presse qui y est lié). Est-ce parce que ce désaveu dérange les croyances établies qu’on en entend peu parler, du moins à mon avis, dans les médias traditionnels?
Les tenants des coupures drastiques des émissions de gaz à effet de serre cherchent par tous les moyens à encourager les gouvernements à utiliser la force coercitive pour arriver à leurs fins. «La planète est en danger!», clament-ils, alors tous les moyens sont permis. La ministre se sent interpellée et puisqu’en politique on «compte les points» au nombre d’intervention, elle s’arrange pour être vue et entendue le plus souvent possible. Au diable la science et la vérité, il s’agit de répéter les mêmes choses ad nauseam. Voilà bien la «morale d’État» dans toute sa splendeur.
Le ministère du «Développement durable» ne devrait même pas exister, car il doit sa naissance à une incompréhension, voire une haine, de l’économie. On a tendance à attribuer à l’économie une vision à courte vue, «non durable», destructrice, égoïste, etc. Cette compréhension vient le plus souvent accompagnée de cette autre : le gouvernement est seul capable d’une vision d’avenir, de sorte qu’il doit montrer l’exemple du «bon» développement, c’est-à-dire de la croissance économique «durable»… Voir «Croissance et «développement durable»» de Jean-Louis Caccomo
L’aide gouvernementale aux secteurs en crise
Qu’on évoque l’aide gouvernementale au secteur forestier, manufacturier, aux producteurs de porcs ou à tout autre secteur en crise, elle se résume à une chose : un saupoudrage des fonds publics aux acteurs qui y sont liés de près ou de loin. Plus les politiciens prennent les décisions à la place des consommateurs, moins les besoins de ceux-ci seront satisfaits. C’est à eux, et non aux politiciens, de décider les services qui leur conviennent. Il en va de l’enrichissement, et pas seulement économique, de tous. Au contraire, l’aide gouvernementale appauvrit les consommateurs et crée une dépendance qui croît avec le temps, d’où la perte d’initiative, d’autonomie, de fierté, etc. Certes, des individus sont affectés par ces crises et il n’y a pas de quoi s'en réjouir. On peut sympathiser avec eux, voire les aider concrètement d’une manière ou d’une autre, mais ce n’est pas au gouvernement de le faire, car cette aide ne peut que nuire aux contribuables et indirectement à tous les consommateurs malgré toutes les bonnes intentions exprimées.
En somme, les politiciens aiment bien donner l’impression qu’ils ont du cœur et qu’ils sont solidaires, mais l’aide qu’ils apportent provient de l’argent soutiré aux contribuables. On ne devrait donc jamais en parler en termes moraux. S’ils insistent sur ce point, alors on peut les relancer en leur demandant d’étayer la légitimité de leurs actes. Ce n’est pas aussi simple qu’il y paraît. On préfère généralement éviter la question de peur de bousculer ses croyances, car il s’agit bien de cela : des croyances. Elles ne sont peut-être pas religieuses, mais certainement d’ordre moral, ou éthique.
En ce qui a trait à l’efficacité de leurs décisions, il ne suffit pas de montrer ceux qu’on aide, on devrait aussi être en mesure de démontrer qu’il n’existe pas de meilleurs moyens. Or, il en existe, mais ils ne sont pas d’ordre politique. Là se situe un problème fondamental, car l’économie se suffit à elle-même dès qu’on respecte la propriété comme principe. Idéalement, on devrait mettre la politique au rancart, mais comme on n’est pas dans un monde idéal, on devrait, à tout le moins, travailler à réduire son champ d’activité. Or, où sont les politiciens qui voient la justice dans la réduction de l’État? Au Québec, les quatre partis poussent du même bord : ils sont tous d’accord pour l’augmentation du salaire minimum, tous d’accord pour «aider» les différents secteurs d’activités, ils voient d’un bon œil la politique d’achat local, la question environnementale, voire l’expropriation des terres et la taxation pour arriver à leurs fins. Devant ce constat, et à l’approche des fêtes, on doit donc leur souhaiter de longues vacances, car malgré que celles-ci coûtent cher aux contribuables, au moins, pendant ce temps, ils ne nuisent à personne.
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