Il est urgent de reconnaître que l’ère du « gouvernement-fait-tout » est révolue. Il faut sabrer dans les programmes qui maintiennent les individus et les entreprises dans un état de dépendance chronique. Il faut abandonner les règlements infantilisants et redonner aux Québécois le goût du risque et de l’aventure qui sommeille en eux. Le Québec possède tous les atouts pour se maintenir parmi les chefs de file en Amérique du Nord. Il suffit de créer un environnement politique, social et économique dans lequel le gouvernement intervient le moins possible.
Le nous et le je
Pierre Duhamel, L’Actualité.com, le 26 octobre 2007
Le débat sur l’identité québécoise m’ennuie profondément. J’ai également peur qu’à force de se gratter le Nous, on oublie qu’il ne peut pas y avoir de force collective sans grandes victoires individuelles.
J’en ai assez de l’histoire misérabiliste de porteurs d’eau colonisés que certains n’arrêtent pas de véhiculer. Les Québécois ne sont pas un peuple faible et fragile, menacé d’être converti contre son gré à l’islam ou assimilé à l’anglais en deux générations. Mon Québec n’est pas né avec la Révolution tranquille et il n’a pas besoin de son gros État interventionniste pour s’émanciper.
Il existait dès le 19e siècle des banques francophones, des manufactures francophones et des commerces francophones. Du côté paternel, un des mes arrières grands-pères était un notaire qui possédait la petite compagnie de téléphone locale et l’autre était propriétaire de moulins. Certains de leurs contemporains ont fait encore mieux.
- La Banque du peuple est fondée en 1835, la Banque nationale en 1860, la Banque Jacques-Cartier en 1862. Et il y en a d’autres !
- En 1842, Jean-Baptiste Rolland fonde une librairie itinérante avant d’établir une papeterie 40 ans plus tard. La compagnie Rolland appartient aujourd’hui à Cascades.
- L’ancêtre de la Dominion Textile avait été fondé par Victor Hudon.
Charles-Théodore Viau fonde sa biscuterie en 1870. - En 1876, Louis-Joseph Forget fonde une firme de courtage en valeurs mobilières qui domine rapidement les marchés financiers. Il est également vice-président de la Montreal Light and Power Company, l’ancêtre d’Hydro-Québec.
- Son neveu Rodophe Forget fonde sa propre maison de courtage et ouvre même un bureau à Paris en 1900. C’est lui qui construira le Manoir Richelieu.
- Une centaine d’hommes d’affaires francophones établissent la Chambre de commerce de Montréal en 1887.
- En 1906, Ernest Ouimet ouvrait le premier cinéma à Montréal.
- Il y a 100 ans Justine Lacoste-de-Gaspé Beaubien fondait l’Hôpital Sainte-Justine.
Alphonse Desjardins a fondé la première caisse populaire en 1900. - Au début du 20e siècle, l’un des hommes les plus riches de Montréal était Frédéric-Liguori Beïque.
- À la même époque, Tancrède Bienvenu prend contrôle de Catelli et de huit fabriques de pâtes au Canada. Il domine également le marché de l’Angleterre.
- En 1923, Rose-Anna Vachon créé une boulangerie, popularisée par le fameux Jo Louis.
Jean Brillant, bien avant Pierre Karl Péladeau – invente la convergence! Il est propriétaire de Québec Téléphone et de stations de radio et de télévision. - En 1934, Wilfrid Pelletier et Madame Anatase David créait l’Orchestre symphonique de Montréal.
- Jean-Louis Lévesque fonde sa maison de courtage en 1937.
- En 1939, Roland Dansereau et Napoléon Piotte sont à l’origine du regroupement de marchands qui deviendra RONA.
- En 1941, le Québec comptait 35 046 administrateurs et entrepreneurs francophones.
Oui, il y a eu recul. Et vous savez quand ? Quand les forces de l’obscurantisme et du repliement au nom de l’identité canadienne-française ont pris le pouvoir politique avec Maurice Duplessis.
Ce sont les mêmes forces qui, au nom de la pureté de la race et de la haine des autres religions, ont obligé les immigrants juifs, grecs et autres non catholiques à opter pour l’école protestante anglaise, la seule qui les acceptait. Ce sont elles aussi qui n’ont pas voulu investir dans l’éducation et qui ont sous-alimenté les universités parce qu’il ne fallait surtout pas accepter des fonds fédéraux.
Pour Maurice Duplessis aussi, les droits des individus constituaient un problème et c’était faire preuve de courage que de les bafouer ! Et, comme plusieurs de mes concitoyens, tout était toujours la faute des autres.
Sommes-nous en train de revivre cette époque ? Je le crains.
(La recherche historique avait été effectuée par Diane Bérard à l’occasion du 100e anniversaire de la Revue Commerce, en 1999. J’étais l’éditeur de ce magazine à l’époque).
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