Chaque Québécois doit plus de 34 000 $ au provincial seulement

Vaut mieux en rire!

Avant de couper des centaines de millions dans les services, est-ce qu’on peut avoir les services ? - Michel Beaudry

04 juillet, 2022

 

Science et politiques stupides, 1/2 : bio, biologie, covid

Par Robert Girouard.

En politique comme dans la vie, le mieux est l’ennemi du bien. Interventionnistes par nature, les gouvernements s’évertuent en effet à mettre de l’avant des politiques ou des programmes qui visent à améliorer les choses dans divers champs d’activité — économie, énergie, agriculture, santé publique, etc. Mais, souvent, pour ne pas dire trop souvent, ces mesures présentées comme des panacées ne donnent pas les résultats escomptés ou sont carrément néfastes. L’histoire récente et l’actualité fournissent quantité d’exemples de politiques stupides… oui, stupides, n’ayons pas peur des mots.

Prenons le cas du Sri Lanka. Nouvellement élu en 2019, le gouvernement de Gotabaya Rajapaksa a tôt fait de lancer sa réforme agricole visant à faire du Sri Lanka le premier pays producteur mondial d’aliments 100 % biologiques. Ce projet d’agriculture soi-disant durable s’inspirait d’un manifesteémanant du Viyathmaga, un mouvement idéologique et en apparence vertueux, composé de membres de l’élite intellectuelle et technocratique srilankaise et qui a aidé M. Rajapaksa à prendre le pouvoir. Fort de cet appui et malgré les mises en garde des agronomes, ce dernier s’est empressé de bannir toute utilisation et importation d’insecticides et d’engrais chimiques dans le but de contraindre les agriculteurs à adopter le bio. D’une pierre deux coups, l’agriculture srilankaise allait ainsi devenir un modèle pour l’humanité, avec des rendements miraculeux, tandis que le gouvernement économiserait 500 millions $ par année en subventions aux agriculteurs pour l’achat d’intrants. Trop beau !

Mais, oups, les résultats —désastreux — de ce programme fondé sur la pensée magique ne se firent pas attendre. La production de riz a chuté de 20 % dès la première année tant et si bien que le pays, jadis autosuffisant, a dû en importer pour 450 millions $. La culture du thé, importante source de devises, a également été frappée de plein fouet. Même constat pour le caoutchouc et la noix de coco. Déjà aux prises avec la crise sanitaire mondiale et la chute consécutive du tourisme, autre source majeure de revenus et de devises, l’économie srilankaise s’est rapidement détériorée, avec toutes les conséquences sociales que l’on devine. Certes, le gouvernement a eu le réflexe relativement rapide de lever les interdictions suicidaires et d’offrir certains dédommagements, mais, selon certains observateurs2, il n’aurait pas totalement retenu la leçon.

Tout cela n’est pas sans rappeler la politique agricole russe formulée par le biologiste amateur Trofim Lyssenko dans les années 1930, laquelle n’a pas livré les mirobolantes améliorations de rendement promises et censées compenser les déboires de la collectivisation des terres. Fondée sur des postulats scientifiques dépassés, voire corrompus, cette politique avait toutefois le net avantage d’avoir le soutien inconditionnel et musclé de Staline et du Parti communiste. Les opposants au lyssenkisme étaient en effet envoyés au goulag ou éliminés ; Nikolaï Ivanovitch Vavilov, l’éminent botaniste et généticien russe qui fonda et dirigea l’Institut pansoviétique de culture des plantes, grand adversaire de Lyssenko, fut notamment emprisonné. Le lyssenkisme a finalement été abandonné plusieurs décennies plus tard, mais le terme est resté pour désigner toute pseudoscience au service d’une idéologie.

Autre exemple, cette fois dans le domaine de la santé publique : la politique idiote du « zéro Covid », qui consiste essentiellement à confiner toute une population — par exemple les 23 millions d’habitants de Shanghai — dès qu’un cas est déclaré au sein de celle-ci. La Chine de Xi Jinping est aujourd’hui la seule à poursuivre cette politique. Tous les autres pays qui l’ont essayée l’ont abandonnée en raison de ses coûts faramineux et des contraintes déraisonnables qu’elle impose aux populations concernées. Pourquoi la Chine persiste-t-elle à appliquer cette médecine de cheval ? Selon le site Bitter Winter3, qui surveille la situation des droits de l’homme et de la liberté religieuse en Chine, cette stratégie a été décidée non pas par les autorités sanitaires, mais bien par Xi Jinping lui-même et le Comité central, et ce, pour des motifs idéologiques inspirés des écrits de Marx et Engels. Primo, les épidémies sont le produit du capitalisme, elles ne sauraient se développer dans les sociétés communistes : le Covid est donc une importation. Deuxio, les stratégies occidentales favorisent la bourgeoisie qui bénéficie d’un meilleur accès aux soins et aux vaccins, tandis que le « zéro Covid » protège toutes les classes sociales également. Comme quoi les régimes autocratiques sont toujours plus lents à corriger leurs erreurs parce qu’il n’y a pas d’opposition pour relever l’idiotie de leurs arguments.

