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18 mai, 2022

Pourquoi le libéralisme n’est pas l’obsession du profit

 Par Johan Rivalland.

Vingt-quatrième volet de notre série « Ce que le libéralisme n’est pas ».

Le libéralisme est une philosophie du droit, qui défend les idées de liberté et de responsabilité, au service de l’épanouissement des individus. Si l’économie y occupe une place importante et que l’esprit d’entreprise y est salué, c’est pour leurs dimensions fondamentales dans l’amélioration du cadre dans lequel les individus peuvent se réaliser.

Si l’on a en tête la célèbre pyramide de Maslow, on pourrait en quelque sorte considérer qu’ils font partie des éléments des premiers niveaux de la pyramide, essentiels à l’atteinte des niveaux supérieurs, jusqu’à l’accomplissement de soi, qui offre le véritable sens à sa vie.

Dans ces conditions, croire ou s’imaginer que le libéralisme se réduirait à la sphère de l’économie et de l’entreprise et serait assimilable à une recherche obsessionnelle du profit, n’a aucun sens. Il s’agit, au mieux d’une vue de l’esprit, au pire d’un pieux mensonge.

Pour paraphraser Alexis de Tocqueville, dans De la démocratie en Amérique, nous pouvons affirmer (et déplorer) la chose suivante :

Une idée fausse, mais claire et précise, aura toujours plus de puissance dans le monde qu’une idée vraie, mais complexe.

 

Le profit, un impératif incontournable pour une entreprise

C’est le B.A.BA du fonctionnement de base d’une économie, tout au moins de type capitaliste. Qui serait assez fou pour entreprendre, créer des biens ou des services destinés à être vendus à des clients, tout en acceptant de perdre de l’argent ?

Plutôt que de sataniser le profit ou de l’évoquer avec mépris, peut-on s’imaginer créer une entreprise qui nous tiendrait à cœur ? Que faut-il ? Du temps, de la passion, une envie de créer (y compris des emplois), d’imaginer, de satisfaire des besoins de personnes intéressées, de se réaliser. Mais aussi du capital (de l’argent personnel économisé, emprunté à des amis, à sa famille, à une institution bancaire, à des investisseurs de confiance quels qu’ils soient).

Le libéralisme est ici le cadre qui permet de laisser place à l’initiative individuelle, à la liberté de pouvoir entreprendre, de pouvoir créer, de contribuer au bien-être de ceux pour qui cette création va être utile, répondre à un de leurs besoins.

Certes, on me rétorquera qu’il n’existe pas que le système capitaliste. Mais alors êtes-vous prêt à accepter – ou à faire accepter au plus grand nombre, et sans violence s’il vous plaît – une économie de type tribale (ce qui est peu réaliste avec plus de 7 milliards d’habitants sur Terre), communiste (dont les différentes expériences ne semblent pas avoir été très concluantes, c’est le moins que l’on puisse dire), ou de pillage ? Car comme l’écrivait l’économiste Walter E. Williams, cité par la Foundation for Economic Education (FEE), auteur d’un intéressant article intitulé « Comment le profit a créé la prospérité d’aujourd’hui » :

Avant le capitalisme, les gens accumulaient de grandes richesses en pillant et en asservissant leurs semblables. Avec l’essor du capitalisme, il est devenu possible d’amasser de grandes richesses en servant et en faisant plaisir à son prochain.

Car là est bien le sens de tout cela. Chercher le profit pour le profit n’est pas l’idée la plus répandue. Vouloir n’y trouver qu’une chose essentiellement malfaisante n’est qu’une vision de l’esprit des frustrés, des jaloux ou des pessimistes qui voient le malheur partout. Il s’agit au contraire d’un moyen essentiel de dégager un potentiel de création qui doit progressivement bénéficier au plus grand nombre (même si des esprits chagrins pourront toujours trouver des exemples ponctuels destinés à prouver le contraire). L’article du FEE montre d’ailleurs bien comment la prospérité d’aujourd’hui (même si elle ne touche évidemment malheureusement pas tout le monde ou pas assez vite) est le fruit de ce qu’ont permis les profits d’hier.

 

Ce que permet le profit

De fait, il est trop souvent de bon ton – et les grands médias jouent régulièrement un rôle malheureux en la circonstance – de dénoncer les profits de grandes entreprises comme s’il s’agissait d’un véritable scandale. Faisant fi de tout ce que ces grandes entreprises (qui ne sont bien entendu pas les seules, et qui permettent d’ailleurs à des tas d’autres entreprises plus petites de vivre et de constituer des sources d’emplois) apportent à l’économie française, et donc à ses habitants (des emplois, des ressources, des rentrées fiscales colossales, donc le financement d’une partie non négligeable de tout ce que l’État distribue très généreusement sous de nombreuses formes à des Français particulièrement demandeurs d’intervention), on a constamment l’impression que ces entreprises sont coupables. Jusqu’à, pour certains, être allés se féliciter de manière parfaitement indécente de la mort de l’un de ses dirigeants, Total étant l’un des épouvantails habituels en la matière.

Mais que se passerait-il donc si on punissait les « coupables » en prélevant par exemple bien davantage sur leurs profits « honteux » ? À moins de nationaliser ces entreprises (là encore, il faudrait un article entier pour montrer où cela peut mener), on leur couperait leur source principale de financement. Et on grèverait ainsi non seulement l’avenir de l’entreprise, menacée de faillite ou encouragée à partir vers d’autres cieux, mais celui de ses salariés, ainsi que les ressources dont profite l’État français.

Car, comme il est utile de le rappeler à ceux qui la connaissent, ou de le faire connaître aux plus jeunes qui n’auraient jamais entendu cette célèbre formule très juste (même si sujette à critiques) des années 1970 du chancelier de l’époque Helmut Schmidt :

Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain.

En effet, ce sont les profits qui permettent l’investissement (même s’ils ne lui sont pas entièrement dévolus). Investissement sans lequel l’entreprise ne peut préparer le futur, donc son avenir, à commencer par sa simple subsistance. Car ceux qui exècrent les profits semblent oublier qu’une entreprise, aussi grande soit-elle, n’est jamais assurée de sa survie. C’est pourtant une évidence : si ce qu’elle propose est dépassé, les clients se détourneront. Ou si des concurrents proposent mieux, ils iront acheter auprès d’eux. L’entreprise, quelle qu’elle soit, n’a donc pas le choix : elle doit nécessairement investir. Pas de profits, pas d’investissements. Ou alors des difficultés à pouvoir investir, car il faudra le faire par l’endettement. Et qui prêtera à une entreprise qui ne convainc pas, dont l’avenir semble trop incertain ?

 

Une condition nécessaire, même si pas forcément suffisante

Les profits sont donc une condition essentielle pour pouvoir investir dans de bonnes conditions, et l’investissement est une condition sine qua non pour assurer son avenir. Au pire, pour éviter un déclin trop rapide voire la disparition, au mieux si tout fonctionne bien (ce qui n’est jamais assuré et donne lieu là encore à des incompréhensions), pour offrir les conditions qui permettront d’assurer la croissance, et donc la nécessité et la capacité à embaucher (« les emplois de demain »). Et/ou à assurer les niveaux de salaire, envisager le versement de primes et, si tout se passe vraiment très bien, à augmenter les salaires dès que les conditions y sont favorables.

On l’aura compris, le profit n’est qu’une condition préalable, nécessaire, dans un contexte de concurrence (saine) pour pouvoir continuer à financer la recherche, l’ingéniosité de la création, de l’innovation, permettre d’assouvir les besoins des individus. C’est par l’ordre spontané que l’on peut envisager de réaliser l’harmonie sociale qui pourra en résulter.

Satisfaire les besoins passe par l’échange. En effet, on peut difficilement vivre en autarcie. Toute autre idée n’est qu’illusion, ou préjugé faux dans ses fondements.

 

Les profits, pas l’alpha et l’oméga du libéralisme

En conclusion, si les profits sont une condition essentielle dans le système capitaliste et que le libéralisme est un cadre favorable à la liberté d’entreprendre et, de là, à ce qui permet d’envisager la prospérité et un certain bien-être physique et matériel, il ne s’agit pas d’une fin en soi. Jamais le libéralisme n’a considéré le profit de la sorte. Son dessein va tout naturellement bien au-delà.

Si l’on revient à l’allusion à la pyramide de Maslow en préambule de cet article, une fois assuré du mieux possible les conditions de base de l’existence, bien entendu que ce qui est recherché ensuite et constitue l’ambition ultime (et n’est pas propre uniquement, bien évidemment au libéralisme), ce sont les trois niveaux suivants et en particulier le dernier (l’accomplissement de soi).

Ce qui sera d’autant plus atteignable, a priori, dans une société où l’on défend les libertés.

 

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