Références

1. Vistas of Prosperity and Splendour
2. In Sri Lanka, Organic Farming Went Catastrophically Wrong, Ted Nordhaus et Saloni Shah, Foreign Policy, 22 mars 2022
3. Xi Jinping’s Zero-COVID Policy: It’s the Ideology, Stupid, Hu Zimo, 21 mars 2022

Science et politiques stupides, 2/2 : transitions énergé 

Second volet des réflexions de Robert Girouard, qui nous apprennent que la Belle Province peut aussi, comme hélas bien des pays (dont la France), mériter le surnom de Bête Province....

Que penser maintenant des programmes de transition énergétique — vers les énergies soi-disant renouvelables — adoptés par de nombreux pays occidentaux à l’insistance de l’ONU et du mouvement écologiste mondial. Osons le dire, à l’instar de Richard Lindzen4 : ce sont des programmes carrément stupides qui ne fonctionnent tout simplement pas et qui se fondent sur la pseudo-science climatiste, elle-même s’appuyant sur des modèles climatiques qui ont tout faux. Même des climatologues orthodoxes comme Gavin A. Schmidt de la NASA affirment, dans la revue Nature5que les modèles climatiques du GIEC exagèrent grandement le réchauffement de la planète dû aux émissions de CO2… sans oublier qu’ils oblitèrent totalement la variabilité naturelle.

L’Allemagne détient à coup sûr le championnat de la stupidité à cet égard, elle qui a investi des centaines de milliards d’euros dans l’éolien et le solaire afin de se sortir à la fois du charbon et du nucléaire. L’objectif à long terme est de réaliser le « net zéro carbone » en recourant quasi exclusivement aux énergies renouvelables, ce qui est évidemment illusoire dans l’état actuel de la technologie. Or, son programme appelé Energiewende — qualifié de désastre par le Groupe McKinsey6, entre autres — est d’ores et déjà un fiasco sur toute la ligne : hausse vertigineuse des tarifs d’électricité, nécessité de doubler la capacité des éoliennes avec des centrales classiques à lignite ou à gaz, gaspillage d’énergie et d’argent à certaines périodes d’abondance de vent, non-atteinte des cibles de décarbonation, menaces à la biodiversité, opposition citoyenne face à l’expansion des parcs éoliens et des lignes de transport d’électricité, etc. Par-dessus le marché, la guerre en Ukraine et les sanctions à l’égard de la Russie sont venues exacerber la situation. Mais, qu’à cela ne tienne : à défaut d’une opposition forte, rien n’indique (à ma connaissance) que le gouvernement songe sérieusement à un recentrage. Le plus ironique est que l’Allemagne ne compte que pour 2,5 % des émissions mondiales de carbone et qu’à supposer qu’ils soient un jour couronnés de succès, tous ses beaux efforts seraient annulés par l’augmentation des émissions ailleurs dans le monde, particulièrement en Chine et en Inde.

Mon Québec natal (environ 0,2 % des émissions mondiales) n’a rien à envier à l’Allemagne en matière de politiques énergétiques stupides. Par exemple, environ 50 % des besoins énergétiques de la province proviennent des hydrocarbures, et tout ce pétrole et ce gaz est actuellement importé malgré que le sous-sol québécois recèle des réserves considérables. Or, tout dernièrement, le gouvernement a décidé tout bonnement d’interdire désormais toute activité d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures sur l’ensemble du territoire. Il faudra par conséquent continuer à importer nos hydrocarbures tout en se privant des retombées économiques qui auraient découlé de l’exploitation de nos réserves. De plus, le gouvernement devra dédommager l’industrie pour les puits d’exploration en activité qui devront être fermés à grands frais. Voilà donc qui est stupide et hypocrite par-dessus le marché !
L’ autrefois très catholique Québec a, au fil des ans, multiplié les coups d’éclat vertueux — et imbéciles — pour se donner une bonne conscience environnementale :

  • rejet du projet extrêmement rentable de la centrale à gaz de Beauharnois (Le Suroît), qu’Hydro-Québec considérait hautement stratégique pour répondre à la pointe d’hiver ;
  • fermeture forcée de la centrale à gaz de Bécancour et dédommagement d’environ 1 milliard $ versé à son propriétaire ;
  • rejet du projet de liquéfaction de gaz naturel de GNL Québec (que certains tentent maintenant de relancer au vu du contexte actuel extrêmement favorable) ;
  • refus du projet de pipeline Énergie Est qui aurait permis un débouché sur l’Atlantique pour le pétrole albertain (une quantité passe néanmoins par train, ce qui n’est pas sans risque) ;
  • instauration d’une taxe carbone et d’un marché du carbone avec la Californie comme unique partenaire, etc.  

Tout cela supposément pour contribuer — de façon infinitésimale — à stopper le réchauffement de la planète, lequel serait pourtant bénéfique pour le Québec où l’hiver dure plus de six mois…et que tous rêvent de fuir en Floride ! Force est de constater que le climatisme, auquel adhèrent tous les partis politiques représentés à l’Assemblée nationale, est devenue la nouvelle religion des Québécois.

Le Québec s’est aussi illustré en lançant, en 2006, un programme de mise en valeur du potentiel éolien. Des permis d’exploitation sont ainsi octroyés à des entreprises privées, et l’électricité produite doit être achetée de force par Hydro-Québec. Or, cette dernière n’avait et n’a toujours nul besoin de cette électricité, surtout pas aux prix élevés convenus dans les ententes avec les producteurs, sans compter que l’intégration de ces sources disparates et intermittentes est à sa charge. Il faut aussi savoir que la production d’Hydro-Québec est quasi 100 % hydroélectrique, soit zéro carbone. Le programme d’éoliennes n’est donc que du vent, c’est le moins qu’on puisse dire. Et tel que rapporté par le Journal de Montréal7, « la vérificatrice générale du Québec a calculé que l’achat forcé d’électricité (… ) par Hydro-Québec auprès des producteurs privés avait fait grimper les tarifs d’électricité de 2,5 milliards $ au cours de la période de 2009 à 2016 ». Un vrai scandale ! On pourrait même être tenté d’établir un lien entre le programme d’éoliennes et l’abandon des centrales à gaz de Beauharnois et de Bécancour ; si c’est le cas, le scandale est encore plus… scandaleux.

Toujours généreux avec l’argent des contribuables, le gouvernement du Québec se distingue également par son programme de subventions à l’achat de voitures électriques, qui ajoute un cadeau de 7000 $ (était hier 8 000 $) aux 5000 $ déjà accordés par le gouvernement fédéral. Pourquoi diable vouloir stimuler les ventes de Tesla et autres quand l’industrie est dépassée par la demande et que les délais de livraison atteignent plus de 18 mois ? L’électricité québécoise compte parmi les moins chères au monde, alors que les prix de l’essence explosent, cela devrait suffire, non ? De plus, les gens qui achètent ces joujoux à batteries — lesquels sont plutôt fortunés en passant — disent les adorer et ne les changeraient pas pour tout l’or au monde.
Bref, les exemples de politiques stupides sont légion, et les lecteurs ne manqueront pas d’en trouver d’autres. La question qui tue : comment se fait-il que nos dirigeants, des personnes réputées intelligentes, puissent prendre des décisions aussi stupides, en agissant le plus souvent de bonne foi ? La réponse simple est qu’en politique, contrairement en science, il n’est pas obligatoire de tenir compte des faits et des données : les valeurs, les intérêts idéologiques ou autres et, surtout les votes ont beaucoup plus d’importance.


Philosophes, psychologues et politicologues se sont évidemment penchés sur la question, et quelques concepts intéressants ont émergé de leurs travaux :

  • La pensée de groupe (groupthink) : 1) pseudo-consensus survenant parfois lorsqu’un groupe se réunit pour penser et prendre une décision : le groupe se donne l’illusion de penser un problème et de parvenir à une décision pertinente alors qu’en réalité la libre pensée individuelle et collective est paralysée par des mécanismes nocifs de dynamique de groupe ; 2) processus selon lequel les individus d’un groupe ont tendance à rechercher prioritairement une forme d’accord global plutôt qu’à appréhender de manière réaliste une situation. Le père du groupthink, Irving Janis, a notamment étudié plusieurs cas notoires, dont le débarquement raté de la baie des Cochons (Cuba).
  • Le raisonnement motivé (motivated cognition): 1) raisonnement biaisé pour produire des justifications ou prendre les décisions les plus souhaitées plutôt que celles qui reflètent avec précision les preuves ; 2) tendance à trouver des arguments en faveur de conclusions que nous voulons croire et à délaisser des arguments en faveur de conclusions que nous ne voulons pas croire. Ce concept a été développé par Dan Kahan9 de la Yale University.

Plus concrètement, c’est presque toujours l’absence de débat véritable et le manque de transparence, alliés à la naïveté ou à la présomption, qui mènent à de mauvaises décisions politiques. Les régimes autocratiques n’en font qu’à leur tête, ils exercent le pouvoir sans partage et leurs rares opposants sont vite muselés. Dans les régimes démocratiques, les gouvernements une fois élus agissent sensiblement de la même manière, à la différence qu’ils risquent d’être défaits aux prochaines élections s’ils commettent trop de bêtises. Ils sont aussi très sensibles à la critique et tendent à pencher du bord des médias et des groupes de pression les plus criards. Ainsi va la politique, depuis toujours et pour toujours.

4. The Imaginary Climate Crisis: How can we Change the Message? A talk by Richard Lindzen, Clintel
5. Climate simulations: recognize the ‘hot model’ problem, Nature, 4 mai 2022
6. Germany’s energy transition at a crossroads, 21 novembre 2019
7. Éoliennes – Des milliards dépensés pour rien, Michel Girard, 23 mai 2018
8. Groupthink: Psychological Studies of Policy Decisions and Fiascoes, Irving L. Janis, 1982
9. Ideology, motivated reasoning, and cognitive reflection, Dan M. Kahan, Judgment and Decision Making, Vol. 8, No. 4, July 2013, pp. 407–424 — Voir aussi : How politics makes us stupid, Ezra Klein, Vox, 6 avril 2014

Aucun commentaire: